La Chronique Agora

Gagnez 15% par an en faisant six grasses matinées par semaine

▪ L’investisseur qui a du succès n’aime pas les week-ends prolongés. Pourquoi ? Parce qu’un spéculateur qui n’aurait jamais investi le lundi depuis janvier 2010 aurait réalisé une performance de 2,3% sur la Bourse américaine, alors que l’indice S&P 500 a progressé de plus de 18%.

Dans mon article de début mars, je vous expliquais comment gagner sept fois sur dix. Aujourd’hui, vous saurez pourquoi vous avez intérêt à vous lever le lundi matin. Surtout qu’après avoir lu ce texte, vous pourrez vous permettre de ne vous lever QUE le lundi.

Si vous n’investissez QUE le lundi (vous pouvez donc vous permettre de faire la grasse matinée du mardi au dimanche), vous allez gagner environ 15% par an en Bourse. Mais comme je vous le disais, si vous préférez prolonger votre week-end le lundi, votre performance boursière s’en ressentira fortement : +2,3% seulement aux Etats-Unis.

Alors, vous préférez dormir six matins par semaine et gagner 15% — le lundi — ou dormir un matin et gagner 2,3% ? Dur choix…

Depuis janvier 2010, une curieuse tendance s’est mise en place à Wall Street. Pratiquement l’intégralité de la performance des marchés a été réalisée le lundi : 15,7% de la hausse totale de 18,3% pour le S&P 500.

▪ Le lundi est de loin LA séance la plus prolifique sur le marché. Entre janvier 2010 et fin février 2011, douze des quatorze séances du lundi se sont conclues sur une progression de l’indice ; neuf séances du lundi sur ces quatorze ont atteint une performance supérieure à 1% sur cette période.

Les explications derrière ce curieux phénomène pointent vers la psychologie des marchés, bien sûr : le lundi marque le début d’une nouvelle période d’investissement — également appelée « semaine » par le commun des mortels. Et les traders veulent lancer cette nouvelle ère de manière positive — en achetant par exemple.

Il est également possible d’imaginer que, bien reposés et détendus après un week-end en famille ou au polo, ces derniers considèrent d’un oeil neuf les perspectives économiques des entreprises cotées. (Ou alors ils ont pris tellement de cocaïne durant le week-end qu’ils passent leur lundi à appuyer sur le bouton « achat » en attendant que la tempête sous leur crâne se calme.)

Autre explication encore : après avoir essuyé tout le week-end les quolibets de leur virago sur leurs risibles performances (je parle de performances boursières, bien sûr…), les traders reviennent au bureau le lundi matin bien déterminés à montrer à leurs furies que non, tout le monde ne ferait pas mieux qu’eux.

Enfin il reste l’explication qui se baserait sur une vague théorie du complot, du genre : les banquiers de tout poil (étatiques ou privés) se réunissent en général en fin de semaine pour coordonner leurs actions communes de manipulation des marchés. Mais une telle hypothèse supposerait un minimum d’efficacité de la part de nos amis les « banksters », ce qui flanque illico cette belle théorie à l’eau.

Les entreprises cotées sont-elles plus performantes le lundi ? L’actualité fournit-elle des données économiques plus favorables le premier jour de la semaine ? Evidemment que non. C’est même le contraire : lorsqu’une société publique doit donner une mauvaise nouvelle, elle le fait le vendredi après la clôture du marché, pour donner aux épargnants davantage de temps pour digérer celle-ci.

Conclusion : voilà bien une nouvelle preuve de l’irrationalité des marchés.

Les banques déploient des trésors d’invention pour convaincre leurs clients qu’elles maîtrisent l’évolution des Bourses. Qu’elles comprennent ce qu’il se passe et qu’elles seront en mesure de faire croître les patrimoines qui leur sont confiés. Alors que pratiquement l’intégralité de la performance d’un marché est directement liée à la psychologie dérangée d’opérateurs déconnectés de la réalité.

Vous comprenez maintenant pourquoi je privilégie une autre approche du marché ?

[Marc Mayor est le fondateur et président d’Inside ALPHA, une entreprise helvétique spécialiste des approches financières éliminant le risque de marché (investissements dits « ‘neutres au marché »). Depuis plus de dix ans, Marc analyse avec humour et sagacité le comportement des initiés de la Bourse, notamment dans les colonnes de sa rubrique hebdomadaire « Le Coin des Insiders »‘, qui paraît chaque vendredi dans le quotidien financier L’Agefi (Suisse). Marc Mayor met également toute son expertise financière, ses analyses et ses recommandations au service des investisseurs particuliers dans le cadre de sa lettre d’information, La Lettre de Marc Mayor]

 
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