La Chronique Agora

Le FMI entérine l’intégration du yuan dans les DTS : les élites s’activent avant la prochaine crise (2ème partie)

Hier, je vous ai expliqué que les DTS s’apprêtaient à être la nouvelle monnaie mondiale. Le FMI va en imprimer et s’en servir lors de la prochaine crise de liquidité qui frappera le système financier.

Ce que je vous ai dit, surtout, c’est qu’à mon sens, si l’intégration du yuan a été si rapidement entérinée par le FMI (le 30 novembre au lieu de mars 2016) c’est parce que, les élites s’attendent à ce que la prochaine crise frappe plus tôt que prévu. Elles sont donc passées à la vitesse supérieure.

Très bien.

Mais alors, voyons à présent comment fonctionnent ces DTS et pourquoi je dis qu’ils relègueront le dollar au statut de monnaie locale… au même titre que le peso mexicain.

▪ La Chine est entrée dans la danse
La plupart des gens pense que les DTS sont adossés à un panier de devises. Or ce n’est pas le cas. Ce soi-disant panier n’est autre qu’une liste de devises utilisée afin de calculer la valeur des DTS. L’intégration d’une devise dans le panier des DTS est basée sur quatre critères :

1. le volume des paiements internationaux effectués dans cette devise ;
2. le montant des réserves détenues dans cette devise ;
3. la liberté des mouvements de capitaux, afin que la devise en question soit librement convertible en autres devises des DTS ;
4. se conformer, en toute transparence et avec régularité, aux normes du FMI en matière de comptabilité et de communication.

Au cours des 30 dernières années, il ne s’est produit qu’un seul changement au sein des adhérents de ce club select des DTS. Ce changement a eu lieu en 1999, et pour une raison purement technique : le remplacement du mark allemand et du franc français par l’euro.

Les DTS ont été dominés par les "Big 4" (les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Japon et l’Europe) depuis que le FMI a abandonné l’étalon-or en 1973

Mise à part cette modification technique, les DTS ont été dominés par les "Big 4" (les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Japon et l’Europe) depuis que le FMI a abandonné l’étalon-or en 1973. C’est pourquoi l’intégration du yuan est si capitale.

L’intégration du yuan, c’est une marque de reconnaissance de la part des plus grandes puissances financières du monde, Etats- Unis en tête. Cela signifie que la Chine est une superpuissance financière et qu’elle mérite d’avoir sa place autour de la table lors du reset du système monétaire international.

Vous pouvez considérer cela comme une partie de poker à quatre joueurs, avec un cinquième joueur disposant d’une grosse pile de jetons qui vient d’entrer au tour de table.

Désormais, la partie de poker va adopter une nouvelle dynamique.

La Chine ne remplissait pas vraiment tous les critères fixés par le FMI en vue d’intégrer le club des DTS. En deux mots :

L’utilisation du yuan dans le cadre des échanges commerciaux internationaux répondait bien aux conditions.

La part du yuan dans les paiements internationaux a progressé régulièrement, de moins de 1% en 2013 à environ 2% en 2014. Le yuan approche actuellement des 3%, comme le montrent les tableaux ci-dessus.

Le critère du FMI auquel la Chine ne répond toujours pas, c’est celui de la libre circulation des capitaux… Et les démarches de la Chine menées en vue d’évoluer dans le sens du FMI ont provoqué une certaine confusion et un certain tumulte sur les marchés dernièrement (voir la dévaluation du yuan au mois d’août dernier).

La Chine n’a pas toujours été transparente, non plus, en ce qui concerne la publication des positions relatives à ses réserves mais "améliore" sa transparence en matière de publication de ses réserves, en particulier en ce qui concerne l’or.

La décision d’intégrer le yuan aux DTS est une décision politique et non une décision économique

En réalité, rien de tout cela n’importe. La décision d’intégrer le yuan aux DTS est une décision politique et non une décision économique. Le feu vert vient d’être donné par le conseil d’administration du FMI et l’intégration prendra effet au 1er octobre 2016

▪ Pour la cinquième fois en 40 ans…
Pourquoi cet empressement politique à intégrer le yuan aux DTS alors que la Chine ne répond pas aux exigences habituelles ? La réponse, c’est qu’une nouvelle crise financière se rapproche de jour en jour.

Ces crises se produisent tous les cinq à huit ans : c’est presque réglé comme du papier à musique. Pour vous faire une idée, vous pouvez observer les crises financières du Mexique (1994), de la Russie/LTCM (1998), de Lehman (2008). Une autre crise surviendra en 2018, si ce n’est plus tôt ; c’est une quasi-certitude. Un nouvel ordre monétaire sera en place d’ici 2024, comme je vous l’ai expliqué dans mon dernier essai 2024, leNouvel ordre monétaire.

La prochaine crise financière dépassera la capacité des banques centrales à éteindre l’incendie. La seule source de liquidités aux fins de renflouement, ce sera les DTS. Mais une émission colossale de DTS exigera la coopération de la Chine. Ce n’est pas une question de vote au sein du FMI (le vote de la Chine n’est pas aussi étendu). La raison, c’est que les DTS ne sont utiles que s’ils sont échangés contre d’autres réserves de devises, afin de soutenir les banques et de fournir des liquidités à ceux qui se débarrassent de leurs actions (le FMI dispose d’un bureau de transactions secret où l’on procède à ces échanges de DTS.) Lorsque les pays se retrouveront en pleine crise, ils ne voudront pas de DTS en provenance de Citibank : ils voudront des dollars.

Mais qui échangera des dollars contre les DTS imprimés par le FMI ?

Réponse : la Chine (nous développons dans notre numéro spécial d’Intelligence Stratégique). Il y a une astuce, toutefois. La Chine ne procèdera à ces échanges DTS/dollar que si le yuan fait partie du panier des DTS. La Chine ne veut pas cotiser au club à moins d’en faire partie. Il a fallu donc s’assurer rapidement de son soutien.

La précipitation à intégrer la Chine aux DTS doit être perçue comme le fait que les élites du système monétaire international s’organisent avant que la prochaine crise financière ne s’abatte

La précipitation à intégrer la Chine aux DTS doit être perçue comme le fait que les élites du système monétaire international s’organisent avant que la prochaine crise financière ne s’abatte et ne détruise leur portefeuille de valeurs.

Dans les années 1960, les hippies se servaient d’une expression signifiant l’appartenance à un petit groupe. Ils disaient : "tu es dans le bus ou hors du bus".Eh bien, le FMI souhaite que la Chine monte dans le bus avant que ne frappe la prochaine crise financière. Lorsque des milliers de milliards de DTS seront émis au cours de la prochaine crise financière, la Chine se débarrassera de ses dollars en échange de DTS (dont le yuan fera partie). Le dollar américain se trouvera réduit au statut de monnaie nationale.

Le dollar sera encore utilisé dans le cadre de transactions se déroulant à l’intérieur des Etats-Unis (tout comme le peso mexicain est utilisé au Mexique), mais il ne sera plus la référence en matière de saine gestion des réserves.

L’impact de cette émission de DTS sur le dollar sera très inflationniste.

Au bout de plus de 10 ans de tentatives et d’échecs, la Réserve fédérale obtiendra finalement l’inflation qu’elle désire.

Mais elle maudira le jour où cela arrivera.

Au lieu des 2% d’inflation, l’objectif de la Fed (ce qui revient à commettre un vol "au ralenti"), il faut s’attendre à une inflation de 10%, voire au-delà.

A partir de là, l’inflation échappera encore plus à tout contrôle.

Avec des milliers de milliards de DTS et des milliers de tonnes d’or, la Chine mènera la danse de la même façon que les Etats-Unis l’ont fait à Bretton Woods en 1944. La disparition lente du dollar, qui s’est déjà amorcée en 2009, avec l’émission de plus de 250 milliards de dollars en DTS, sera totale.

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile