La Chronique Agora

La fiscalité locale : 40 ans d’injustice… et aucune bonne solution !

▪ Le gouvernement nous a promis une pause fiscale…
… mais il semblerait que cela ne touche que les impôts et taxes que Bercy perçoit directement. Pour le reste, attendez-vous à des surprises !

En ce qui concerne la fiscalité locale, les compteurs s’affolent depuis des années dans une certaine indifférence médiatique. C’est comme s’il s’agissait de l’un de ces petits secrets un peu honteux que chacun d’entre nous garde pour soi et endure en silence.

Il y a les privilégiés du système — ceux qui habitent des communes riches et qui se taisent… et il y a les victimes — beaucoup plus nombreuses et bien moins fortunées, mais qui ont du mal à se faire entendre.

Pour être clair, il n’y a pas plus injuste ni plus inégalitaire dans son mode de calcul que la taxe d’habitation (laquelle est payée aussi bien par les locataires que les propriétaires).

Si une commune a commis des imprudences ou financé des projets pharaoniques sans s’assurer de mettre les recettes qu’il faut en face, c’est le cauchemar pour les habitants (riches ou pauvres)… et pour très longtemps.

Cela fait deux décennies que les différents gouvernements, de droite comme de gauche, se disent conscients du problème. Michel Charasse, par exemple, s’était attelé à un projet de réforme dès 1990… mais qui fut vite enterré avec l’alternance à Matignon.

Et comme les victimes du système ne déferlent pas sur la capitale par centaines de milliers pour protester contre "l’injustice pour tous", les ministres concernés (budget, logement, industrie, équipement…) ne se sont jamais sentis dans l’urgence de traiter ce dossier.

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Cependant, sans avoir l’air d’y toucher, la remise à plat de la fiscalité annoncée par Jean-Marc Ayrault va s’appliquer bien au-delà du seul impôt sur le revenu et la CSG ou RDS.

Les impôts et taxes locaux vont forcément faire partie du "grand chantier" annoncé par l’Elysée. D’ailleurs, le gouvernement a lancé dès septembre 2013 et dans la plus grande discrétion une réévaluation des valeurs locatives — inchangées depuis 1971 ! –, lesquelles servent à calculer les impôts locaux des particuliers.

L’ensemble des recettes locales au sens large s’élève à 80 milliards d’euros par an. Cette somme est répartie comme suit :

– La taxe d’habitation (21 milliards d’euros payés par tous les contribuables)

– La taxe foncière sur le bâti et le non-bâti — comme les terrains nus –, à concurrence de 29 milliards. Elle ne concerne que les propriétaires, mais beaucoup ne perçoivent que de faibles revenus et sont taxés comme les plus riches.

– Les taxes d’enlèvement des ordures ménagères (six milliards d’euros payés par tout le monde)

– La toute nouvelle CET (ou contribution économique territoriale). Elle remplace la taxe professionnelle (23 milliards, ne concerne que les personnes morales, multinationales comme artisans).

Le même barème s’applique aux assujettis à l’ISF comme à ceux dont les revenus sont proches des minima sociaux (sauf à ceux bénéficiant d’aides aux handicapés) ou aux détenteurs d’une toute petite retraite (nos aînés peuvent obtenir une réduction mirobolante de 100 euros sous certaines conditions !). Dans de telles conditions, la fiscalité locale mérite largement sa réputation de système le plus injuste.

Mais la rendre plus équitable sans diminuer les recettes implique des transferts de charges entre contribuables… et ce sont principalement les classes moyennes supérieures et les propriétaires de résidences secondaires qui vont trinquer.

C’est la raison pour laquelle le gouvernement se garde bien de communiquer sur ce sujet avant les municipales de mars.

Nous savons que beaucoup d’élus socialistes réclament d’aller bien au-delà de la révision de la base locative concernant les 46 millions d’assujettis (et qui date de plus de 40 ans). Ils souhaitent que le revenu des occupants des logements soit pris en compte dans le calcul de la taxe d’habitation. Cela reviendrait de fait à instaurer un complément d’impôt sur le revenu pour les plus aisés — mais local cette fois-ci.

Cependant, même en approuvant le principe d’une plus grande justice entre contribuables, on ne résoudrait pas certains paradoxes. Les locataires de logements sociaux ou de taille modeste paieraient moins, alors que ceux qui — à revenu égal — occupent des biens anciens et vétustes mais plus grands (ce qui est souvent le cas de l’habitat rural) seraient plus lourdement taxés (à l’impôt foncier).

Et des retraités habitant un château situé dans une commune sur laquelle est bâtie une centrale nucléaire ne paieraient pratiquement plus de taxe d’habitation… Tandis qu’un appartement de type F2 dans un désert industriel mais occupé par deux cadres moyens subirait une surfiscalisation.

Ce sont deux exemples délibérément extrêmes, mais ce grossissement du trait est destiné à mettre en évidence les mille cas particuliers qui ne manqueraient pas de susciter des polémiques à l’infini. Cela risque de transformer la réforme en usine à gaz… et surtout de faire beaucoup plus de mécontents que de satisfaits, ce qui est politiquement suicidaire.
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