La Chronique Agora

La Fed contre le Grand Perturbateur

Trump

Contre les avis répétés de Trump, la Fed poursuit ses augmentations de taux. Mais l’erreur suivante (les baisser en catastrophe) est en vue.

Hier était le grand jour. Tous les regards étaient tournés vers la Fed. Des regards solitaires. Des regards tristes. Des regards troublés…

… et le regard perçant de Donald J. Trump.

Le choix de défier Trump et de faire chuter les marchés

Il faut dire que la Fed était confrontée à un choix difficile. Elle pouvait continuer à augmenter les taux comme prévu, défiant M. Trump… ou elle pouvait mettre son programme en pause.

Elle a choisi la première option, augmentant son taux de 25 points de base.

Elle a donc fait le choix de risquer non seulement la colère de M. Trump… mais aussi celle des marchés, qui ont toutes les chances de chuter pour le reste de l’année. Si cela se concrétise, c’est bien entendu la Fed que l’on accusera.

Ensuite, quand les choses deviendront vraiment difficiles, la Fed cèdera… revenant à l’Erreur n°3, bien connue : baisser les taux en panique pour tenter de regonfler la bulle.

Comme vous le savez, le mode opératoire du président américain est désormais bien défini. Il lance une bagarre… provoque un beau désordre en balançant des insultes et des accusations à la volée… puis annonce une victoire tandis qu’il bat discrètement en retraite.

Les médias adorent. Une escarmouche après l’autre… la boue vole… les spectateurs en restent bouche bée…

Les fans pensent qu’il se bat pour eux. Les critiques pensent qu’il se bat contre eux. Et la vie continue.

Ce combat-ci — entre la Fed et le président — est différent. Même si elle a augmenté son taux directeur hier, il est très probable que la Fed fasse une pause en 2019. Quelle que soit sa décision, les deux côtés perdent.

Des chiffres « sans signification » pourtant cités comme preuve

Dans un tweet mardi dernier, le président Trump avait pourtant clairement fait comprendre ce qu’il attendait de la Fed :

« J’espère que les gens de la Fed liront l’édito du Wall Street Journal d’aujourd’hui avant de faire une erreur de plus. Par ailleurs, ne laissez pas le marché devenir encore plus illiquide qu’il ne l’est déjà. Ressentez le marché, ne vous contentez pas de suivre des chiffres sans signification. Bonne chance ! »

Le président américain est vraiment inénarrable. Il est la preuve vivante que le rêve américain fonctionne : quiconque hérite de 400 millions de dollars peut devenir riche.

Mais où a-t-il pêché l’idée qu’un marché boursier à 30 000 milliards de dollars est « illiquide » ? Ou que l’erreur de la Fed était d’augmenter les taux… plutôt que les avoir laissés trop bas pendant trop longtemps ?

Quant aux « chiffres sans signification », ce sont ceux-là mêmes que M. Trump cite comme preuve de son excellent travail.

Et « ressentir le marché » ? Tout ce que les investisseurs ressentent, c’est de la douleur et de la perplexité. Ils pensaient que Trump était de leur côté. Et déjà, les actions ont perdu près de 20%. Selon notre analyste Joe Withrow, près de la moitié de toutes les actions américaines sont désormais en territoire baissier.

Approximativement 6 000 milliards de dollars ont disparu des poches des investisseurs. Et si Alan Greenspan, lui-même ancien président de la Fed, a raison, quoi que fasse la banque centrale américaine, il y aura encore abondance de pertes à encaisser et abondances de blâmes à distribuer. Selon CNN :

« Greenspan a déclaré qu’il était peu probable que le marché actuel se stabilise puis engrange une nouvelle hausse. ‘Il serait très surprenant de le voir se stabiliser plus ou moins à ces niveaux avant de redécoller,’ a déclaré Greenspan. Les marchés pourraient encore grimper mais ‘à la fin de cette hausse, tous aux abris’. »

Greenspan a également déclaré sur CNN que le marché haussier était terminé, soulignant les problèmes des actions ces derniers jours. Dans l’ensemble, le S&P est en route pour son pire mois de décembre depuis 1931.

Le Grand Perturbateur ne dérange que ce qui est insignifiant

Une bonne partie du blâme sera attribuée à la Fed. Mais M. Trump aura lui aussi quelques taches sur sa cravate rouge. S’il avait su lire l’heure, il aurait poussé la Fed à normaliser plus encore l’an dernier : cela aurait provoqué une correction à un moment où il aurait été encore possible de l’attribuer à Barack Obama.

Ensuite, le président aurait pu passer à l’attaque… et se lancer dans des combats qui en valent vraiment la peine — réduire les dépenses, réformer la Fed, assainir le Marigot, remettre le Deep State à sa place… (évidemment, rien de tout cela n’était probable… mais il aurait été amusant de voir le Grand Perturbateur perturber des choses qui en valent la peine).

Sauf que nous avons désormais dépassé la moitié du règne de M. Trump. Le président insiste désormais que c’est Son économie… qu’Il en est responsable… et qu’il faudra Lui passer sur le corps si l’on veut y changer quoi que ce soit.

Peut-être ne saurons-nous jamais avec certitude ce qu’il se passe… ou l’heure qu’il est.

Mais au moins les gens commencent-ils à regarder leur montre.
[NDLR : l’année 2019 s’annonce difficile pour votre épargne… Prenez les mesures de protection qui s’imposent dès maintenant, et transformez la débâcle des marchés américains en opportunités de gain ! Tout est expliqué ici.]

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