▪ Aucun suspense, aucun changement de scénario. Vendredi, le Dow Jones a clôturé en hausse, comme toujours ; même si c’est par le plus petit écart (+0,06%), c’est de la hausse.
C’est systématique, répétitif, délibéré, totalement orchestré et pleinement assumé par la Fed, avec les encouragements des médias financiers. Les actions doivent continuer de monter, peu importe l’actualité du jour, la conjoncture bonne ou mauvaise, les anticipations des analystes, le niveau de tension des taux longs.
Il n’y a qu’un seul sens : la hausse. La pièce de la Fed retombe toujours du côté pile : c’est inscrit sur ses deux faces !
Une seule stratégie : acheter. Aucune appréciation divergente n’est tolérée. Les actifs risqués doivent grimper… Et s’ils ne le font pas de leur plein gré, ou pas suffisamment, les cours seront arrachés à la hausse durant les cinq dernières minutes — et même les 30 dernières secondes pour le Nasdaq ce vendredi soir, ce qui lui a permis de passer de -0,11% à -0,01%, à 3 459 points.
Cette stratégie nous a été resservie probablement pour la 60ème fois depuis le 1er janvier, sur un quota de 100 séances (c’était la 100ème de l’année ce vendredi, veille d’un week-end de trois jours aux Etats-Unis).
Bien sûr, les optimistes « rationnaliseront » le rebond des indices américains du fait de la hausse de 3,3% des commandes de biens durables en avril (ou de la hausse des ventes de logements neufs la veille), au prétexte que le chiffre était « supérieur aux anticipations ». Mais après une chute de 5,9% en mars, le bilan de l’activité manufacturière US depuis le 1er janvier reste très mitigé.
▪ La Fed ordonne, les marchés suivent
La véritable motivation reste la conviction unanime et absolue que Ben Bernanke va continuer d’injecter des cataractes de liquidités (85 milliards de dollars par mois, c’est l’équivalent de la moitié du plan Marshall dans sa totalité de 1948 à 1952).
Ce sont maintenant pas moins de 90% (un ratio jamais observé en 70 ans) des gérants qui répètent en choeur que Wall Street va continuer de monter et qu’il faut acheter tous les creux. Et la raison n°1 est : parce que la Fed — ainsi que la Bank of Japan — veulent qu’il en soit ainsi et que ce soit absolument évident, même pour l’opérateur le plus naïvement convaincu que le marché « achète l’avenir ».
Il se trouvait même des gérants pour affirmer vendredi soir que le véritable chaos dont a été victime Tokyo jeudi et vendredi (avec successivement 1 460 points puis 1 005 points de variation intraday et deux flash krachs à 24 heures d’intervalle) était une « bonne nouvelle » pour le marché japonais. Eh oui : cela a fourni aux retardataires une opportunité d’investir à bon compte !
Après +54% depuis le premier janvier sur le Nikkei, c’était vraiment une aubaine… Et avec des taux longs remontés de 0,57% à 0,87% en trois semaines, c’est cadeau !
▪ Un jour pour ne pas oublier…
A New York, les taux longs affichent 2,02%, contre 1,62% en début de mois. Le S&P 500 est passé de 1 585 à 1 687, avant de retomber vers 1 637 points vendredi en début de séance.
Mais le marché achète — paraît-il — tous les creux !
Le S&P a remonté la pente vendredi pour en terminer sur un repli de 0,03% : ce score absurdement négatif doit être dû à la défaillance d’un algorithme !
Un « loupé » rapidement corrigé après la clôture puisque l’indice phare américain ne tardait à prendre 0,3% de plus peu après la clôture. De bon augure à la veille d’un week-end de trois jours — ce lundi, c’est le Memorial Day aux Etats-Unis.
Un jour du souvenir qui nous permet de ne pas oublier la mauvaise foi des commentateurs qui nous vantent le caractère merveilleux de l’activité de faux monnayeur de la Fed et de la « reflation » délibérée des actifs à risque (les actions).
Nous y reviendrons plus longuement demain… Pour lever un coin du voile, interrogez-vous simplement sur le prétendu « effet de richesse » que suscite une hausse de 40% des actions pour les 200 millions d’Américains qui n’en possèdent pas, sur les 50 millions qui n’en détiennent que l’équivalent de quelques dizaines de milliers de dollars… et les cinq millions d’Américains qui possèdent 85% du stock.
Nous parlons de ceux dont les plus-values sur les 12 derniers mois se chiffrent en millions, voire en centaines de millions de dollars. Comment ne verraient-ils pas en Ben Bernanke un pur génie… tandis que deux tiers de leurs concitoyens s’appauvrissent et s’enfoncent dans la précarité au travers d’une pseudo-reprise qui ne crée en réalité que très peu de bons emplois.