La Chronique Agora

Fed, novlangue et assouplissement quantitatif

▪ « Le but de la novlangue », écrit George Orwell dans son roman 1984, « était non seulement de fournir un mode d’expression aux idées générales et aux habitudes mentales des dévots de l’Angsoc [le nom qu’a donné Orwell au régime en place dans 1984, NDLR.], mais de rendre impossible tout autre mode de pensée ».

Le chroniqueur William Pfaff, dont nous partageons souvent les idées, a utilisé la citation d’Orwell pour décrire comment le gouvernement des Etats-Unis en est venu à soutenir inextricablement la base de Guantanamo, qu’il compare aux goulags de la Russie stalinienne — à peine pire dans le sens où les condamnations au goulag, au moins, avaient une date de fin.

Alors que fermer la base semble être devenu politiquement impossible, « on pourrait encore dire certaines choses utiles sur cette situation », écrit Pfaff avec un espoir qui s’amenuise. C’est « de toute évidence un phénomène à caractère totalitaire, imitant, en toute connaissance de cause, la destruction du cadre judiciaire dans le système nazi par des moyens d’emprisonnement arbitraires dans des camps de concentration et par des méthodes généralisées dans la pratique de la Gestapo et des SS ; et dans la Russie stalinienne par sa police secrète et ses camps de travaux forcés ».

▪ Aussi effrayante que soit la perception qu’a Pfaff de Guantanamo, nous ne pouvons nous empêcher de penser à Orwell lorsque nous écoutons les reportages retransmis par la NPR (National Public Radio, radio nationale publique américaine) sur la publication par l’Office for National Statistics du produit intérieur brut (PIB) britannique ce matin.

Le fait est que le PIB en Grande-Bretagne est redevenu — tout juste — positif au premier trimestre 2011. Les statisticiens à Londres estiment que l’économie du Royaume-Uni a grimpé de 0,5%, rattrapant ainsi la perte de 0,5% au quatrième trimestre 2010.

Cette information a été interprétée comme catastrophique par un analyste de la City interviewé par le journal Morning Edition. Les « mesures d’austérité » mises en place par le gouvernement de Cameron continueront à « supprimer » du PIB, à moins que la Banque centrale n’ouvre les robinets monétaires pour contrer la fermeture des robinets fiscaux.

Puisque l’assouplissement quantitatif (QE, quantitative easing) en Angleterre s’élève à une pauvre somme de 121 milliards de dollars depuis la panique de 2008 — bien loin des près de 5 000 milliards de dollars mis sur la table par les Etats-Unis, l’Union européenne et le Japon — le commentateur pense que les Anglais sont condamnés.

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Lorsqu’on lui demande de conjecturer sur l’effet des « mesures d’austérité » proposées par le président des Etats-Unis pour l’économie américaine, le commentateur n’y comprend goutte. Que pourrait-il effectivement arriver si la Fed met fin à l’assouplissement quantitatif et que le Congrès propose de réellement maîtriser les dépenses ?

Diable ! Toute activité économique provient des dépenses gouvernementales ou d’un assouplissement monétaire. De nos jours, penser l’économie en d’autres termes est devenu politiquement « irresponsable »… voire « complètement fou ». Ce n’est même pas imaginable.

▪ L’analogie entre la politique étrangère et la politique monétaire serait amusante, si la tendance sociétale n’était pas si inquiétante.

« Guantanamo a été un facteur dans ce qu’il n’est pas déraisonnable d’appeler la totalitarisation de la culture politique américaine », affirme Pfaff dans son article. « Cela a été rendu possible du fait de la prohibition effective (ou diabolisation) de certaines positions politiques — ou du plaidoyer en faveur d’autres positions politiques — jugées ‘anti-patriotiques’ et par conséquent inacceptables dans le discours politique de la nation — y compris, dans certains cas, dans les discours et débats au Congrès ».

Autant il est hérétique de ne pas être d’accord avec la politique étrangère décidée derrière des portes closes par des responsables non élus, autant il est tout aussi impoli de remettre en cause la sagesse de la politique monétaire décidée derrière des portes fermées par un autre groupe d’hommes à Washington.

Nous supposons que les conférences de presse aujourd’hui prévues par la Réserve fédérale, la première d’entre elles ayant eu lieu mardi après-midi, sont destinées à ouvrir les portes fermées. Mais nous avons des doutes.

 
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