La Chronique Agora

Fed et marchés boursiers : vous n’avez encore rien vu !

▪ Il fait froid à Manhattan. Nous n’avons jamais vécu à New York — et chacune de nos précédentes visites nous a laissé de marbre. New York n’est pas très joli — du moins comparé à Paris. Le sud de Manhattan semble toujours brut, sale et mal entretenu.

Mais beaucoup de choses ont changé. New York est désormais plein d’étrangers. Dans le hall de notre hôtel, on entend un brouhaha d’accents étranges et familiers — anglais, français, russe… et nombre d’autres que nous n’avons encore jamais entendus. (Nous apportons notre petite contribution à cette cacophonie en prenant des leçons de portugais dans le salon de thé).

Un homme, dans un restaurant élégant, avait une chemise à carreaux et une grosse barbe. Il ressemblait à un bûcheron

Soho est quant à lui plein de jeunes — souvent habillés comme des campagnards ; quasiment tous les hommes ont du poil au menton. Un homme, dans un restaurant élégant, avait une chemise à carreaux et une grosse barbe. Il ressemblait à un bûcheron.

"C’est la mode", a déclaré notre fils de 26 ans.

Ici, dans le quartier de Bowery, on vit à 100 à l’heure. Il y a partout de nouvelles boutiques, des magasins de luxe et des restaurants chics. A quelques rues de là se trouve Wall Street… Et grâce en majeure partie aux autorités, une partie croissante de la richesse de la planète passe par l’industrie financière américaine.

"La nature est merveilleuse", avons-nous commencé, obscurément, un monologue adressé à Elizabeth.

"Que veux-tu dire par là ?"

"Eh bien, il ne m’était jamais venu à l’esprit que je devrais payer 10 $ pour une tasse de café et un biscuit… ou 200 $ pour un billet de théâtre… ou 500 $ pour une nuit d’hôtel… ou 1 200 $ pour ce qui ressemble de très très près à une chaise danoise des années 70.

Evidemment, je n’aurais jamais pensé non plus que les gens paieraient ‘2 et 20’ — c’est ce que demandent les hedge funds, 2% du capital et 20% des gains — pour la gestion de leur argent. Mais quand on passe assez de temps à New York, tout ça finit par sembler normal".

▪ De futurs excès à faire pâlir ceux d’aujourd’hui
Dans les beaux quartiers, des promoteurs construisent les appartements les plus chers de toute l’histoire. Selon Forbes Magazine :

"La construction de l’immeuble de 54 étages du 520 Park Avenue devrait débuter en février 2015, selon Arthur Zeckendorf, de Zeckendorf Development. Située sur la 60ème Rue, à deux blocs de Central Park, 520 Park Avenue est censé faire concurrence à un autre projet de Zeckendorf ayant rencontré un succès considérable : 15 Central Park West, désormais véritable enclave à milliardaires et l’une des adresses les plus prestigieuses de New York.

Robert A.M Stern Architects a conçu 520 Park Avenue, qui compte 31 unités. Les sept duplex de la tour, de 845m2 chacun, sont valorisés à 67 millions de dollars ; ses 23 appartements de 427m2, occupant chacun un étage et appelés ‘simplex’, commencent à 16,2 millions de dollars".

Wall Street prend l’argent de ceux qui pensent être des investisseurs intelligents. Ensuite, quelques rues plus loin, les promoteurs prennent l’argent des camelots les plus rusés de Wall Street. Lloyd Blankfein lui-même a acheté un appartement à 15 Central Park West, tout comme le gestionnaire de hedge fund milliardaire Daniel Loeb.

L’argent circule. Dès qu’on en a, on trouve des choses à faire avec. C’est rare qu’il reste immobile.

Des lecteurs se plaignent du fait que nous sommes négatif, cynique et "toujours morose". Nous nions fermement

Des lecteurs se plaignent du fait que nous sommes négatif, cynique et "toujours morose". Nous nions fermement. Nous nous sentons tout à fait guilleret et positif. Même concernant le marché boursier. Simplement, selon nous, ce n’est pas le moyen de devenir riche. Ce n’est qu’une façon de garder l’argent en circulation.

Oui, nous nous attendons à une chute de 1 000 points sur le Dow à un moment ou à un autre. Mais ce n’est pas la fin de l’histoire. Ce pourrait n’en être que le début. En fait, ce ne sera probablement même pas la fin de ce marché haussier. Le marché est manipulé. Et face à un effondrement des cours, les manipulateurs ne vont pas s’endormir. Au contraire, ils se réveilleront bien vite — et se viendront à la rescousse avec un programme de relance tout à fait vertigineux.

C’est à ce moment-là que "vous n’avez encore rien vu" sera une remarque appropriée lors des dîners en ville, des réunions de famille et des conférences d’investissement, quel qu’en soit le sujet. Ce n’est qu’une supposition, bien sûr. Mais nous sommes d’avis que — lorsqu’elles auront pris peur — les autorités se mettront au travail de manière considérablement imprudente. Les excès d’aujourd’hui sembleront modestes, rétrospectivement.

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