La Chronique Agora

A la Fed, Janet Yellen contrarie les marchés boursiers

▪ Wall Street grogne. Les roucoulements de la colombe Janet Yellen qui avaient enchanté les marchés lundi se sont transformés en cris de faucon perché sur la plus haute tour de Manhattan (à Paris, des faucons nichent sur la Tour Saint-Jacques et chassent les pigeons si nombreux dans la capitale).

Janet Yellen, qui s’exprimait ce mardi devant une commission financière du Sénat US, se dit prête à durcir sa politique monétaire si les Etats-Unis se rapprochent plus vite que prévu du plein emploi.

Toutefois, elle tempère aussitôt son propos en soulignant qu’il y a encore des millions de citoyens sans emploi — dont beaucoup, en capacité de travailler, ne sont plus inscrits sur les listes de chômeurs. De leur côté, les salaires demeurent globalement faibles (quand ils ne reculent pas), les embauches à plein temps se raréfiant à un rythme jamais vu depuis la Grande dépression.

Il en découle un risque du renforcement de l’inflation quasi-nul. La hausse des prix devrait rester contenue entre 1,5% et 1,75% d’ici fin 2014 et tendre doucement vers l’objectif des 2% en 2015.

Ce n’est donc pas l’état réel du marché du travail qui peut engendrer un risque de hausse de taux prématurée et indisposer le marché. La phrase-clé du discours de J. Yellen, c’est la référence à des niveaux de valorisation "tendus" sur les valeurs biotech ou les réseaux sociaux.

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Le Nasdaq et le Russell 2000 n’ont pas tardé à perdre 1% (au bout de deux heures de cotation) après avoir tutoyé leurs sommets historiques en tout début de séance. Les opérateurs ont cependant rapidement repris leurs esprits : Janet Yellen n’exprimait pas là un "avis personnel". Son témoignage bisannuel devant les membres du Congrès n’est qu’un exercice purement formel où elle se contente de lire une synthèse des avis de ses collègues.

Janet Yellen n’a de son vivant jamais identifié une bulle d’aucune sorte sur un marché quel qu’il soi

Janet Yellen n’a de son vivant jamais identifié une bulle d’aucune sorte sur un marché quel qu’il soit. De son point de vue, la vocation d’un actif financier, c’est de monter indéfiniment.

Tant qu’il existe un idiot assez riche pour le payer plus cher que la veille (mais moins cher que demain), il n’y a pas de raison objective permettant de qualifier une valorisation d’excessive.

La Fed déploie depuis 27 ans des efforts colossaux pour qu’il y ait toujours des "riches" capables de gonfler la valeur des T-Bonds, des actions, des maisons… et depuis quatre ans, des politiciens !

La Cour suprême des Etats-Unis a en effet rendu parfaitement légal, le 21 janvier 2010, la possibilité pour une entreprise — même étrangère –, un lobby ou un riche sponsor d’acheter — euh, pardon, de financer — un(e) candidat(e) à un poste de député, de gouverneur, de président des Etats-Unis.

Et allez comprendre comment ou pourquoi, la plupart des candidats élus ces dernières années trouvent très réjouissante la trajectoire éternellement ascendante de Wall Street et des T-Bonds US.

▪ La surévaluation comme ligne de conduite
Puisque la Fed injecte autant d’argent que nécessaire pour que les prix (un élément algébrique "objectif" et mesurable) montent sans cesse… pourquoi devrait-elle se soucier que la valeur (un élément subjectif qui échappe à la modélisation) de la transaction se désagrège inexorablement ?

Je prends donc le risque d’absoudre Janet Yellen du soupçon d’avoir rendu un avis personnel concernant une éventuelle surévaluation de certains compartiments de la cote affichant des PER compris entre 50 et 110.

Wall Street peut continuer de ramasser ce qui est cher, de s’arracher ce qui est hors de prix, de se déchainer sur ce qui défie l’entendement.

A peine Janet Yellen venait-elle de prendre congé des sénateurs que la hausse stratosphérique de GoPro reprenait de plus belle, avec une envolée de 13% à plus de 42 $ (soit une capitalisation de 6,5 milliards de dollars, ou 25 fois son chiffre d’affaire). Un analyste de JP Morgan du nom d’Alex Gauna entame la couverture du titre avec un objectif de 60 $ (soit 50% de plus que lundi soir) et ne voit aucune raison que la capitalisation de GoPro ne dépasse pas 36 fois le chiffre d’affaires 2014.

Lundi, c’est un analyste de Deutsche Bank qui évoquait sans sourciller un cours de 110 euros pour Genfit qui cotait alors… moins de 24 euros (pourquoi se contenter d’annoncer un doublement du cours quand le marché est prêt à croire qu’il peut quintupler ?).

Une récente étude menée auprès des gérants américains confirme que la communauté financière est effectivement prête à croire n’importe quoi

Une récente étude menée auprès des gérants américains confirme que la communauté financière est effectivement prête à croire n’importe quoi. Pas moins de 62% des professionnels sondés affirmaient — en même temps qu’ils voyaient les indices américains pulvériser record sur record — être déterminés à renforcer leur exposition aux actions tandis que 25% d’entre eux entendaient conserver l’intégralité de leurs positions avec des objectifs revus à la hausse sur les indices.

Cela nous fait un consensus haussier à plus de 86% : allez vous étonner, dans ces conditions,  que le S&P 500 soit attendu à  2 000 avant ce vendredi (journée des "Trois sorcières") et le Dow Jones à 20 000 d’ici la fin de l’année !

Les dossiers présentant un "upside de 10%" n’intéressent plus personne. Vu le potentiel de hausse infini des indices, à moins de 50% de plus-values à un horizon de six mois, les gérants ne lèvent plus le petit doigt.

Le mien me dit que ce sont bien là les caractéristiques techniques et psychologiques qui préfigurent un épisode correctif… majeur.

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