La Chronique Agora

Fed : le Cannonball Express de Janet Yellen, 2ème partie

dollar - dette US

Comme nous avons commencé à l’expliquer vendredi, les marchés mondiaux sont en plein tumulte depuis que la Fed a relevé les taux en décembre dernier. C’est dû au fait que la Fed a resserré sa politique dans un contexte de faiblesse économique. Si la Fed continue ce resserrement, il est probable que les Etats-Unis entrent en récession dans le courant de l’année.

La Fed a opéré ce resserrement pour des raisons qui lui sont propres. Elle voulait éviter de faire gonfler encore plus les bulles d’actifs. (Les bulles boursière et de l’immobilier ont gonflé pendant des années, avec la politique du taux zéro menée par la Fed). La Fed avait besoin de préserver sa crédibilité institutionnelle après avoir promis pendant plus d’un an qu’elle relèverait les taux en 2015.

Et tout comme Casey Jones n’a pas vu le danger avant qu’il ne soit trop tard, Janet Yellen ne voit pas de récession. Ses prévisions, qui s’appuient sur des modèles très erronés tels que la courbe de Phillips, le NAIRU (non-accelerating inflation rate of unemployment/taux de chômage n’accélérant pas l’inflation) et le système de simulation FRB/US, indiquent une croissance régulière, une tension du marché du travail et une inflation imminente.

Mais la Fed n’ignore pas totalement les récentes turbulences des marchés. Le Comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) les a évoquées dans sa déclaration de janvier dernier. Depuis, plusieurs responsables de la Fed ont [d’ailleurs] rappelé cette préoccupation dans certains discours et déclarations publiques.

La Fed n’a jamais affirmé qu’elle dévierait de sa trajectoire initiale. Si c’est ce qu’elle souhaite, elle n’aurait aucun mal à le faire

Le problème, c’est que les marchés ont mal interprété ces déclarations soi-disant accommodantes. Ce que disent les déclarations de la Fed, c’est qu’elle est attentive à ces turbulences. Mais la Fed n’a jamais affirmé qu’elle dévierait de sa trajectoire initiale. Si c’est ce qu’elle souhaite, elle n’aurait aucun mal à le faire.

Ce n’est pas parce que vous dites que vous êtes attentif à quelque chose que vous allez modifier ce que vous aviez prévu de faire. Ce que veulent dire ces récentes déclarations de la Fed, tout simplement, c’est qu’il faudrait que les conditions financières s’aggravent pour que la Fed ne relève pas les taux en mars.

Il ne faut pas prendre ses désirs pour des réalités

En interprétant que les déclarations de la Fed sont accommodantes, le marché prend ses désirs pour des réalités. En fait, cette interprétation du marché renforce plus qu’elle n’altère la probabilité que la Fed relève les taux en mars. Elle a provoqué le rally boursier enregistré au cours de ces deux dernières semaines, fondé sur cette attente qu’il n’y aurait pas de relèvement des taux. Ce rally assouplit les conditions financières et il sera donc plus facile, pour la Fed, de relever les taux.

Que faudrait-il qu’il se produise d’ici le 16 mars, pour que la Fed ne relève pas les taux ? Deux scénarios sont désormais envisageables :
– Un plongeon de l’indice S&P à 1 650 points (soit une chute de 15% par rapport à ses niveaux actuels) stopperait net la Fed.

Une crise financière généralisée, comparable à la crise asiatique de 1997 retarderait le relèvement des taux

– Enfin, une crise financière généralisée, comparable à la crise asiatique de 1997 retarderait le relèvement des taux. (La dernière fois que la Fed a fait « un petit tour et puis s’en va », c’était lors de la crise asiatique de 1997).

En ce moment, il semble peu probable que l’un de ces scénarios se matérialise. Le Cannonball Express file toujours à tombeau ouvert. Si la Fed relève les taux en mars alors que le marché ne s’y attend pas, le réajustement des cours consécutif à ce relèvement effectif provoquera un mini-krach boursier.

Le fait que la Fed relève les taux va-t-il provoquer un accident ferroviaire en pulvérisant les attentes du marché ? Cela dépend de Janet Yellen et de sa capacité à signaler aux marchés que son Cannonball Express ne compte pas s’arrêter. Casey Jones a péri en actionnant frénétiquement la sirène du train. Janet Yellen doit commencer à actionner la sirène de la Fed, afin d’avertir les marchés avant qu’il ne soit trop tard.

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