La Chronique Agora

Fed et assouplissement quantitatif : certaines choses ne changent jamais

▪ Vive James Bullard, gouverneur de la Fed ! Les actions ont tout juste commencé à décliner… le S&P 500 n’a perdu que 7,4% par rapport à son récent sommet du 18 septembre… et M. Bullard prépare déjà le QE4. Mais où est la preuve — pratique ou théorique — que l’assouplissement quantitatif fonctionne ?

Ne pourrait-on pas trouver aussi une forme de punition appropriée pour les empêcheurs de tourner en rond ?

Il est bien dommage que les philosophes de comptoir, les politiciens et les banquiers centraux ne soient pas soumis à l’amende. Après tout, les constructeurs de ponts et les gestionnaires de fonds subissent honte et ruine lorsque leurs projets s’effondrent. Ne pourrait-on pas trouver aussi une forme de punition appropriée pour les empêcheurs de tourner en rond ? De préférence avant que leurs programmes insensés soient mis en place. Par exemple : lorsqu’ils affirment une chose qui n’est pas garantie par des preuves rigoureuses, ils devraient perdre une année de revenus… ou être châtrés. Peut-être que ça les ralentirait.

Oui, cher lecteur, les choses s’arrangent à peu près comme prévu.

C’est-à-dire d’une manière qui semble cohérente du point de vue de la logique mais reste néanmoins incompréhensible.

La liquidité s’assèche. La volatilité est de retour. Les feuilles tombent. Les investisseurs deviennent nerveux. Et les gouverneurs de la Fed promettent plus de cash et de crédit — alors qu’ils n’ont ni l’un ni l’autre en réalité.

Vous vous rappellerez que les actions ont chuté quand le QE1 et le QE2 ont pris fin. Pourquoi ne chuteraient-elles pas maintenant que le QE3 s’achève ? Ce sera le cas sans aucun doute. Et tout le monde se mettra à courir dans une direction prévisible — mais absurde.

Bertrand Russell a écrit son célèbre livre en 1909. Appelé Les Problèmes de la Philosophie, il soulevait des questions sur la manière dont nous connaissons les choses, et comment prouver que ce que nous pensons savoir est vrai.

▪ Les problèmes des Problèmes de la Philosophie
Il s’avère que l’univers est bien plus complexe que nos meilleurs philosophes parviennent à le comprendre (sans parler de Bertrand Russell), que notre langage peut le décrire ou que notre logique simplette peut l’illustrer.

Vous nous dites par exemple que "tous les politiciens mentent toujours". Nous demandons : "comment le savez-vous ?"

"De source sûre", me répondez-vous. "Un sénateur me l’a dit".

Hmmm. Que savons-nous désormais ? Pas grand’chose. Le sénateur est peut-être une source sûre au sujet des canailles du Sénat — mais il est disqualifié en tant que source honnête d’opinion ou d’observation.

Quand bien même le soleil s’est levé tous les jours auparavant, a écrit Russell en substance, nous n’avons aucune raison de nous attendre à ce que le soleil se lève demain.

Là, ce pauvre Bertrand avait tort. Nous avons toutes les raisons de penser qu’il va se lever. Simplement, nous n’en sommes pas certains. C’était le problème du "cygne noir" tel qu’expliqué un siècle plus tard par Nassim Taleb.

Nous n’abordons ce sujet que pour rappeler à nos lecteurs qu’on est généralement dans la même bonne vieille ère

Peut-être qu’une fois de temps en temps, très rarement, le soleil ne se lève pas… des cygnes noirs apparaissent… et on entre dans une nouvelle ère. Mais nous n’abordons ce sujet que pour rappeler à nos lecteurs qu’on est généralement dans la même bonne vieille ère. Pour l’instant, le soleil apparaît encore à l’heure. Un baiser reste un baiser. Les marchés boursiers montent et baissent.

Voilà ce que nous tenons pour acquis. Cela a toujours été ainsi — et ça le restera.

Il y a tout de même quelque chose de très nouveau sur notre planète bleue : des banques centrales qui pensent pouvoir réussir là où les philosophes échouent. Sans autre explication, elles pensent savoir où le Dow devrait être. Jamais encore durant la longue et comique histoire de l’humanité et de son argent les banquiers n’ont été si intéressés par les prix des actifs. Ils créent désormais de l’argent — à partir de rien — expressément pour les faire grimper.

Si ces prix devaient chuter — comme ils le font naturellement de temps en temps — vous pouvez être certain qu’un benêt comme Bullard ne perdra pas une minute avant de sortir la lance à incendie.

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