En janvier dernier, l’Empire Herald indiquait « qu’un couple sous l’emprise de méthamphétamines » avait mangé un SDF dans Central Park, à New York.
Plus tard, Now8News a indiqué qu’une boîte de préparation pour cookies avait « explosé dans le vagin d’une femme ». On présume que cette femme avait commis un vol à l’étalage.
L’ambassadeur russe en Turquie a été tué par balle. L’agresseur ressemblait énormément à une version du 21e siècle de Gavrilo Pincip, qui a déclenché la Première Guerre mondiale en assassinant en Bosnie l’Archiduc François-Ferdinand, héritier du trône Austro-hongrois.
A la fin de cette guerre, 16 millions de personnes étaient mortes.
Les Huns, ces barbares
Nous écrivons une série d’articles sur les choses que les gens croient savoir mais qui ne sont pas vraies… des idées populaires qui sont fausses, idiotes, ou mal interprétées… c’est-à-dire presque toutes.
Dans la presse, dernièrement, par exemple, il y a cette idée de « fausse information ».
On suppose que certaines informations sont vraies, filtrées, approuvées et gérées par l’establishment des grands médias. Il y a de fausses nouvelles, comme ces histoires délibérément inventées, ci-dessus, concernant la préparation pour cookies et le couple sous l’emprise de méthamphétamines. Il y a également ces informations fournies par des manipulateurs russes, qui sont censées avoir coûté la Maison Blanche à Hillary Clinton.
Faire le tri entre ce qui est faux et ce qui est authentique, c’est ce que nous tentons de faire, à la Chronique. Mais nous sommes accablés.
« La vie est un long combat dans l’obscurité » disait Lucrèce
La moitié des informations sont fausses, notamment les histoires les plus sensationnelles diffusées sur les principaux médias… et les dénonciations de fausses nouvelles ! L’autre moitié est simplement erronée et/ou trompeuse.
Juste avant l’entrée des Etats-Unis dans la Première Guerre mondiale, par exemple, les Anglais ont coupé le câble fournissant aux Etats-Unis un accès direct aux informations provenant d’Allemagne. Désormais, la plupart des « informations » que pouvaient lire les Américains, concernant la guerre, passaient par l’Angleterre où elles étaient lourdement censurées.
Les Anglais ont répandu des histoires abracadabrantes sur la perfidie de l’Allemagne et les atrocités commises : notamment que des religieuses auraient été victimes de viols collectifs et que ces barbares de Huns auraient tranché les bras à des enfants. Rien n’était vrai.
Mais cela a fonctionné. En 1917, les Américains, crédules, ont précipité leurs soldats dans cette guerre… du côté des Anglais.
Quel bibliothécaire choisit les étagères ?
Les informations sont rarement ce qu’elles prétendent être. Il ne s’agit pas d’inoffensives énumérations de faits incontestables, telles qu’une liste des températures relevées au Pôle Nord.
Au contraire, la moindre bribe est documentée et influencée par un faisceau d’idées, de mythes et d’erreurs. Sinon, les informations seraient insignifiantes.
Chaque jour, des millions… non… des milliards… une foultitude de choses se produisent.
Le poète romain Lucrèce, très en avance sur son temps, décrivait la vie comme des particules entrant en collision de façon aléatoire… M. Jones dit quelque chose à M. Smith… un vent froid souffle sur les jardins publics de Duluth… un oiseau se cogne contre une fenêtre en Géorgie.
Si l’on voulait vraiment tout raconter, il y aurait une quantité infinie de matière.
Evidemment, ce n’est pas possible. Même si l’on sait ce qu’il s’est produit. Alors, on applique des normes artificielles… des « impératifs catégoriques », comme les nommait Kant. Vous tentez de comprendre le monde et ce qu’il s’y passe en étiquetant les choses et en les rangeant sur des étagères.
C’est une chose qu’un homme en tue un autre, dans le feu de la passion, dans les rue de Lagos au Nigeria. C’en est une autre qu’à Ankara, un homme abatte l’ambassadeur russe en Turquie.
Ces deux faits divers impliquent la passion. Tous deux impliquent des hommes. Ces deux histoires finissent avec un cadavre. Mais la première (Nigeria) n’est pas digne des informations. Elle va sur une autre étagère.
Ce sont les médias qui décident. Ils nous disent que quoi qu’ait dit M. Jones à M. Smith, cela ne vaut pas la peine d’être diffusé. On laisse l’histoire du vent froid à la chaîne météo. Quant à ce pauvre petit oiseau, mais bon sang qui s’en préoccupe ?
De la poudre aux yeux
Nous avons nous-même fait l’objet de certains articles, de temps à autres. A moins que l’article n’ait été que pure poudre aux yeux, destinée à flatter ou à divertir, les journalistes n’ont pas compris — ou bien ont mal interprété — les faits si bien que le lecteur en savait moins qu’avant après avoir lu l’article.
Prenons un exemple assez triste : un ex-employé s’était suicidé, bouleversé par un problème personnel. Cela s’est produit à une période où notre groupe faisait l’objet d’une enquête de la SEC. (L’affaire s’est finie en acharnement juridique… pour être ensuite rejetée par les tribunaux…)
L’ex-salarié n’avait aucun lien avec les faits allégués. Et l’infraction n’avait rien à voir avec ce dont s’occupe généralement la SEC, à savoir des délits d’initié ou des manipulations de marché. Mais les journalistes n’ont pu y résister : « Suicide chez un éditeur de Baltimore inquiété », ont-ils titré.
Le lecteur n’avait d’autre choix que d’en conclure que le pauvre bougre s’était donné la mort parce qu’il était impliqué dans une arnaque de trading qui n’avait jamais eu lieu et n’était même pas alléguée.
Dans un autre article paru dans les années 1980, nous avons été cité comme faisant partie d’un « vaste complot de droite ». Nous avions été administrateur du National Taxpayer Union (syndicat national des contribuables), tentant avec ardeur de combattre le gaspillage de l’état.
Plus tard, nous avons engagé un détective privé afin d’étudier la mort bizarre de l’avocat Vince Foster, associé d’Hillary Clinton. Et nous critiquions le gouvernement Clinton ! Le journaliste nous a relié à d’autres détracteurs de Clinton, créant une cause commune qui n’avait jamais existé.
Et à présent, le Washington Post, propriété du fondateur d’Amazon.com, Jeff Bezos, accuse un certain nombre de sites internet et de blogs de publier de fausses informations, dont certaines seraient alimentées par des agents russes !
Oui, Naked Capitalism, Truthdig, Contra Corner, CounterPunch ont été cites, de mêmes que des dizaines autres : or, ce sont tous des sites dirigés par d’anciens rédacteurs du Wall Street Journal, ex-membres du Congrès, ex-responsables sous l’Ere Reagan… de gauche, de droite, libertariens.
Plusieurs d’entre eux diffusent nos commentaires.
Et nous sommes fiers d’être parmi eux…