La Chronique Agora

Cinq ans après la faillite de Lehman Brothers, le capitalisme de connivence se porte comme un charme

▪ 15 septembre 2008, faillite de Lehman Brothers, stupeur et tremblements. Gouvernements et banques centrales se précipitent pour sauver la finance et donc l’économie. Le terme d' »économie réelle », popularisé par le philosophe altermondialiste Patrick Viveret, se répand.

Nous en déduisons donc qu’il existe une économie irréelle…

 

 

 

2008

2012

Volume des produits dérivés négociés hors cote en milliards de dollars

516 000 milliards de dollars

708 000 milliards de dollars

Endettement des pays de l’OCDE (les riches)

75%

105%

Déficit des pays de l’OCDE en% de leur PIB

3,5%

5,5%

Effet de levier des banques « trop grosses pour faire faillite »

31 pour Lehman Brothers

De 13 à 85

Bilans des banques centrales Fed et BCE (les créances pourries qu’elles ont échangées contre de l’argent surgi du néant)

900 milliards de dollars
1 400 milliards d’euros

3 000 milliards de dollars
3 000 milliards d’euros

Taux de croissance des pays de l’OCDE

0,5

-0,1

Taux de croissance mondiale

2,7

3,2

Taux de chômage des pays de l’OCDE

5,9

8

Réserves de change mondiales

4 000 milliards de dollars

11 200 milliards de dollars

Réserves de change de la Chine

1 900 milliards de dollars

3 500 milliards de dollars

 

« La question politique fondamentale sans réponse est : les relances fiscales et monétaires furent-elles un mauvais remède, ou bien furent-elles simplement administrées à trop faible dose pour être efficaces ? »
The Wall Street Journal, « Crise financière : leçon d’un sauvetage, un drame en cinq actes » (Financial Crisis : Lessons of the Rescue, A Drama in Five Acts)

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En vidéo
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▪ Que veulent vraiment dire les statistiques ?
Tous ces chiffres — ces milliards et ces pourcentages — représentent-ils l’économie réelle ou l’économie irréelle ? La seule évolution positive serait la croissance mondiale, mais on sait que dans les chiffres du PIB rentre la dette. Cette croissance est-elle donc réelle ou illusoire ?

Des technocrates omniscients et des politiciens avides de réélection tentent de réduire l’économie à une batterie de statistiques (croissance, chômage, inflation, hausse des prix…) qu’ils veulent influencer en créant plus ou moins de monnaie et en manipulant les taux d’intérêt.

Mais l’économie réelle n’est-ce pas avant tout des échanges fructueux librement consentis entre bipèdes industrieux ?

Depuis des années les pays développés importent des biens et services en provenance des pays dits émergents et exportent de la dette libellée dans leur monnaie.

Ainsi le monde s’est divisé en pays chroniquement exportateurs qui détiennent des « réserves de change » en dollars et en euros et pays chroniquement importateurs qui exportent de la dette. Les réserves de change des banquiers centraux ne sont pas des liasses de billets. Ce sont bien des titres de dettes libellées en dollars et en euros. Ces obligations souveraines représentent du pétrole, des matières premières, des biens et des services déjà consommés.

Nous avons donc d’un côté des pays émergents et des pays producteurs de pétrole. Ce côté a accumulé des créances = de l’argent en devenir si toutefois les crédits sont remboursés par leurs réputés riches clients.

Nous avons de l’autre côté des pays réputés riches. Ce côté a accumulé des dettes – une promesse de payer un jour – contre de la consommation = du pétrole déjà brûlé, des biens et services déjà consommés.

▪ A qui profite le système ?
Depuis 2008, le système s’est emballé. Mais dans ces échanges qui s’est enrichi ? Qui est le plus prospère ? Celui qui doit de l’argent, le débiteur ou au contraire celui à qui on en doit, le créancier ?

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Personne ne peut dire à qui ce système profite. Le débiteur a consommé mais le créancier verra-t-il son argent ? Seul l’avenir nous le dira, lorsque la dette sera apurée, si elle l’est.

La cause profonde de cette crise n’est pas à chercher dans des taux d’intérêt inadaptés ou une question de masse monétaire. Nous pensons que la cause profonde de cette crise est la « monnaie-dette » manipulée par les banques centrales.

Si toutes les transactions passées avaient été effectuées avec de la « monnaie-marchandise », la réponse à ma question « qui est riche ? » serait simplissime. Ce serait sans hésitation celui qui détient la « monnaie-marchandise » car il aurait un stock de quelque chose qu’il serait certain de pouvoir utiliser un jour. Inversement, les pays de l’OCDE auraient eu à se préoccuper de se procurer de la « monnaie-marchandise » nécessaire aux échanges et pour cela se livrer à une activité véritablement productive.

Mais qu’est-ce qu’une « monnaie-marchandise », vous demandez-vous ? L’or, l’argent, l’ambre, l’huile de baleine, le sel, choisissez… Tout ce qui possède une valeur intrinsèque et est facilement reconnaissable, fractionnable et échangeable. Les gens se sont assez souvent mis d’accord sur l’or et l’argent plutôt que le jus de bison ou le gras de baleine.

Inversement, vous avez remarqué que la « monnaie-dette » doit avoir « cours légal ». On vous force à accepter un bout de papier avec une marque d’un Etat dans un périmètre donné.

Hélas pour nous, la « monnaie-marchandise » ne convient pas à un système capitaliste dévoyé, un capitalisme de copinage, de connivence, de manipulation ou d’Etat. La « monnaie-marchandise » pourrait appartenir à tout le monde, serait trop démocratique, pas facilement manipulable pour le plus grand profit des politiques qui promettent la lune, des gouvernements dispendieux et de leurs banquiers affairistes. Le capitalisme de connivence, des lobbyistes ou le capitalisme d’Etat ne peut fonctionner qu’avec de la « monnaie-dette ».

Revenons donc à notre triste sort. Le pays qui a le plus à perdre avec l’aggravation de la crise est évidemment la Chine avec ses 3 500 milliards de dollars de réserves de change au 30 juin 2013. Ce n’est jamais plaisant de savoir qu’on s’est fait rouler pour une grande puissance armée.

Au dernier G20, la Chine a lancé l’idée d’un fonds de réserve monétaire commun aux BRIC, pendant que les lobbyistes va-t-en-guerre contre la Syrie s’affairaient en espérant plus de déficits et de « monnaie-dette » pour faire tourner des usines d’armement et l’industrie bancaire. Brésil, Russie, Inde et Chine parlaient de 100 milliards de dollars, un petit fonds. Serait-ce le début d’un autre système ?

La crise est loin d’être finie et son dernier volet sera monétaire : à vous de vous préparer.

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