La Chronique Agora

Une faille dans le système centralisé Visa

Visa

La récente panne qui a affecté le réseau Visa permet de mesurer l’intérêt de conserver les espèces et les avantages des cryptomonnaies.

Vendredi 1er juin, le leader mondial des services de paiements Visa (V-Nyse), a connu une panne informatique d’ampleur qui a frappé principalement le Royaume-Uni et plusieurs pays de l’Union européenne.

Nombreuses sont les personnes qui garderont un souvenir amer de cette expérience à l’allure quelque peu apocalyptique.

En effet, pendant près de six heures, des millions d’utilisateurs ne purent effectuer le moindre paiement avec leur carte de paiement Visa.

Le contexte de cette « interruption de service »

Le slogan de Visa « Everywhere you want to be » – « où que vous soyez », perd tout son sens. La panne est survenue semble-t-il vers 14h30 heure de Londres. 2h30 plus tard, le phénomène devient critique : à une heure où de nombreux salariés sortent du travail, empruntent les transports, vont faire des courses ou boire une bonne bière fraîche.

L’expérience prend ensuite une tournure franchement désagréable. Dans les magasins, des lignes de clients s’allongent aux caisses. Les employés ne savent plus comment gérer la situation.

On imagine aussi fort bien l’état du trafic routier lorsqu’il est impossible de payer son péage. Pour certains commerçants, la perte de chiffre d’affaires sera sèche.

En somme, pendant ces six heures, « où que vous soyez », vous ne pouvez plus payer !

Pour l’anecdote, une députée britannique, Angela Rayner, a reconnu avoir quitté une station d’essence sans payer. Peu de risques qu’elle reçoive une amende pour filouterie de carburant.

C’est la première fois que je pars sans payer mon essence. Heureusement que le garage du coin me connaît.

Pour comprendre l’ampleur du phénomène, il faut savoir que Visa Europe prend en charge 1 € sur 5,70 € dépensés dans la Zone euro.

Au Royaume-Uni, le ratio est plus important : c’est 1 £ sur 3 £ dépensées.

Nous avons tellement pris l’habitude d’utiliser les systèmes de paiements comme Visa ou Mastercard que nous ne réalisons même plus notre dépendance vis-à-vis de ces technologies de paiements quasi-instantanés.

Le leader mondial de la prestation de services de paiement peut se targuer d’être présent dans 200 pays, avec à son actif plus de 38 millions de points d’acceptation.

Mais imaginez seulement une défaillance informatique généralisée du système Visa dans l’ensemble de ces pays ? Pendant une, deux, trois journées ?! Et si conjointement, Mastercard rencontrait un problème équivalent ?

Le besoin d’alternatives est crucial.

L’Europe peut-elle vraiment se passer du cash ?

N’en déplaise aux tenants de la société sans cash, qui vantent l’aspect pratique de tout payer par carte ou mobile, dans ce genre de situation c’est la monnaie sonnante et trébuchante qui est la meilleure alternative, à condition bien sûr que les commerçants l’acceptent encore.

Avec le plantage de Visa, ça n’a pas raté. Des masses ont commencé à s’agglutiner en file derrière les distributeurs automatiques de billets (qui eux, fonctionnaient bien) pour espérer retirer un maximum d’argent. Par précaution bien sûr, car nul ne pouvait savoir quand le système serait rétabli, mais aussi pour pouvoir payer leurs transactions alors suspendues.

Si les espèces restent encore principalement utilisées pour tout ce qui est des paiements courant dans certains pays d’Europe (80% en Allemagne, 68% en France), leur digitalisation progresse à grand pas. La Suède en est l’exemple le plus criant : moins de 15% de la population seulement aurait encore recours au cash.

Payer en argent liquide est un souffle de liberté en comparaison du paiement par carte bancaire qui, lui, peut être tracé en permanence par des « tiers de confiance ».

Pour les aficionados des cryptomonnaies, dont je fais partie, cette mauvaise publicité pour Visa est aussi une aubaine pour souligner l’attrait d’un système de paiement décentralisé.

Et si les cryptomonnaies étaient la solution ?

« Notre objectif est de s’assurer que tous les paiements Visa fonctionnent 24 heures par jour, 365 jours par an. Nous avons échoué à parvenir à cet objectif aujourd’hui et nous nous excusons auprès de tous nos partenaires et des titulaires de comptes Visa, du désagrément qui a pu en résulter. »

A ce mea culpa d’Alfred F. Kelly, Directeur Général de Visa, la réponse n’a pas tardé :

Aujourd’hui, le réseau Visa tombe en panne. Bitcoin n’est jamais tombé en panne.

Depuis janvier 2009, le bitcoin fonctionne effectivement 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, sans avoir connu la moindre interruption.

Bitcoin ne peut encore rivaliser en tant que système de paiement, du moins pour les micros-paiements de masse.

Visa traiterait en effet plus de 150 millions de transactions quotidiennes et environs 1 600 transactions par secondes, en moyenne, dans le monde.

Cette performance a un coût. Les consommateurs, pour peu qu’ils soient relativement sédentaires, ignorent pour la plupart tous les frais cachés qu’implique l’utilisation d’une carte de paiement.

Ces frais, les commerçants, eux, ne sont pas près de les ignorer car ils grignotent leurs marges. S’équiper de terminaux dédiés n’a rien de gratuit, aussi doivent-ils s’acquitter d’un abonnement mensuel auprès de leur banque pour en assurer le fonctionnement.

Pour revenir au bitcoin, le Lightning Network, qui, « en gros », va permettre d’améliorer les performances du bitcoin et notamment sa « lenteur », est actuellement en phase de développement. En théorie, il offrira la possibilité d’effectuer d’innombrables micros transactions instantanées, avec un coût infime, en dehors de la chaîne principale du bitcoin.

La plus célèbre des cryptos a un atout : elle fonctionne aussi de manière totalement décentralisée, grâce à son réseau distribué dans le monde entier (P2P). Le Bitcoin ignore les frontières.

Autre illustration : lors de l’épisode Visa de vendredi dernier, des clients ont révélé avoir été débités plusieurs fois des montants qu’ils désiraient payer au moment de passer en caisse. Le bitcoin de son côté a été conçu pour rendre impossible ces cas de doubles dépenses.

Pour devenir des alternatives viables aux systèmes de payements les plus répandus dans le monde actuellement, les cryptomonnaies se doivent d’être au maximum décentralisées, sécurisées, tout en octroyant à leurs utilisateurs des paiements anonymes, instantanés et à des prix quasi nuls.

Enfin et surtout, elles nécessitent une adoption massive tant par les consommateurs que par les commerçants. Ceci n’est qu’une question de temps !

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