La Chronique Agora

Réflexion d’un exilé fiscal

richesse

▪ Un petit avertissement concernant notre chronique de ce jour — qui sera composée de deux parties. Les opinions exprimées ici ne reflètent pas forcément celles des Publications Agora. En fait, elles ne reflètent peut-être même pas celles de leur auteur. Parfois dans le vrai, parfois dans le faux, toujours dans le doute — nous essayons des idées comme un homme essaie un pantalon. Nous aimons voir de quoi nous avons l’air avant d’acheter. Et nous vous laissons décider par vous-même laquelle des idées suivantes semble la plus ridicule.

Il faut savoir que nous sommes un exilé volontaire… un réfugié… un errant.

Non parce que nous voulons l’être — mais parce que nous sommes victime de notre propre bonne fortune.

Alors que nous regardions la météo, nous nous sommes rendu compte qu’il faisait récemment
 -17°C aux environs de Baltimore. Comme nous aimerions être dans notre ferme du Maryland… devant un bon feu qui pétille, la neige s’accumulant dehors… un stère de petit bois à l’abri dans la grange… et, à la cave, une généreuse réserve de Malbec de 10 ans d’âge.

Hélas, il n’en est pas question. A cause de notre succès, nous devons aller de place en place… et de rendez-vous en rendez-vous. Toujours bien loin de notre Baltimore bien-aimé.

Comme tout le reste, la richesse semble obéir à la règle du déclin de l’utilité marginale

Nous avons été riche ; nous avons été pauvre. La richesse est surestimée. La pauvreté aussi. Dans les deux cas, il n’y a pas de quoi se vanter. Dans notre chronique d’aujourd’hui, cependant, nous nous plaignons des mauvais côté de la richesse. Comme tout le reste, la richesse semble obéir à la règle du déclin de l’utilité marginale. Un peu, c’est bien. Beaucoup ? Eh bien… c’est là que les ennuis commencent.

La cause de ce sermon est la suivante : trois de nos amis ont récemment annoncé qu’ils s’installaient à Porto Rico :

"Ce n’est pas très joli", a déclaré l’un d’entre eux. "Les riches vivent dans des complexes immobiliers sécurisés, où ils sont protégés des autochtones. Nous n’apprécions guère. On se croirait dans une prison de luxe, avec d’autres riches".

"En plus, ce ne sont pas des gens très agréables à fréquenter. Les hommes sont pendus à leur smartphone. Les femmes passent leur temps chez le coiffeur. Sincèrement, mieux vaudrait vivre avec les cinglés que nous connaissons en Californie".

"Eh bien, pourquoi déménager, alors ?"

"Pas le choix. Avec le système fiscal de Porto Rico, nos impôts sont réduits d’environ 90%. On ne peut plus se permettre de rester en Californie".

▪ A quoi bon être riche… si l’on ne peut pas faire ce qu’on veut ?
Un homme riche vit là où il le doit. Fréquemment, il se voit contraint de devenir réfugié — un nomade chassé de son foyer par l’inspecteur des impôts.

"Pourquoi ne pas simplement payer les impôts ?" avons-nous demandé. "A quoi sert l’argent s’il ne permet pas de vivre là où l’on veut ?"

"On aimerait bien. Mais nous perdrions tout respect de nous-mêmes… et toute crédibilité aux yeux de notre conseiller fiscal. Nous l’avons payé très cher pour imaginer ce plan. De toute façon, il y a un prix pour tout. Nous aimons la Californie — mais pas à ce point".

Ah, tel est bien le problème. On peut être tout à fait prêt à payer 10 000 $ pour le plaisir de vivre en Californie. Mais 50 000 $… voire 500 000 $ ?

Les choses réelles ont une valeur qui n’a pas forcément de relation avec ce que l’on gagne

En tant que pourcentage des revenus, ça peut être la même chose pour un riche que pour un pauvre. Mais les choses réelles ont une valeur qui n’a pas forcément de relation avec ce que l’on gagne. Un homme peut s’acheter un costume Brioni à 1 200 $ — dépensant 5% de son revenu disponible pour l’acheter. Supposez qu’un millionnaire doive payer le même pourcentage — ou 500 000 $ pour les mêmes vêtements ?

"Joli", dira-t-il peut-être, "mais pour 50 000 $ ? Non merci".

De même, il peut aimer les hamburgers. Mais si le gouvernement le forçait à payer son burger 100 $, il deviendrait peut-être végétarien.

Porto Rico est l’alternative à un hamburger à 100 $. Ce n’est pas la seule. Les classes moyennes elles-mêmes choisissent de s’installer dans des endroits où les impôts sont moins élevés. Chaque année, des milliers d’Américains déménagent de New York ou du Connecticut, par exemple, pour aller en Floride ou dans le Nevada. Et là, ils vivent exilés, loin de leurs amis, de leur famille, de leur entreprise, de leurs bars favoris. Pourquoi ? Ils ont économisé environ 10% de leur fardeau fiscal !

Nous voulons vivre à Baltimore. Mais nous ne savons pas combien de temps encore nous pourrons nous le permettre. Pour notre maison dans le quartier de Mount Vernon, la taxe foncière annuelle vaut plus que le prix entier de notre première propriété à Baltimore (dans un autre quartier, il est vrai) — alors que les maisons sont à peu près équivalentes ! Ajoutez les impôts locaux… la "taxe millionnaire" spécifique au Maryland… et ça revient à manger des burgers à 100 $ tous les jours. Ce n’est pas qu’une question d’argent, par ailleurs. Simplement, nous n’aimons pas être pris pour un pigeon.

A suivre…

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