▪ Finalement, qu’y a-t-il dans l’euro ? Des piscines grecques déguisées en réserves d’eau et des immeubles espagnols sans habitants. Un ancien Tigre celtique dont le rugissement s’est converti en miaulement de matou enroué et un Hexagone qui fait penser au refrain de la chanson de Renaud (« être né sous l’signe de l’Hexagone, c’est pas c’qu’on fait d’mieux en c’moment »). Une péninsule aux mains d’un obsédé qui ferait passer DSK pour un petit chanteur à la croix de bois et des Allemands qui se regardent dans leur plus grand hebdomadaire — j’ai nommé Der Spiegel (Le Miroir) — et voient en couverture la photo d’un euro défunt sur un cercueil grec…
Et si on remplaçait ce cocktail détonant (qui, d’ailleurs, a sacrément détoné) par ce qu’il y a de plus solide et de plus durable sur cette planète ? Par une matière qui ne permet pas seulement de stocker de la valeur : une matière qui, littéralement, EST la valeur. Je parle, bien sûr, de l’or.
▪ L’or EST valeur
Ce qui importe vraiment dans une monnaie c’est sa solidité, bien plus que la quantité que l’on en détient. Certains économistes militent pour un retour à un système monétaire international basé sur le métal jaune. Ce serait, selon eux, la seule façon de sauver la devise européenne d’une débandade fatale. Et, au passage, cela permettrait de guérir d’autres monnaies à la dérive.
Le plus intéressant parmi ces économistes n’est pas un obscur vendeur de chaussettes de Wall Street mais plutôt Robert Mundell, prix Nobel d’économie et auteur de l’hypothèse Mundell-Laffer, qui a placé des impôts bas et un dollar fort au coeur de la politique américaine des années Reagan.
Invité de Bloomberg TV, le professeur Mundell a récemment décrit les bénéfices d’un éventuel retour à un système monétaire dans lequel la valeur des monnaies serait exprimée en or. « Le grand avantage est lié au fait que l’or n’est une dette pour personne », a-t-il avancé.
Contrairement à la monnaie de référence actuelle, le dollar, qui est une dette pour le gouvernement américain, certes une dette sans échéance mais tout de même une dette.
▪ Plus la masse de dollars en circulation augmente et plus cette dette gonfle
Cela serait précisément impossible avec un système fondé sur l’or, car le métal jaune ne peut pas être imprimé ou, du moins, pas encore.
Adieu, donc, Bernanke l’acharné de la planche à billets et le boomerang inflationniste qui ne tardera pas à revenir en pleine figure des adeptes de l’impression de billets. Mundell imagine un système selon lequel le dollar et l’euro seraient, dans un premier temps, arrimés à l’or, avant d’être rejoints par le yen, le yuan et la livre sterling. Les principales monnaies du globe seraient donc liées entre elles par l’intermédiaire du métal jaune.
Les partisans d’un tel système se trouvent également dans les pays émergents, comme l’ancien gouverneur adjoint de la Banque centrale indienne ou Zhou Qiren, doyen de l’université de Pékin et membre du comité de politique monétaire de la Banque populaire de Chine. Selon ce dernier, un système monétaire qui repose sur l’or protégerait le monde des folies du type QE2, QE3… QE50 (au rythme qu’a adopté Bernanke, il risque de faire mieux que Rocky, qui, pour l’instant, n’en est qu’au numéro 6), qui permettent à la Fed de racheter de la dette à long terme du gouvernement américain.
▪ Pour imprimer de la monnaie, la Réserve fédérale devrait auparavant acquérir de grandes quantités d’or
Ceci afin d’adosser cette création de papier-monnaie à de la vraie valeur, et non pas à rien, comme c’est le cas actuellement.
Si elle ne le faisait pas, les autres pays détenteurs de billets verts pourraient lui demander de changer leurs dollars en or. Ils verraient alors dans quelle mesure l’Oncle Sam peut tenir sa promesse d’échanger à tout moment ses dollars contre de l’or. C’est ce que prévoyait le système de Bretton Woods, en place entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et 1971, quand la dette américaine — gonflée notamment par l’intervention au Vietnam — poussa Nixon à mettre fin à la convertibilité du billet vert en métal jaune.
Ce système mettrait également fin aux guerres des monnaies, par lesquelles les gouvernements en difficulté laissent filer leur monnaie et repassent ainsi leurs difficultés aux autres pays.
▪ Définir l’euro par rapport à l’or lui assurerait une valeur élevée et stable
Comme le résume Steve Forbes, qui conseille actuellement les possibles candidats républicains à la présidentielle de 2012, « le débat devrait servir à trouver le meilleur système basé sur l’or, et non à nous demander si nous devons ou non retourner vers l’or ». Cette solution retirerait probablement une sacrée épine des pieds d’Angela Merkel et de Nicolas Sarkozy.
John Tamny, rédacteur en chef de Forbes, explique comment définir l’euro par rapport à l’or lui assurerait une valeur élevée et stable. Deux qualités qui font qu’une devise est très demandée pour le commerce international ; deux qualités qui permettraient à l’euro de rapidement supplanter le dollar en tant que monnaie de référence.
Les sceptiques diront que, avec un euro basé sur l’or, des pays comme la Grèce ne pourraient plus honorer leurs dettes et devraient rapidement sortir de la Zone euro, sauf que leurs problèmes découlent surtout de la faiblesse de leurs rentrées fiscales, elles-mêmes liées à une croissance anémique.
Or quoi de mieux, pour attirer les investissements étrangers, pour investir et créer des emplois, qu’une monnaie forte et stable ?
Première parution dans l’Edito Matières Premières & Devises du 24/08/2011.