La Chronique Agora

Les Etats-Unis, ambitions galactiques et naufrage politique

Entre les promesses de « Trump II », les ambitions d’Elon Musk et les querelles partisanes, l’empire américain semble s’accélérer vers une dégénérescence inévitable.

Nous sommes revenus d’une Irlande enneigée, et avons retrouvé un Maryland couvert de neige.

Ce matin, nous nous sommes assis près du feu et avons décidé de mettre notre analyse rigoureuse habituelle sur pause, afin de faire quelques suppositions.

Comme nous l’avons indiqué la semaine dernière, le groupe Musk/Ramaswamy a déjà admis qu’il ne serait pas vraiment en mesure de combler le déficit. Pas même de moitié. Mais il a suffi de quelques calculs pour s’en apercevoir, et non de suppositions. Il faudrait tailler sévèrement dans le muscle du Pentagone et dans les entrailles des dépenses sociales (Sécurité sociale, Medicare, Medicaid) pour faire une grande différence.

Ils ne le feront pas, car ce sont les politiciens qui sont aux commandes, et non les personnes chargées de l’efficacité du gouvernement. Et la caste politique obtient le pouvoir en dépensant l’argent, non pas en l’économisant. Il était donc inévitable que Musk finisse par être en désaccord avec les partisans du MAGA.

Steve Bannon s’est penché sur la question au cours du week-end. Le New York Post rapporte : 

« Quelques jours après s’être extasié sur ce que le magnat de la technologie Elon Musk pourrait faire pour le mouvement MAGA, Steve Bannon s’est déchaîné sur l’homme le plus riche du monde et a juré de limiter son influence sur la Maison-Blanche. M. Bannon, 71 ans, qui anime le podcast ‘War Room’ et a un penchant pour l’organisation de guerres politiques à couteaux tirés, a suggéré que M. Musk ‘devrait retourner en Afrique du Sud’ et a dénoncé sa position sur les visas H1-B. Il a également déclaré que ‘le gouvernement ne peut pas se contenter d’être le seul à avoir des visas’. » 

Notre hypothèse, un peu plus hasardeuse, est que le phénomène Trump ne marque pas une véritable rupture avec le passé, mais simplement une accélération du rythme de la dégénérescence de l’empire américain. Plus de dépenses. Plus de dettes. Plus de corruption flagrante. Plus d’ingérences à l’étranger. Plus d’inflation. Et ainsi de suite.

La presse brouille les pistes. Elle affirme que Trump représente « l’extrême droite », par opposition aux « libéraux éclairés ». Dans l’esprit de beaucoup, la victoire de Donald Trump représente une toute nouvelle chose, une nouvelle ère dans la politique américaine.

Et c’est le cas à certains égards. Mais pas les plus importants.

Peut-être moins en pratique qu’en théorie, la politique traditionnelle des partis opposait les progressistes aux conservateurs. Les améliorateurs du monde – un rôle joué par les démocrates – voulaient utiliser le bras fort du gouvernement fédéral pour construire un monde meilleur. Dépenser, dépenser, dépenser pour de meilleures écoles, pour l’aide sociale, pour rendre le monde sûr pour accueillir la démocratie, pour sauver la planète… etc. Le rôle joué par les républicains conservateurs était avunculaire : ils traînaient les pieds pour les ralentir et utilisaient la Constitution pour imposer des restrictions.

Mais au fil du temps, les vieux oncles républicains ont compris qu’ils pouvaient utiliser l’argent « gratuit » du gouvernement pour acheter des voix et accéder au pouvoir.

Aujourd’hui, y a-t-il une différence d’un centime entre les deux partis ?

Tous deux dépensent des milliards qu’ils n’ont pas, sachant que cela entraînera une hausse des prix pour leurs propres électeurs. Tous deux ont approuvé l’invasion de l’Irak et l’attaque de la Libye, ainsi que les bombes et l’argent qui sont envoyés en Ukraine et en Israël (dont une grande partie revient à l’industrie américaine de la puissance de feu, où une partie est ensuite dépensée pour garantir davantage de dépenses).

Leur désaccord ne porte pas sur la direction du navire, mais sur la couleur de la moquette et sur le vin servi à la table du capitaine. Comme des couples mariés, ils se disputent au sujet des détails et esquivent souvent les vraies différences. Mais peu importe la chanson que les musiciens jouaient sur le pont, lorsque l’eau glacée s’est engouffrée dans les couloirs du navire, le Titanic était condamné.

Bush, Obama, « Trump I », Biden… Aucun ne s’est éloigné du cap du Grand Empire. Et maintenant, « Trump II » promet une expansion encore plus glorieuse – vers le Groenland, le Mexique, le Canada… et peut-être en s’associant avec M. Musk, vers les étoiles !

Nous sommes des passagers sur ce navire, que nous le voulions ou non. Où finirons-nous ? A l’est, à l’ouest, au sud ou au nord ? La meilleure hypothèse est qu’il finira par couler.

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