La Chronique Agora

Emploi US : les nouvelles sont-elles aussi bonnes qu'elles le semblent ?

▪ Les nouvelles de l’emploi américain, la semaine dernière, étaient nettement plus agréables qu’un coup de tison dans l’oeil. Mais agréables à quel point ? Assez pour justifier une hausse des cours à Wall Street ? Assez pour vendre votre or parce que vous êtes convaincu que tout ira bien à partir de maintenant ?

Euh… nous le déconseillons.

Peut-être que les investisseurs ont été induits en erreur — une fois encore — par Wall Street et les autorités. Répandez assez d’argent brûlant et il semblera qu’une véritable reprise est en cours. Les employeurs — tout comme les consommateurs — sont dupés. Les chefs d’entreprise, par exemple, pensent probablement que la récession est terminée et mettent fin aux licenciements.

Il est plus probable que l’annonce selon laquelle le chômage a touché un plus bas est bidon. Une hirondelle ne fait pas le printemps. Pas plus qu’un mois de statistiques de l’emploi nous en dit beaucoup sur la tendance sous-jacente.

Les taux de chômage… comme les autres chiffres financiers… grimpent et baissent. Un mois ne signifie pas grand-chose. Nous devrons attendre de voir ce qui se passe ensuite, comme tout le monde. Mais il y a probablement un million de suppressions de postes — ou plus — à venir avant qu’on atteigne vraiment le plancher.

N’en veuillez pas aux chefs d’entreprise s’ils sont un peu embrouillés. La presse semble dire que tout est revenu à la normale. Et en ce qui concerne le secteur bancaire, on dirait effectivement que rien n’a changé. Les banquiers acceptent de prêter de l’argent pour des accords de private equity parfaitement crétins… ils aident et encouragent les spéculateurs dans leur carry trade… et distribuent des milliards de dollars de bonus. Comme dans le bon vieux temps.

Ils profitent de la félicité d’un esprit sans tache… c’est-à-dire un esprit qui n’a aucune mémoire… aucuns regrets… et aucun sens commun.

▪ Mais quelque chose a changé. Ce n’est plus le même monde. Nous ne savons pas grand-chose, à la Chronique Agora. Mais nous savons ceci : il n’y a aucune chance de voir l’économie actuelle revenir à ce qu’elle était avant 2007. Un retour à la normale ? Pas du tout.

La bulle de la période pré-2007 a été gonflée par les dépenses de consommation, elles-mêmes financées par la dette de l’immobilier. Il n’y a aucun moyen que ce schéma se reproduise dans les temps qui viennent. L’immobilier américain s’est peut-être stabilisé — ou pas — à 30% sous les prix pré-krach. Cela laisse des millions de propriétaires sous l’eau… et quasiment tous les propriétaires sans accès au crédit immobilier.

Dans l’économie réelle, là où les gens vivent, le tableau est sombre. Pour commencer, une personne sur dix est officiellement au chômage. 600 000 emplois ont été perdus au cours des trois derniers mois aux Etats-Unis, portant le total à 7,2 millions de pertes depuis le début de la récession. Et si l’on y ajoute tous les travailleurs à temps partiel… et les travailleurs qui ont abandonné la recherche d’emploi… le total atteindrait une personne sur cinq parmi toute la main d’oeuvre.

A présent, posez-vous une question : comment les choses peuvent-elles revenir à la normale alors que tant de personnes sont sans emploi ?

Sans oublier que bon nombre de ces emplois ne reviendront jamais. Beaucoup d’entre eux étaient liés à l’immobilier. Et l’immobilier ne reviendra jamais au rythme de bulle de 2005-2007. Pas de notre vivant. Par ailleurs, bon nombre des emplois de services et de commerce qui existaient grâce aux revenus du secteur immobilier ont disparu eux aussi. Ils ne reviendront pas non plus… du moins pas avant l’arrivée d’une chose permettant de remplacer les revenus immobiliers.

Ce qui finira bien par se produire… mais pas avant de nombreuses années.

En attendant, nous sommes dans une dépression économique… et nous y resterons, jusqu’à ce que ces erreurs et déséquilibres soient rétablis.

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