La Chronique Agora

L’emploi US dope Wall Street

▪ New York ressort de sa paralysie — au propre comme au figuré. Les transports publics ont repris leur activité : trains, bus et métro circulent à nouveau dans Manhattan… et l’argent semble lui aussi mieux circuler après une séance de complète stagnation. Les indices américains avaient clôturé mercredi soir, pour la quatrième séance consécutive, sans la moindre tendance identifiable.

Jeudi, les marchés américains sont repartis de l’avant : +1% en moyenne. Ce n’était pas gagné d’avance, toutefois, car les « précurseurs » (contrats sur le S&P échéance novembre) semblaient tout aussi hésitants que la veille à trois heures de la reprise des cotations.

Mais qu’est-ce qui pouvait bien susciter le réveil des amateurs de stratégies directionnelles ?

Eh bien, il semblerait que ce soit le nombre exceptionnel d’interventions des pompiers pour cause d’inondation dans New York et sa grande banlieue, ainsi que le nombre de résidences secondaires détruites sur le littoral entre la Caroline du Nord et le Connecticut.

De 10 à 20 milliards de dollars initialement, les dégâts occasionnés par le passage du cyclone Sandy sont désormais estimés à 50 milliards — et le coût en est révisé à la hausse tous les jours.

Des économistes tablent ainsi sur un bon coup de pouce à la croissance des Etats-Unis du fait des travaux de réparation et de reconstruction qui vont être engagés. C’est exactement le même raisonnement qui nous avait été tenu après le raz-de-marée de la mi-mars 2011 au Japon.

▪ Un raisonnement plein de trous
Sauf que le Japon n’a pas encore entrepris de nettoyer les stigmates du tsunami qui avait dévasté une centaine de kilomètres de côtes au nord de Tokyo. D’une part parce que l’explosion de la centrale de Fukushima a rendu une vaste portion du territoire radioactive pour les 10 000 prochaines années, d’autre part parce que l’argent manque pour évacuer et trier une quantité de débris qui se chiffre en dizaines de millions de tonnes.

L’inondation de la Nouvelle-Orléans en 2005 n’a pas non plus dopé l’activité économique de la région. Au contraire, elle l’a profondément désorganisée ; beaucoup d’habitants ont déserté la ville définitivement.

La consolidation des digues du Lac Champlain vient tout juste d’être achevée, sept ans après les événements. Des milliers de maisons détruites attendent toujours le coup de bulldozer qui fera disparaître ce témoignage du mépris de l’administration Bush pour la sécurité des citoyens américains en dehors des simulacres inquisitoriaux et humiliants qui leur sont imposés dans les aéroports.

Katrina avait fait plus de 2 000 victimes mais les dégâts directs (le coût matériel… car les millions d’heures de travail perdu, c’est autre chose) avaient été estimés à 50 milliards de dollars. C’est exactement le même chiffrage qui est avancé pour Sandy : le PIB américain n’y avait pas gagné grand-chose fin 2005 ni début 2006… En sera-t-il autrement fin 2012 ?

Tout ce que nous savons de façon certaine, c’est que le marathon de New York prévu ce week-end aura bien lieu… et que des milliers d’habitants de la région ont déjà commencé à courir après leur assureur (lesquels vont devoir recruter massivement des experts pour faire face à la demande).

▪ Surprise sur l’emploi
En ce qui concerne les chiffres de l’emploi américain publiés ce jeudi, le cabinet ADP en a recensé +158 000 dans le secteur privé en octobre. La véritable surprise, toutefois, c’est que l’estimation de septembre a été divisée pratiquement par deux, de 162 000 à 88 000, suite à un « changement de mode de calcul ».

A l’époque, ADP avait alimenté les spéculations sur une reprise des embauches dans le secteur privé, contribuant à un regain de confiance des économistes… et, ce n’est pas négligeable, des électeurs.

Ces derniers seront peu nombreux à être avertis de la révision du mois précédent. Ne subsistera que l’image mentale de 162 000 puis 158 000 nouveaux emplois, ce qui rassure tout le monde.

D’autres chiffres étaient très attendus par les marchés : l’activité manufacturière (ISM) a progressé comme prévu vers 51,7 (contre 51,5). L’indice de confiance des consommateurs américains, du Conference Board, a grimpé de 68,4 vers 72,2 en octobre — un chiffre conforme aux attentes. Ce sont de bonnes statistiques… mais pas de quoi envisager un boom de l’activité au quatrième trimestre 2012.

▪ Du côté du CAC 40
C’est pourtant ce à quoi les investisseurs veulent se remettre à croire : après un repli de 0,9% la veille, le CAC 40 a repris 1,35% pour revenir flirter avec les 3 484 points (son zénith de la veille), avant d’en terminer à 3 475 points.

L’indice réalise ainsi sa meilleure entame de mois de novembre depuis 2003 mais dans des volumes d’échanges véritablement anecdotiques : deux milliards d’euros seulement.

Un bel algorithme haussier a été enclenché dès la première heure de cotation jeudi matin. Les indices se sont mis à progresser au sein d’un corridor haussier avec une régularité de métronome, à raison de 10 points d’indice par heure, jusqu’à la publication des premières statistiques américaines… Ainsi, la semaine boursière redevient positive de 1,2%, malgré l’imbroglio autour du dossier grec.

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