▪ Les médias ont deux points de vue sur les violences qui se sont déroulées à Baltimore ces derniers jours — faux dans les deux cas. Selon le premier, c’est "la société" qui était en tort. Le président Obama a adopté cette ligne lorsqu’il a parlé des incidents, déclarant — en mots devenus lisses à force d’avoir été trop utilisés — qu’il faut plus d’éducation, plus d’emplois, plus d’opportunités et ainsi de suite.
Pour l’autre grand point de vue, la faute en incombait aux zombies eux-mêmes ; une opinion qui manque de profondeur et de perspective. Cela revient à arrêter un pauvre junkie tout en acceptant un pot-de-vin de la part du dealer pour regarder ailleurs.
Qui plus est, le Congrès US inflige chaque jour plus de dommages à la propriété que tous les hooligans à deux sous en un an. Quant aux maires et aux conseillers municipaux de Baltimore, ils ont fait bien plus pour détruire la ville que les mères célibataires et les bébés nés sous influence.
Les zombies ne naissent pas de nulle part. Ils sont payés pour être des zombies — par les mêmes politiciens, bureaucrates, associations "non-lucratives", bonnes âmes, fonctionnaires du logement et tous les autres qui ont transformé Baltimore en enfer aux impôts élevés.
Au début des années 80, nous vivions dans l’un des quartiers les plus pauvres de Baltimore |
Prenez le système éducatif, par exemple. Au début des années 80, nous vivions dans l’un des quartiers les plus pauvres de Baltimore, près de Mondawmin Mall, l’épicentre des émeutes. Nous avons vite réalisé que nous ne pouvions pas envoyer nos enfants à l’école locale — trop dangereuse et incompétente. Nous ne pouvions pas non plus nous permettre de les envoyer dans une école privée. Notre seul choix était d’obtenir une permission spéciale pour qu’ils aillent dans une école "expérimentale" non loin de là. Quelle était la nature de l’expérience en question ? Les "éducateurs" voulaient voir ce qui se passerait s’ils enseignaient quelque chose aux enfants. Devinez quoi ? Les enfants apprenaient. Si bien que, quelques années plus tard, l’école ferma.
Rien ne réussit comme l’échec. Les autorités ont dépensé 22 000 milliards de dollars en programmes anti-pauvreté depuis les années 60. Une bonne partie de cet argent est allée à Baltimore.
▪ Trop de bien nuit…
Après les émeutes de la fin des années 60, la classe moyenne, les grands magasins, les usines… tous ont quitté la ville. Les zones commerçantes du centre-ville se vidèrent. Et pendant cinquante ans, le ghetto noir devint un véritable pot de miel pour les politiciens, les charlatans de l’éducation, les bonnes âmes et les penseurs aux théories farfelues. Les programmes d’aide sociale se succédèrent. Chacun arrivait en ville comme un dealer de drogue, les poches pleines de cash et des dernières concoctions destinées à détourner les gens du véritable travail de construction d’une ville digne de ce nom.
Par rapport à Detroit ou Washington, Baltimore est peut-être la capitale zombie des Etats-Unis. Per capita, on compte plus de personne recevant des chèques du gouvernement (directement et indirectement) à Baltimore que partout ailleurs ou presque.
Plus d’un habitant de Baltimore sur trois mange aux frais de quelqu’un d’autre : 35% reçoivent des bons alimentaires. Plus de 85% des écoliers reçoivent des petit-déjeuner et déjeuners gratuits. Et plus de six habitants sur 10 touchent une forme ou une autre de soutien gouvernemental.
Parmi la population en âge de travailler, plus de quatre personnes sur 10 sont sans emploi. C’est cinq fois plus que le taux de chômage officiel. Ce qui ne fait que démontrer le peu de valeur des statistiques. Pour les jeunes hommes noirs entre 20 et 24 ans, le taux de chômage réel est d’environ 60% — voire 100% dans certains quartiers.
Le taux de criminalité est deux à quatre fois plus élevé que la moyenne nationale américaine |
En plus des écoles zombie et des programmes zombie, Baltimore a plus que sa part d’indépendants : ils n’attendent pas qu’on leur distribue de l’argent — ils le volent. Ou pire. Le taux de criminalité est deux à quatre fois plus élevé que la moyenne nationale américaine. C’était pour essayer d’améliorer les statistiques qu’au début des années 90, Kurt Schmoke, le premier maire noir de Baltimore — et probablement le dernier à ne pas finir en prison –, avait trouvé l’idée d’un "Jour Sans Meurtre". Un jour spécifique avait été désigné, durant lequel les tueurs à l’esprit civique étaient censés attendre le lendemain pour commettre leur forfait.
De mémoire, il y avait eu au moins un meurtre quand même, ce jour-là ; l’assassin n’avait sans doute pas reçu le mémo.
Mais ce dont nous nous souvenons le mieux de notre période dans le ghetto de Baltimore, c’est la manière dont les gens vivaient. Privés des réconforts habituels de la vie de famille et sans accès aux défis et récompenses accompagnant un emploi, ils devaient improviser. Sans la latitude du temps et la longitude de l’argent pour les guider, ils étaient à la dérive, perdus.
Nous nous demandions ce que deviendraient les enfants grandissant dans ces quartiers. Maintenant, nous savons.