La Chronique Agora

Douloureux ajustement du marché immobilier français

Par Simone Wapler (*)

La brutale chute du nombre de transactions en France en 2008 se traduira dans les prix en 2009. La baisse des taux d’intérêt des prêts à l’habitat ne renversera pas la tendance. En 2008, les ventes de logements neufs ont chuté de 50% dans le neuf et de 30% dans l’ancien.

Les professionnels du marché juraient alors la main sur le coeur que le marché ne baissait pas… faute de transactions. Des mois s’écoulent entre une décision et une transaction effective. Néanmoins, le marché obéit aux règles immuables de l’offre et de la demande. L’offre se gonfle de la hausse des stocks des promoteurs, note la banque HSBC.

La demande est plombée par la remontée du chômage. La diminution des taux d’emprunt et les dispositifs Scellier n’auront que peu d’influence pour atténuer ce déséquilibre. La banque s’attend donc à un recul des prix. Aux facteurs négatifs soulignés par HSBC s’ajoute le phénomène du "plafond des niches".

Les niches sont basses de plafond, c’est bien connu. Le gouvernement, en limitant les déductions fiscales, pénalise les plus gros patrimoines. Vous ne pourrez déduire plus de 10% de vos revenus, auxquels s’ajoutent 25 000 euros forfaitaires. De quoi limiter l’envie d’investir selon le régime Scellier (ou selon les "Robien recentré" et "Borloo populaire"), dispositif qui permettait des allègements en contrepartie d’un engagement de location.

Les stocks de logements continuent à augmenter
L’inertie de la pierre est telle que les stocks d’appartements achevés ou en cours de construction augmentent toujours. Car les chiffres habituellement publiés additionnent les logements achevés, ceux qui sont en cours de construction et ceux qui sont en projet.

Très logiquement, l’ensemble du stock a donc été ramené à 111 000 au dernier trimestre de 2008, contre 113 400 le trimestre précédent. Mais les 2 400 appartements de différence proviennent essentiellement de la baisse du nombre de projets. "Le stock d’appartements achevés a, en revanche, continué de croître", fait judicieusement remarquer HSBC.

Parallèlement, le délai d’écoulement augmente, puisqu’il y a moins d’acheteurs. La mécanique infernale est donc en place.

Moins de constructions, donc moins de richesse nationale
"Quand le bâtiment va, tout va", prône le dicton populaire. Les entrepreneurs prévoient une baisse d’activité — le climat des affaires du bâtiment, suivi par l’Insee, a reculé à 91 en avril. Il retrouve son niveau de juin 1997.

Moins de chantiers se traduit par un recul du produit intérieur brut de 0,7%. Il faut savoir que l’activité a contribué pour 0,9% à la richesse nationale entre 2004 et 2007. La reprise de la croissance en pâtira. Une pierre (si l’on peut dire) dans le jardin de ceux qui voient la reprise pour 2010 : il y a un trou de 1,6% à combler.

La récession entame la solvabilité des ménages
Malgré le recul des prix de l’immobilier déjà entamé, la solvabilité des ménages français s’est dégradée, diminuant de 2,6% en 2008. Pour que les ménages se retrouvent dans une situation similaire à celle de 2003, il faudrait que le ratio remonte de 27%.

L’étude de la banque HSBC établit son indicateur de solvabilité à partir du revenu brut disponible des ménages, du montant des remboursements mensuels, de la durée moyenne des emprunts et des prix. "En moyenne, le revenu disponible brut moyen des ménages leur permettait d’acheter en 2008 un logement de 17 m2, contre 25 m2 en 2002 et 30 m2 en moyenne entre 1997 et 1999", note l’étude.

La baisse à attendre en 2009
Les prix de l’ancien étaient restés stables en 2008. L’étude de HSBC prévoit une baisse de 7% en 2009. Sur le marché du neuf, l’ajustement des prix reste encore très insuffisant. En outre, les stocks sont très disparates : 12 mois en Ile-de-France, mais 28 mois en Franche-Comté, par exemple. Le chômage ne va pas encourager à la mobilité. Les perspectives sont donc moroses. Cependant, le chiffre moyen de baisse avancé par HSBC est de 5%, donc inférieur à celui de l’ancien.

Meilleures salutations,

Simone Wapler
Pour la Chronique Agora

(*) Simone Wapler est analyste, journaliste et ingénieur de formation. Elle a déjà contribué à des publications telles que Le Point, Enjeux, Les Echos, Chart’s… Spécialisée dans les valeurs industrielles, les matières premières, les énergies, l’or, les minières Simone Wapler est passionnée par et les investissements "tangibles".
Elle analyse chaque mois le secteur aurifère dans la lettre d’investissement Vos Finances – La Lettre du Patrimoine et elle intervient régulièrement dans l’Edito Matières Premières & Devises ou dans différents rapports d’investissements.
Elle est aussi la rédactrice en chef du magazine MoneyWeek.

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