▪ Après le formidable surgissement d’euphorie de mardi et une hausse de près de 1% des places européennes (mais de seulement 0,62% à Paris), les opérateurs s’attendaient à une cascade de records historiques — motivée par la conviction que la Fed allait publier un diagnostic économique strictement identique à celui du 18 septembre dernier et conclure à la poursuite quasi éternelle du QE3.
C’est exactement le message que véhicule le communiqué final : reprise économique modérée, chômage élevé, inflation loin du niveau cible des 2%.
Plus neutre et plus transparent que ça, il faut écrire au jus de citron sur une feuille blanche. En ce qui concerne la poursuite des injections, elle a été votée à neuf contre un… et la fuite en avant continue, en l’absence d’un plan B.
Moins les liquidités de la Fed génèrent de croissance et d’emploi, moins les marchés se demandent pourquoi persister dans une stratégie qui ne fonctionne pas.
Cela a échoué en 2010 puis en 2011. L’activité et les profits se sont contractés aux Etats-Unis dès la mise en oeuvre du QE3 et aucun effet positif n’est observé depuis le 1er janvier.
Ben Bernanke et Janet Yellen sont pourtant décidés à poursuivre jusqu’à ce que le QE3 « réussisse ».
▪ Mais qu’est-ce qu’ils entendent par « réussir » ?
Si c’est à relancer l’économie, nous doutons fortement qu’ils n’y parviennent jamais.
Si c’est à gonfler la plus gigantesque montgolfière boursière et obligataire de tous les temps, ils sont en bonne voie : le niveau des taux d’intérêt est totalement déconnecté du risque de défaut réel et de l’insolvabilité des emprunteurs.
Si l’Amérique était solvable, la Fed n’aurait pas besoin d’absorber 70% des émissions du Trésor… Mais puisqu’elle imprime sans limite, les prêteurs se verront toujours offrir le coupon auquel ils ont droit. Ils n’ont donc — techniquement — aucune raison de cesser de faire confiance à l’Oncle Sam.
Le seul problème, c’est que le revenu de leur portefeuille obligataire est payé en monnaie de singe… Là non plus, ce n’est pas grave puisque les autres devises ne valent pas mieux : le yen représente une économie endettée à 250% et l’euro une sorte de Frankenstein monétaire dont les composantes périphériques sont en faillite.
En réalité, les trois principales devises de réserve de la planète sont de la monnaie de singe. La livre sterling, qui arrive en quatrième position, fait partie de la même catégorie ; le franc suisse peut au besoin se retrouver arrimé à l’euro le temps que les acheteurs se découragent.
Le communiqué final de la Fed s’est soldé par un timide rebond du dollar vers 1,3730/euro. Maintenant, tous les regards vont se tourner vers la BCE avec l’espoir qu’elle évoque son adhésion au principe d’un LTRO 3.
▪ Si tout va bien… pourquoi une baisse ?
La surprise est venue Wall Street : les indices américains ont rapidement chuté vers les plus bas du jour, avec un repli de 0,6% en moyenne. Cependant, le Russell 2000 perdait curieusement 1,1% à mi-séance.
A Paris, ce fut une journée pour rien en apparence (un écart de -0,09% semble des plus insignifiants). Le CAC 40, qui avait ouvert en repli à 4 273 points, en termine à 4 274 points sur un formidable écart de… un point. Quant aux volumes, ils étaient quasi-estivaux : 2,65 milliards d’euros.
Sauf qu’en séance, le CAC 40 a battu vers 11h — pour 0,8 point d’indice — son précédent record du 22 octobre inscrit à 4 309,1 points, avant de retomber vers 4 264 points en fin d’après-midi.
Ce nouveau zénith intraday du milieu de la matinée n’a pas occasionné le déclenchement d’une rafale de stops. Quelques vendeurs à découvert ont bien dû se faire hara kiri dès le re-franchissement des 4 300 points… mais aucune vague d’achats ou de rachats massifs n’était détectable (les volumes anémiques en témoignaient).
Le CAC 40 avait d’ailleurs plafonné sous les 4 310 points bien avant 14h30 et la matérialisation d’une cascade de record historiques absolus inscrits à la minute même de l’ouverture à Wall Street. Jugez plutôt : 15 721 sur le Dow Jones, 1 775 sur le S&P 500.
Nous avons probablement assisté à un phénomène de ventes sur le fait accompli mercredi soir puisque tous les gains de la veille ont été reperdus : -0,5% sur le S&P et -0,55% sur le Nasdaq.
Le Russell 2000, quant à lui, chutait curieusement de 1,4% après avoir inscrit un record historique à 1 123 points. Un tel écart aurait fait mauvais effet s’il s’était agi du S&P 500 ou du Dow…
Fort heureusement, ces deux indices restent sous contrôle car il est impératif d’entretenir le sentiment que le marché paye spontanément tous les creux — cela afin de permettre aux initiés de revendre le maximum de papier au plus haut maintenant que même les Roubini et les Rosenberg sont passés haussiers.