▪ Le rebond technique des places boursières européennes a tourné court ce lundi. Pour que les gains initiaux soient préservés, il aurait fallu que Wall Street n’éprouve ni déception relative aux trimestriels publiés en préouverture, ni nouvelle inquiétude relative à la croissance aux Etats-Unis.
Ce lundi s’avère perdant sur les deux tableaux. Les compagnies aériennes américaines chutaient de 8% en moyenne dès l’ouverture après la publication des résultats jugés décevants de Delta Airlines… Wall Street a également reçu un nouveau coup de massue en découvrant l’indice de confiance de la National association of home builders/Wells Fargo (NAHB, Association américaine des constructeurs immobiliers). Ce baromètre mensuel — très suivi depuis le surgissement de la crise immobilière — a chuté de deux points, à 14, au mois de juillet, contre 17 en juin avant révision vers 16. Il se retrouve ainsi à son plus faible niveau depuis avril 2009.
Par ailleurs, l’indice de confiance Housing market index (HMI, Indice du marché immobilier) recule lui aussi de deux points. Il retombe vers 12, sachant que le score de juin a lui-même été révisé en baisse à 14 contre 15.
Ceci augure mal d’une stabilisation de l’activité et des prix dans le secteur immobilier au second semestre 2010… A moins que Washington ne dégaine de nouveaux stimuli fiscaux, à l’image de la prime de 4 000 $ — 8 000 $ pour un couple — qui avait soutenu les ventes jusqu’à fin avril dernier.
Après ce nouveau coup de semonce qui renforce les craintes d’un scénario en double creux, les rachats techniques du début de la séance se sont brutalement interrompus. Les days traders se sont empressés de clôturer les positions longues initiées en début de journée.
▪ Le CAC 40 en a terminé pratiquement au plus bas : -0,4% à 3 486 points. Il a fait le grand écart entre le plus haut du jour, inscrit à 3 534 points vers 15h50, et un plancher de 3 478 points atteint vers 16h40. Alors qu’il avait fallu près de sept heures pour gagner jusqu’à 0,9%, il aura fallu moins de 50 minutes pour atteindre -0,65%.
Les indices paneuropéens alignent une quatrième séance consécutive de repli . L’Eurotop 100 dérape de 0,7% — un peu à l’image de Hong Kong qui avait cédé 0,8% lundi matin.
Paradoxalement, les mauvais chiffres américains n’ont pas vraiment affecté le dollar. Il est resté stable autour de 1,296/euro (soit +0,2%). S’il a flirté avec les 1,30 face à l’euro, c’était en tout début de journée ; la volatilité est ensuite retombée et ne s’est plus manifestée par la suite.
Le point d’orgue de la semaine pour les investisseurs retentira vendredi avec la publication des résultats des stress tests menés sur les banques européennes. Nul ne redoute de mauvaises surprises, bien au contraire… mais si le tableau apparaissait par trop idyllique, cela entretiendrait le soupçon que l’opération a été réalisée sur la base de critères « hédonistes » à l’excès.
▪ Il sera cependant difficile de faire plus risible que le stress test des banques américaines au printemps 2009. Elles inscrivaient elles-mêmes le montant des capitaux dont elles prétendaient avoir besoin, sans aucun contrôle méthodologique concernant l’évaluation de leurs stocks de créances pourries ou les risques inhérents aux engagements à terme sur des produits complexes conclus de gré à gré.
Le but, qui était d’éviter la réédition du syndrome Lehman, a été atteint. A part Citigroup, toutes les banques ont réussi à lever les capitaux qu’elles souhaitaient sur les marchés, grâce notamment aux liquidités déversées en cataracte par les lances à incendies à très haute pression de la Réserve fédérale.
▪ En ce qui concerne l’adoption par le Congrès US de la loi de réforme bancaire vendredi, là encore, c’est du « no stress » pour les banques américaines.
Les dispositions les plus contraignantes ont été soit vidées de leur substance… soit transformées en gruyère. Chaque nouvelle obligation est compensée par une kyrielle d’exceptions ou d’exemptions liées au statut des filiales, au volume d’affaires qu’elles traitent, etc.
Les nouvelles mesures réglementaires qui prévoient un accroissement du capital pour les adeptes du casino financier sans limites ne sont assorties d’aucune précision sur le délai maximum autorisé avant d’être déclaré hors-jeu.
En ce qui concerne le volet « supervision financière », l’efficacité de la surveillance des activités bancaires n’en sort pas véritablement renforcée. Un organisme de contrôle est d’ailleurs supprimé (il s’agit de l’Office of thrift supervision) pour avoir fait étalage de son impuissance et de son incompétence durant la crise.
La logique élémentaire aurait pu consister à lui donner de nouveaux moyens d’investigation, mais le Congrès a jugé plus judicieux de le faire disparaître purement et simplement.
Rassurez-vous, il subsiste une multitude d’organismes de surveillance dont le Congrès a soigneusement évité d’éliminer les points faibles.
Parmi les projets cruciaux étouffés dans l’oeuf, il y avait celui qui visait à créer un régulateur unique qui serait né de la fusion de la Securities and exchange commission (SEC) avec la Commodity futures trading commission (CFTC), le régulateur des marchés de dérivés. L’immense avantage aurait été de pouvoir recouper les informations en temps réel et d’avoir d’emblée une vision globale du risque
Mais le législateur a dû faire marche arrière face à la vive opposition manifestée par les professionnels. Il y a également eu le réflexe corporatiste des organismes de surveillance soucieux de défendre leur raison d’être.
Les établissements financiers pourront continuer de choisir par qui ils souhaitent être contrôlés (une singulière exception américaine)… Nous soupçonnons que certains préfèreront n’avoir à faire qu’au régulateur le plus incompétent ou le plus magnanime !
▪ Les paradis fiscaux ne semblent même pas faire partie du paysage financier, aucune nouvelle mesure de transparence ne les concerne.
Normal, nous direz-vous : un certain président d’une république européenne célèbre pour les talents musicaux de la Première dame de ce pays prétend que son action résolue — avec l’appui du G20 au lendemain du sommet de Pittsburgh — a permis de faire disparaître les vilains « trous noirs » (pays non coopératifs) de la finance internationale. On respire !