La Chronique Agora

Déficits, Fed, Etat-Providence, récession : les quatre défis des Etats-Unis

▪ Les Américains sont au beau milieu d’un cycle politique destructeur qui s’auto-alimente — un cycle qui pourrait se conclure par un scénario cauchemardesque. Un diagnostic un peu rapide de la crise financière se trouve à la racine de ce cycle destructeur.

Si l’économie de marché n’a pas provoqué la crise financière, c’est l’ingérence politique, avec les taux d’intérêt et l’allocation des crédits, qui l’ont provoquée. Sans un bon diagnostic, le remède peut se révéler pire que le mal. Dans ce cycle destructeur, la réaction populaire face à une crise financière provoquée par une trop grande influence des Etats et des banques centrales est : "donnez-nous plus d’Etat et des banques centrales encore plus folles !"

L’économie continuera à être malmenée dans un cycle qui s’auto-alimente : plus d’Etat qui conduit à des échecs de marché conduisant à encore plus d’Etat

Mes propos ne se veulent pas politiques. Mais qu’on le veuille ou non, les hommes politiques représentent une part importante dans l’équation des investissements. Et il est clair que l’économie continuera à être malmenée dans un cycle qui s’auto-alimente : plus d’Etat qui conduit à des échecs de marché conduisant à encore plus d’Etat.

Traitez-moi de cynique bougon mais il vaut mieux être réaliste lorsqu’on examine cette situation. Pourquoi ? Parce que vous ne pouvez pas dire, après avoir réfléchi aux quatre points qui suivent, que les défis de l’Amérique (ignorez les familles ou les entreprises) ne dépassent pas les opportunités de l’Amérique :

▪ Premièrement, le budget fédéral "non discrétionnaire" est sur pilote automatique, conduit par les données démographiques. L’inertie politique ne permettra pas de réformes significatives. Nous "n’avons pas les votes", comme ils disent au Congrès, pour réformer les programmes d’aide sociale.

▪ Deuxièmement, une masse critique d’électeurs exigent des services d’Etat, dont des services de santé — des services toujours en attente d’être définis par les bureaucrates. Voici ma prédiction, basée sur l’intrusion du gouvernement sur les marchés : dans cinq ans, le système de santé deviendra aussi populaire que le service des immatriculations de votre préfecture.

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Des sondages réalisés mardi dernier aux Etats-Unis ont révélé que cette qualité d’autonomie qui caractérisait le peuple américain n’est plus aussi populaire qu’avant. Beaucoup d’électeurs considèrent que l’Etat-Providence de style européen n’est plus un échec menant à la faillite mais un modèle pour les Etats-Unis. Ils troquent leur liberté contre l’illusion de sécurité économique.

Pourquoi la sécurité économique assurée par un Etat est-elle une illusion ?

Pourquoi la sécurité économique assurée par un Etat est-elle une illusion ? C’est simple : il est impossible de payer ces prestations sociales sans augmenter les impôts à un degré tel qu’il détruirait à la fois l’économie et les marchés financiers ou qu’il anéantirait la valeur du dollar. Confisquer les revenus et actifs des "riches" (en passant outre le fait que cela mettrait un nombre incalculable de personnes au chômage) ne renflouerait qu’imperceptiblement le déficit budgétaire. Ceci est un fait, pas une opinion. Malheureusement, plutôt que de discuter factuellement du déficit, les hommes politiques préfèrent attiser l’émotion toxique de l’envie.

▪ Troisièmement, la prochaine récession — et nous devons nous attendre à en avoir une dans un futur pas trop lointain — augmentera le déficit fédéral bien au-delà des prévisions. Les recettes fiscales chuteront tout comme les revenus, les plus-values et l’activité économique. Les dépenses pour les programmes pour l’emploi augmenteront à nouveau. La réponse prévisible de l’administration Obama à une récession sera un autre plan de stimulus dans lequel les démocrates obtiendront une augmentation des dépenses et les républicains une autre réduction d’impôts.

Au final, une récession conduit donc à de plus grands déficits, qui à leur tour conduisent à des politiques qui creusent encore plus les déficits. Paul Krugman et beaucoup d’autres professeurs d’économie adoreraient. Krugman considèrerait cela comme un effort louable pour combler un "écart de production" mythique, incommensurable… tandis que les gens de bon sens considéreraient cela comme un chemin direct vers l’hyperinflation.

Il n’existe pas de retour possible du QE car la monnaie fraîchement imprimée a boosté le niveau de prix au-delà du niveau auquel il aurait été autrement

▪ Quatrièmement, la Réserve fédérale s’est elle-même mise dans une impasse. L’assouplissement quantitatif (quantitative easing, QE) est une proposition en aller simple. Il n’existe pas de retour possible du QE car la monnaie fraîchement imprimée a boosté le niveau de prix au-delà du niveau auquel il aurait été autrement. Inverser le QE entraînerait une "déflation" épouvantable. Toute stratégie de sortie du QE n’existe que dans les modèles théoriques. Dans la réalité, inverser le QE (vendre des obligations et ponctionner du cash du système financier) ferait s’écrouler tous les marchés financiers manipulés simultanément.

Les objectifs de la Fed au début de la crise étaient principalement de soutenir le système bancaire aux dépens des épargnants. Aujourd’hui, la Fed sera pressée, menacée et finalement obligée de monétiser encore la dette de l’Etat américain — tout cela pour financer un budget d’Etat trop cher pour le secteur privé.

En tant que partisan d’un gouvernement resserré, abordable, durable– en voilà des expressions à la mode — je regrette que certains électeurs aient choisi un gouvernement enlisé dans un cycle destructeur qui s’auto-alimente. Le temps dira si ce cycle (plus d’Etat, échec des marchés, plus d’Etat, échec des marchés…) pourra être stoppé.

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