La Chronique Agora

Le Deep State et La mort du conservatisme américain

Deep State christine lagarde

La défaite de Trump est désormais inévitable. Le faux conservateur accélère la désintégration du parti républicain. Le Deep State a de beaux jours devant lui, l’argent a tué les partisans de l’Etat minimal.

Voici ce que publie le Financial Times, en gros titre : « Comment Hillary Clinton gèrera-telle un Congrès hostile si elle est présidente ? »

Le quotidien « aux pages couleur saumon » n’attend pas que les votes soient comptabilisés.

De nombreux républicains, eux aussi, renoncent à tenter de faire accéder Donald Trump à la Maison Blanche.

Ils le laissent tomber comme une vieille chaussette puante, en espérant que l’odeur n’imprègnera pas leurs vêtements, car ils voudraient bien être réélus.

Une élection de plus en plus étrange

Et donc, cette élection présidentielle de 2016, déjà étrange, le devient encore plus.

Quel spectacle !

Au lieu d’attaquer son adversaire et sa politique — une cible facile, normalement – M. Trump vise ses camarades républicains.

Le sénateur John McCain est « grossier », déclare-t-il avec hargne sur Twitter.

Paul Ryan, le chef de la majorité parlementaire, est un « leader mou et inefficace ». En outre, les « républicains manquant de loyauté » sont bien plus difficiles que cette « corrompue d’Hillary ».

Trump déclare « qu’on l’a libéré de ses entraves ». Il est temps de se bagarrer à poings nus, et de reprocher sa défaite à l’Establishment républicain. Cela devrait être amusant.

Mais, en coulisses, les conversations sérieuses doivent avoir commencé.

« Bon », dit une voix sensée, à l’intérieur du crâne du Donald. « Si tu restes dans la course, tu vas perdre. Ensuite, Hillary et l’Establishment républicain vont tous s’en prendre à toi.

Les impôts… le harcèlement sexuel… le droit du travail : ils trouveront bien quelque chose pour t’épingler. Tu sais comment ça marche. On trouve toujours quelque chose.

Tu seras le plus grand loser de toute l’histoire des présidentielles américaines. Un débile. Tu resteras dans l’histoire comme le type qui a détruit le parti républicain. Peut-être même le type qui a détruit la démocratie américaine.

Personne ne voudra acheter ton vin. Ou tes steaks. Ou séjourner dans ton hôtel. Ou jouer sur ton parcours de golf. Au mieux, tu vas te retrouver encore fauché. Au pire, tu iras en prison. Et ta femme te quittera en emportant tout l’argent qu’il te reste.

Ou bien quoi ? Tout le monde déteste Hillary. Tu es probablement le seul républicain du pays qu’elle pouvait battre. C’est comme si elle t’avait demandé d’être son adversaire. J’dis ça, j’dis rien…

Laisse tomber avec élégance. Conclus un accord. Mince quoi, t’es le meilleur pour conclure des accords. Laisse Pence prendre la main. En contrepartie, tu seras un héros… qui s’efface dans l’intérêt du pays. Pas d’enquête. Pas de grand jury. Pas de demandes de remboursement des prêts. Pas de séjour en tôle. »

Mais ce n’est pas la seule voix présente dans la tête du Donald. Il entend ses fans, également. Fervents. Inconditionnels. Ils le stimulent…

Et puis il voit son visage s’étaler sur tous les écrans de TV et en couverture des magazines. « Et tu veux renoncer à tout ça ? lui demande un petit diable. « Tu es génial, crois-moi », lui dit un autre.

La désintégration du parti républicain

Nous assistons à la désintégration du parti républicain, provoquée par le feu nourri de ses propres contradictions.

Pendant de nombreuses années, le parti républicain a représenté la voix du conservatisme, puisant dans des générations d’expériences amères, nous disant de nous méfier du Grand Gouvernement :

« Sa dimension doit rester modeste », disait-il. « Il faut qu’il soit humble. Il faut le maîtriser. Il faut que ses budgets soient équilibrés, sa fiscalité peu élevée, et ses ambitions limitées. Il faut s’en tenir à la Constitution ».

Traditionnellement, les conservateurs se méfient des programmes sociaux du gouvernement. En 1961, Eisenhower leur a conseillé de se méfier de l’armée, aussi. Il la connaissait mieux que quiconque.

Les anciens conservateurs considéraient le gouvernement comme un « mal nécessaire ». Mais comme l’héroïne ou Facebook, ils savaient qu’il atteint rapidement le stade où son utilité marginale décline. C’est le message qui a valu à Ronald Reagan d’accéder à la Maison Blanche en 1980, et à nouveau en 1984 : la simplicité est préférable à la complexité.

Mais ensuite, dans les années 1980, une nouvelle espèce de « conservateur » est apparue. Un conservateur adepte du Deep State, mêlant les pires caractéristiques de la gauche et de la droite : très dépensier sur le territoire national et à l’étranger. Il considérait le gouvernement comme un outil permettant de transférer argent et pouvoir dans sa poche et celles de ses amis du Deep State.

Cette nouvelle espèce s’est emparée du parti républicain : les véritables conservateurs ont disparu progressivement de la vie publique. Et sans la résistance des anciens conservateurs, il fut impossible de réfréner les ambitions de ces réformateurs du monde.

Le président Reagan lui-même a géré certains des plus gros déficits jamais enregistrés en temps de paix, un phénomène relaté dans l’excellente biographie de Reagan, The Triumph of Politics, publiée par son conseiller au budget, David Stockman.

Et les républicains ont souscrit à toutes les guerres idiotes qui se présentaient : contre la pauvreté, la drogue, le terrorisme et, plus important encore, contre les marchés.

En 1990, George H. W. Bush, ancien vice-président de Reagan et désormais président lui-même, a proclamé un Nouvel Ordre Mondial.

C’est du conservatisme, ça ? Remanier le monde entier !

Son fils a poussé les choses plus loin. Il a signé toutes les propositions idiotes qui passaient sur son bureau, notamment la plus forte contribution à l’Etat Providence en près de 40 ans : le Volet D de Medicaid, une énorme subvention en faveur de l’industrie pharmaceutique. Et puis il a proclamé une « Guerre contre le Terrorisme », plus ou moins devenue une subvention permanente en faveur de l’industrie du terrorisme.

Modeste ? Humble ?

Laissez tomber.

Le faux conservateur

En la personne de Donal Trump, « la parole a été faite chair » : le faux conservateur trouve là son expression la plus profonde.

Il n’y a aucune trace de conservatisme, en lui : ni dans sa vie personnelle, ni dans sa vie publique… ni dans ses pratiques d’entrepreneur (c’est le « Roi de l’endettement »), ni dans le programme qu’il destine aux Etats-Unis.

Pour autant que nous puissions en juger (nous doutons qu’il le sache lui-même), il n’a aucun intérêt à équilibrer le budget fédéral ou à réduire les dépenses publiques. Il poursuivra la surveillance de masse exercée sur le peuple américain. Il ne fera pas obstacle aux zombies de l’état providence et ne mettra pas, non plus, les mercenaires au pas.

Il ne propose pas du tout de limiter le gouvernement. Il promet de mieux faire fonctionner ce Grand Gouvernement : les véritables conservateurs savent que c’est précisément la chose impossible à réaliser.

Mais qu’est-ce qui a réellement provoqué l’effondrement du conservatisme, aux Etats-Unis ?

Suivez la piste de l’argent…

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