« Je ne peux pas voir ça… C’est trop déprimant ».
Nous étions en train de regarder le débat entre Hillary Clinton et Donald Trump, dimanche dernier.
D’un côté, une pro expérimentée… débitant calmement et soigneusement les platitudes et les promesses vides qu’elle pensait nécessaires pour se faire réélire.
« Nous sommes grands parce que nous sommes bons », a déclaré la femme en partie responsable de centaines de milliers de morts durant son mandat en tant que Secrétaire d’Etat.
Et de l’autre côté, un opportuniste grossier, qui se contentait d’improviser.
On ne change pas sa nature
Tout autre candidat sain d’esprit ou à peu près s’en sortirait probablement haut la main.
Son adversaire est si redoutée et si détestée qu’il suffirait de quelques instants de réflexion honnête et de discussion raisonnable ; l’élection serait gagnée.
Mais on ne change pas sa nature. M. Trump ne peut échapper à la sienne.
Elle lui colle à la peau. Ses deals louches en affaires… son manque de transparence quant à ses impôts et ses revenus… son affection, qu’on pourrait qualifier de « palpable », pour la gent féminine… son mur insensé entre les Etats-Unis et le Mexique… son attitude prétentieuse… sa moue… ses opinions écervelées et incohérentes…
La partie la plus douloureuse de la soirée a tout de même été la séance d’auto-congratulation qui a précédé l’événement lui-même.
Les modérateurs voulaient nous informer qu’ils dînaient avec les dieux de la démocratie. Ils ont également fait savoir qu’ils avaient soigneusement préparé l’émission pour que les deux candidats puissent répondre avec pondération et dignité.
Les électeurs indécis obtiendraient les informations dont ils auraient besoin pour faire un choix éclairé. On avait même fait venir un groupe d’électeurs n’ayant pas encore tranché, afin qu’ils puissent poser des questions.
Une fois réglées les sottises prétentieuses, les deux voyous ont fait leur entrée, comme deux catcheurs professionnels lors d’une remise de Prix Nobel.
Mme Clinton est arrivée sur scène avec une aisance bien rodée, un large sourire aux lèvres, pleine de confiance factice. M. Trump a traîné des pieds jusqu’à sa place, les épaules voûtées… marchant lentement, comme un homme condamné.
« On dirait que les élections sont déjà passées et qu’il a perdu », a dit notre ami.
Inapte
Peu importait les questions posées… ou à quel point les modérateurs pensaient avoir l’esprit civique : de toute façon, les deux candidats se battaient dans la boue.
Il n’y a eu aucun débat sur les programmes, les principes ou la philosophie.
Mme Clinton pense que « The Donald » est inapte à occuper le Bureau ovale. M. Trump pense que le Bureau Ovale n’est pas un endroit pour un escroc comme Hillary.
Qu’en est-il des 33 000 e-mails effacés ? voulait-il savoir.
Qu’en est-il de ses déclarations de revenus ? voulait-elle savoir.
Grâce au système fiscal en place — tel que trafiqué par nos représentants élus, y compris Mme Clinton elle-même lorsqu’elle était sénatrice de New York — M. Trump n’a apparemment pas versé un sou pour « la police, les écoles et les vétérans », a accusé Mme Clinton.
Pour sa part, s’il est élu, M. Trump a promis de nommer un procureur qui se consacrerait entièrement à à mettre Hillary derrière les barreaux.
(Elle n’en a rien dit, mais si elle est élue, le premier geste de Mme Clinton sera probablement d’appeler le fisc, l’Inspection du travail, la Direction des fraudes etc. pour s’assurer que M. Trump soit ruiné).
Mme Clinton : M. Trump ne se soucie pas des femmes, des Hispaniques, des immigrants, des pauvres, des handicapés et autres catégories de victimes qu’elle n’a pas eu le temps de mentionner.
Si elle a « la chance d’être élue », elle servira le peuple dans son ensemble, dit-elle. Après tout, c’est son slogan de campagne : « plus forts ensemble ».
M. Trump : Ah ouais ? N’êtes-vous pas celle qui a dit de la moitié de mes partisans qu’ils sont « déplorables » ? N’êtes-vous pas celles qui a dit qu’ils étaient « irrattrapables » ? Comment allez-vous pouvoir soigner les blessures laissées par cette campagne et unifier le peuple américain avec autant de « haine dans le coeur » ?
Merci, le Deep State
Et ainsi de suite… parfois drôle… pathétique la plupart du temps… et terrifiant à l’occasion.
Le républicain est du côté du gouvernement, en Syrie. La démocrate est du côté des rebelles et prête à risquer une guerre (nucléaire ?) avec la Russie sur le sujet. Aucun des deux n’a expliqué pourquoi les électeurs devraient s’en soucier.
Et lorsque tout a été terminé, le malheureux indécis avait-il un seul élément pour l’aider à prendre une décision rationnelle, en toute connaissance de cause ?
Absolument pas.
Les deux champions se sont assené des coups de gourdin et ont trébuché sur des tonneaux dans leur course vers un prix qu’aucun des deux ne devrait même frôler : le poste tenu autrefois par Washington, Jefferson et Adams.
« Il va falloir que je sorte », a dit notre ami.
Nous essayons toujours de voir le bon côté des choses. Mais les deux côtés semblaient plutôt mauvais, dimanche soir.
Nous ne souhaitons de mal à aucun des deux… parce qu’ils ont fait de cette campagne la plus distrayante que nous ayons vue.
Mais nous avons tout de même gagné une nouvelle perspective…
C’est la première fois que nous sommes reconnaissant au Deep State. Quel que soit le clown finalement élu, il n’y a pas à s’inquiéter : les élites et les initiés continueront à tous nous dépouiller, de la manière à laquelle nous avons été douloureusement habitués.