** L’été est terminé. Nous sommes dans un aéroport, et de retour au travail… 12 heures par jour… comme nous le faisons depuis 39 ans.
* Lorsque nous étions à l’université, nous n’avions pas d’argent. En été, nous devions mener deux emplois de front pour tenter d’épargner assez pour continuer nos études. Pendant un été, nous avons travaillé sur un chantier de construction d’Annapolis le matin… puis, le soir, nous repeignions des tours de télévision. Ce dernier poste était si dangereux que notre pauvre mère nous avait supplié de démissionner. Mais on gagnait bien — 5,25 $ de l’heure –, donc nous avons continué. La suite dans quelques lignes…
* Il ne s’est rien passé de frappant sur les marchés ces derniers jours — sinon que le prix de l’or a grimpé. Le métal jaune semble prêt pour attaquer une nouvelle fois les 1 000 $. Y parviendra-t-il ? Peut-être que oui, peut-être que non.
[NDLR : Vous, en tout cas, serez prêt à toute éventualité… que l’or baisse ou grimpe, vous saurez comment en tirer parti, grâce aux conseils de nos spécialistes du métal jaune…]
* De l’humilité ! De l’humilité !
* Nous devons nous rappeler que l’économie mondiale ne s’est jamais, strictement jamais, retrouvée dans un tel pétrin. Nous ne savons pas où ça va nous mener.
* L’idée, c’est que le cycle du crédit — qui se développait depuis la Deuxième Guerre mondiale — semble se contracter.
* "Les joies de l’achat victimes de la récession", titrait le International Herald Tribune hier. L’article raconte que les gens plantent à nouveaux des potagers… épargnent… se débrouillent avec ce qu’ils ont.
* Ce sera probablement un changement fondamental, et non éphémère. Mais — de l’humilité ! — qu’en savons-nous ?
* Nous soupçonnons en fait que les tendances haussières du dernier demi-siècle se sont renversées. Nous vivons une période où les excès et les erreurs de la période de boom/bulle doivent être corrigés. Il faut trouver un nouveau modèle pour l’économie mondiale — parce que la Chine ne peut pas continuer à vendre des produits aux Américains si les Américains ne peuvent pas continuer à les acheter.
* Mais ce n’est pas tout. Jamais encore dans l’histoire tant d’officiels gouvernementaux n’ont été aussi certains de pouvoir arrêter une correction. Et jamais encore ils n’avaient eu tant de munitions pour y parvenir. Les chiffres sont partout. Et ils sont gigantesques. L’administration Obama, par exemple, s’attend à des déficits de 9 000 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années — et ce chiffre est basé sur une reprise ! Imaginez ce qui se passerait si l’économie ne se remet pas ?
* A la Chronique Agora, nous n’attendons pas de reprise — ni maintenant, ni jamais. Parce que l’ancien modèle ne fonctionne plus. La dette est devenue trop grosse… trop chère… trop risquée. Quelque chose devait céder…
* Mais qu’est-ce qui cèdera aujourd’hui ? Que se passe-t-il quand une économie mondiale à 50 000 milliards de dollars par an essaie de vivre une correction alors que les gouvernements tentent de l’en empêcher ? Qu’est-ce qui cède lorsque le plus grand débiteur de la planète emprunte 9 000 milliards de dollars pour essayer d’empêcher la nature de suivre son cours ?
* Nous n’en savons rien… et nous n’avons pas le temps d’y réfléchir maintenant : nous devons embarquer.
** A l’époque où nous repeignions des tours de télévisions, nous travaillions en altitude sans harnais de sécurité. En fait, nous étions handicapé : à notre main droite se trouvait une moufle que nous trempions dans un seau de peinture attaché à notre taille. Notre main ne servait donc à rien pour s’accrocher aux poutres… qui étaient glissantes à cause de la peinture que nous avions appliquée. Rétrospectivement, tout cela semble suicidaire. Mais bon… nous avions besoin d’argent.
* Un jour, un nouveau arriva dans l’équipe. Il était un peu trop gros. Nous nous demandions comment il pourrait grimper une tour de 125 mètres de haut et évoluer avec la moufle à peindre sur la main.
* Soufflant et suant, il arriva à notre hauteur. Et c’est là qu’il commit une erreur quasi-fatale : il regarda en bas. La vue d’une telle distance entre lui et la terre ferme le paralysa. Il saisit une poutre à deux bras et refusa de bouger. Il ne pouvait pas grimper. Il ne pouvait pas descendre. Il ne pouvait plus bouger.
* "Y’a qu’à le laisser là…", conseilla un de nos collègues, récemment arrivé d’un pays où les gens étaient apparemment très blonds et très stupides.
* Le contremaître, apparemment de la même contrée, se montra plus compréhensif :
* "Idiot ! Descends de là !"
* Mais le pauvre garçon ne pouvait plus bouger.
* "Hé… calme-toi. Si tu as pu monter jusqu’ici… tu peux aussi en redescendre". Nous pensions que la logique réussirait là où les menaces avaient échoué.
* Mais c’était sans espoir.
* Nous avons donc décidé que le temps, qui guérit toutes les blessures, pourrait aussi aider notre phobique à surmonter sa crainte. Nous l’avons laissé à son sort et avons peint la tour.
* A l’heure du dîner, il était toujours là. Pétrifié. On aurait dit qu’il y resterait jusqu’à sa mort.
* Mais nous savions que nous ne pouvions le laisser là. Nous nous sommes tous réunis autour de lui. Nous lui avons passé des cordes de sécurité. Nous l’avons rassuré. Menacé de castration… et pire.
* "Si tu ne lâches pas cette poutre, je t’en balance à coups de poings", déclara le contremaître.
Notre homme réalisa enfin qu’il n’avait pas le choix.
* "Il suffit de ne pas regarder en bas", avons-nous conseillé.
* Après bien des cajoleries… et beaucoup de temps… il finit par rejoindre le sol. Il monta dans sa voiture et s’éloigna.
* "Ces sacrés étudiants", déclara l’un des ouvriers. "Toujours à emm*** le monde".