La Chronique Agora

Croissance et demande ralenties : pas de doute, c’est une récession !

▪ L’Europe est de retour en une des journaux. Chaque fois que l’Europe fait les gros titres, ils sont mauvais. Et les idées sous-jacentes sont absurdes. En fait, c’est incroyable le nombre d’idées insensées que la presse peut pondre en un seul jour.

Les problèmes immédiats, en Europe, sont au nombre de deux :

Premièrement, il semblerait que le Portugal suive le chemin de la Grèce. Il se pourrait qu’il ait rapidement besoin d’un nouveau renflouage, disent les journaux.

Deuxièmement, les Grecs eux-mêmes continuent d’avoir des problèmes avec leurs créditeurs — en dépit d’années de négociations, de renflouages, de plans de sauvetage et de bouche-à-bouche financier.

▪ Vers une nouvelle Grande Dépression… si si !
Au coeur de la nervosité des marchés, on trouve ce que Bloomberg appelle « des craintes de demande ». Pour autant que nous puissions en juger, cette notion recouvre la crainte qu’il n’y ait pas assez de gens voulant des choses et ayant l’argent pour les payer.

Pourquoi ne pas se satisfaire de la demande telle qu’elle est ? Pourquoi ne pas accepter la décision de consommateurs en pleine possession de leurs moyens concernant la quantité de choses dont ils ont besoin et qu’ils peuvent se permettre d’acheter ? Pourquoi est-ce si important qu’ils achètent plus que nécessaire avec plus d’argent qu’ils n’en ont ?

Parce que sinon, ça pourrait mener à une nouvelle Grande Dépression, annonce Christine Lagarde.

Sans rire. C’est ce que la directrice du FMI a déclaré au Conseil des relations étrangères de l’Allemagne. Le Washington Post :

« La directrice du Fonds monétaire international Christine Lagarde a averti que l’économie mondiale pourrait en revenir à une situation similaire à celle des années 30 si l’Europe ne résout pas ses problèmes, et a déclaré que l’Allemagne devait verser de nouvelles contributions aux efforts de sauvetage si l’on veut éviter un désastre. Sans ces fonds, a affirmé Lagarde, ‘nous pourrions aisément glisser dans [une situation] qui finirait par mener à une spirale baissière susceptible d’engloutir le monde entier’. »

« Elle a déclaré que les 17 pays de l’Eurozone doivent également agir rapidement pour intégrer leurs économies aussi profondément qu’ils ont intégré leurs systèmes monétaires avec la création de la monnaie unique. S’ils n’agissent pas, a-t-elle dit, cela pourrait précipiter une crise comparable à la Grande Dépression ».

▪ Grande découverte : on ne peut pas savoir ce que sera la future croissance
Voici l’un de nos économistes préférés, Larry Summers, écrivant dans le Financial Times. M. Summers s’inquiète d’un manque de confiance… et de « l’incertitude sur les perspectives de croissance future ». Selon lui, ce sont là les causes du déficit de demande.

Quoi ? La faille dans le raisonnement de Summers est visible immédiatement : si « l’incertitude sur les perspectives de croissance future » est un problème, il est équivalent à l’incertitude sur le temps que durera notre réserve d’alcool durant une tempête de neige. C’est une incertitude avec laquelle il faut vivre. On ne peut pas connaître l’avenir. On est toujours dans l’incertitude quant aux perspectives de croissance — d’autant plus que les économies développées en engrangent bien peu.

L’Europe devrait se contracter de 0,5% cette année. Les Etats-Unis devraient croître, mais seulement de 1,8%. Le Japon… l’autre grande économie développée… n’a pas avancé depuis 21 ans, et ça ne devrait pas changer cette année.

Alors oubliez ces « incertitudes sur la croissance ». Le monde, dans son intégralité, ne croît pas. C’est comme ça. Passons à autre chose.

Au lieu de ça, Summers pense que ces incertitudes devraient être réglées… oui, par le gouvernement ! Bien entendu, le gouvernement est un secteur qui ne produit jamais de véritable croissance. C’est un consommateur, non un producteur. Il ne peut consommer que ce qu’il extrait de l’économie concrète. Il détourne les ressources d’activités réelles et qui créent de la croissance, pour les allouer à de la redistribution zombie, des sinécures et des réglementations écrasant l’emploi.

Mais Summers pense que le gouvernement n’a pas d’objectif plus élevé que de pousser les gens à faire du shopping. « Le gouvernement n’a pas de responsabilité plus haute que de s’assurer que les économies ont un niveau adéquat de demande », dit-il.

Quoi ? Attirer les gens dans les grands magasins est plus important que les protéger contre l’annihilation ? Est-il plus important que les gens achètent de nouveaux grille-pains… ou qu’ils puissent vivre en paix dans une société juste et honnête ?

Apparemment.

Mais comment le gouvernement peut-il augmenter la demande ? Comment peut-il rendre les gens plus riches et plus confiants ? Il ne le peut pas, évidemment. Le gouvernement n’est pas un producteur. Il ne peut donc pas rendre les gens plus riches.

▪ Le gouvernement comme faussaire autorisé
Tout ce qu’il peut faire, c’est les escroquer. Summers cite le Grand Escroc en personne, John Maynard Keynes :

« [L’]autorité publique doit être appelée en renfort pour créer des revenus supplémentaires grâce à la dépense d’argent emprunté ou imprimé ».

Voyons voir. Les autorités empruntent 5 $ à Pierre pour les donner à Paul. En quoi la demande a-t-elle augmenté ?

« Pierre était riche », me direz-vous. « Il n’allait pas dépenser cet argent. Autant le donner à Paul ».

Eh bien, nous ne savons pas ce que Pierre allait faire avec son argent. Il aurait pu l’investir pour créer plus d’emplois et de production. Ou peut-être l’aurait-il dépensé lui-même. Quoi qu’il en soit, ça aurait été mieux que de le prêter aux autorités. Nous savons ce qu’elles font de l’argent. Il peut terminer dans les poches d’un riche lobbyiste. Ou être utilisé pour construire un drone qui ira s’écraser dans le désert. Rien de très utile, donc.

L’autre choix, pour augmenter la demande, est d’imprimer l’argent. Hé… quelle sorte d’argent est-ce, si on peut le créer simplement grâce à une planche à billets ?

Nous ne daignerons pas répondre à cette question, cher lecteur. Nous savons de quelle sorte d’argent il s’agit. C’est de l’argent contrefait, « pour de semblant »… le genre d’argent qui vous mènerait en prison si vous l’imprimiez tout seul.

Et vous mériteriez d’aller en prison. Idem pour les autorités qui en vantent les mérites.

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