La Chronique Agora

La crise financière n’était pas un accident

Par Marc Faber

▪ Observateur éloigné mais néanmoins intéressé par l’histoire et les marchés d’investissement, je suis fasciné par la façon dont les grands événements qui trouvent leur origine dans des tendances long terme sont souvent expliqués par des causes court terme.

On explique ainsi la Première Guerre mondiale comme étant une conséquence de l’assassinat de l’archiduc Franz Ferdinand, héritier du trône austro-hongrois ; on explique la Crise de 1929 comme étant le résultat de la rigueur des politiques monétaires de la Fed ; on explique que Hitler est la cause de la Seconde Guerre mondiale ; et que la guerre du Vietnam est le résultat de la menace communiste.

De même, on attribue la désinflation qui a suivi l’année 1980 aux politiques monétaires restrictives de Paul Volcker. Le krach boursier de 1987 est de la faute des assurances de portefeuilles. Et la crise asiatique et le krach boursier de 1997 sont attribués aux étrangers ayant attaqué le baht (la monnaie thaïlandaise). Toutefois, si l’on regarde de plus près tous ces événements, on voit que leur cause était bien plus complexe et qu’un caractère inévitable entrait toujours en jeu.

▪ Complexe et inévitable
Prenons par exemple le krach boursier de 1987. A l’été 1987, le marché boursier était devenu extrêmement suracheté et une correction était inévitable, peu importe à quel point l’avenir semblait prometteur. Entre le plus haut d’août 1987 et le plus bas d’octobre 1987, le Dow Jones a dévissé de 41%. Comme nous le savons tous, le Dow n’a cessé de monter les 20 années suivantes, pour atteindre un plus haut en octobre 2007 à 14 198.

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Les banques centrales comme la Bundesbank demandent à rapatrier leur or des coffres américains et français.

Ce qu’elles ne savent pas, c’est qu’elles risquent fort de ne jamais revoir leurs lingots !

Découvrez pourquoi sans plus attendre : il pourrait y avoir de spectaculaires profits à la clé.

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Ces variations nous rappellent que nous pouvons subir de fortes corrections à l’intérieur même de tendances long terme. La crise asiatique de 1997-1998 est également intéressante parce qu’elle a eu lieu bien après que les fondamentaux macroéconomiques asiatiques aient commencé à se dégrader. Sans surprise, les analystes, gestionnaires de fonds et stratégistes asiatiques, en éternels optimistes, sont restés positifs sur les marchés asiatiques jusqu’à ce qu’éclate la catastrophe en 1997.

Mais même pour l’observateur le plus candide, il aurait dû être évident que quelque chose n’allait pas. L’indice Nikkei et le marché boursier taïwanais avaient atteint un sommet en 1990 et ont eu tendance à baisser ou à stagner par la suite, alors que la plupart des autres bourses en Asie ont culminé en 1994. En fait, l’indice Thailand-SET avait déjà dévissé de 60% par rapport à son plus haut de 1994 lorsque la crise financière asiatique a fait chuter le baht de 50% en quelques mois. Cet événement a sorti les analystes et les médias continuellement optimistes de leur léthargique contentement de soi.

Je suis d’accord avec le regretté Charles Kindleberger, qui avait déclaré que "les crises financières sont associées aux pics des cycles économiques", et qu’elles "sont le point culminant d’une période d’expansion et précèdent une phase descendante". Toutefois, je suis également d’accord avec J.R. Hicks, qui affirmait qu’une "crise réellement catastrophique" a toutes les chances d’avoir lieu "lorsqu’il y a une profonde instabilité monétaire — lorsque le pourrissement touche au plus profond le système monétaire".

▪ Il n’y a pas de hasard
En résumé, une crise financière n’arrive pas par hasard mais après une longue période d’excès (politiques monétaires expansionnistes et/ou politiques budgétaires conduisant à une croissance excessive du crédit et à une spéculation excessive). Le problème réside dans l’établissement du moment de début de la crise. En général, comme c’était le cas en Asie dans les années 1990, les conditions macro-économiques se dégradent bien avant le début de la crise. Toutefois, les politiques monétaires expansionnistes et une croissance excessive de la dette peuvent allonger la durée du développement économique pendant une très longue période.

Dans le cas de l’Asie, les conditions macro-économiques ont commencé à se dégrader en 1988 lorsque le commerce des pays asiatiques et les excédents de balance courante ont chuté. Ils sont par la suite devenus négatifs en 1990. Toutefois, le développement économique a continué — largement financé par des emprunts étrangers excessifs. Résultat : à la fin des années 1990, juste avant la crise de 1997-1998, les baissiers asiatiques étaient totalement discrédités par le grand nombre de haussiers et leur point de vue était largement ignoré.

Même si les Asiatiques n’étaient pas si naïfs et n’allaient pas jusqu’à croire que "le niveau global d’endettement n’a pas d’importance… le passif de l’un est l’actif de l’autre" (comme le disait Paul Krugman), ils ont avancé plusieurs autres arguments en faveur de l’expansion économique continue de l’Asie et pour expliquer pourquoi l’Asie ne connaîtrait jamais le genre de "crise tequila" que le Mexique avait traversé à la fin de 1994, lorsque le peso mexicain s’est effondré de plus de 50% en quelques mois.

Nous verrons la suite dès lundi.

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