La Chronique Agora

Crise de foi aurifère… ou pas

▪ Pendant son séjour au Japon, votre correspondante a eu l’occasion de visiter une mine d’or — désaffectée, quoi qu’encore exploitée jusque dans les années 80. Et tandis que j’écoutais d’une oreille les commentaires chantonnés en japonais, descendant le long d’étroits tunnels froids et humides… à la surface, le métal jaune était en train de grimper vers ses sommets actuels de… attendez que je vérifie… près de 1 148 $ à l’heure où j’écris ces lignes — et plus de 1 180 $ courant de la semaine.

Eh oui, les 1 200 $ ne sont plus très loin. Nos prévisions à 2 000 $ semblent soudain beaucoup moins exotiques… et, oserais-je le dire… c’est bien ça qui m’inquiète un peu.

Ne vous méprenez pas, cher lecteur, il est bien agréable d’avoir raison de temps en temps. A la Chronique Agora, nous sommes depuis bien longtemps accoutumés au fait d’avoir vu juste — mais trop tôt… nous ne comptons plus les prévisions qui ne tournent pas aussi mal qu’anticipé… et les surprises de M. le Marché ont mis maintes et maintes fois des bâtons dans les roues de nos analystes.

Alors pour une fois que les choses se passent comme nous l’espérions… pourquoi cette soudaine crise de foi aurifère ?

Simplement parce que tous les facteurs cités ci-dessus m’ont justement appris à me méfier des scénarios qui semblent trop évidents. Faut-il le répéter ? « Quand tout le monde pense la même chose, c’est que plus personne ne pense ».

Or visiblement, tout le monde pense que l’or va continuer de grimper. Comme le disait Bill Bonner hier, « tout le monde semble grimper dans le train de l’or. Franchement, il en devient un peu bondé… un peu lourd. Tout ça nous met… eh bien… un peu mal à l’aise ».

Se pourrait-il que notre Transaction de la Décennie — achetez de l’or, vendez les actions — prenne fin avec la décennie, justement ?

▪ Simone Wapler nous en disait un peu plus sur la question vendredi dernier dans L’Investisseur Or & Matières  :

« Tout bon contrarien s’angoisse quand l’investissement qu’il a repéré attire le troupeau. La phase maniaque, la bulle et son éclatement ne sont pas loin. Faut-il encore acheter ? Dylan Grice, un de mes analystes préférés — contrarien et visionnaire — récemment recruté par la Société Générale, a sorti une note consacrée à l’or le 18 novembre, intitulée « Popular delusion« , sous-titre « A minskian road to the next gold mania« . Traduction : « Illusion populaire — la future phase maniaque de l’or selon Minsky ».

Et que déduit Grice, exactement ?

« Si le dollar devait être garanti par de l’or, comme durant les années 1970, l’or vaudrait… 6 300 $, commence Grice, donc l’or est bon marché. La dernière fois que les Banques centrales ont été globalement acheteuses d’or, c’était entre 1968 et 1970. L’or valait moins de 50 $. Deux chocs pétroliers et dix ans après, l’or culminait à 780 $. Donc l’or est bon marché, dit Grice ».

Il se pose quand même une question fondamentale, continue Simone (et Grice) : l’or vaut-il toujours quelque chose ?

« Depuis le XVIIe siècle, l’usage du papier-monnaie s’est répandu. Mais le papier a toujours été convertible en or, argent ou garanti par de l’or. Sauf depuis trente ans. Mais une rupture vient de se produire : les gouvernements des pays riches sont insolvables, les Banques centrales qui impriment de l’argent sont discréditées, elles n’ont pas vu venir la crise, elles sont aux bottes des politiques et non au service de la souveraineté de leur monnaie ».

« Cette rupture est en fait la première phase du boom de l’or selon Grice. Ouf ! L’or n’est pas encore cher. Les vieux briscards attendront une consolidation, mais les nouveaux croyants peuvent rentrer en confiance ».

A bon entendeur… rendez-vous aux 2 000 $ !

Meilleures salutations,

Françoise Garteiser
La Chronique Agora

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