La Chronique Agora

Trois conseils boursiers à appliquer maintenant

▪ L’étude des foules a toujours fasciné le monde de la finance. Il n’est guère difficile de comprendre pourquoi. Les marchés peuvent en venir à des extrémités folles, à tel point qu’elles deviennent incompréhensibles. Certains les expliquent en affirmant que les foules font des choses stupides que des individus, après raisonnement, ne feraient jamais. En un sens, une foule devient un organisme propre — stupide, maladroit, émotionnel, etc.

Ceci est grosso modo la thèse d’un classique du genre, Psychologie des foules de Gustave Le Bon (1841-1931), ouvrage paru en 1895 et encore édité aujourd’hui. Ceux qui travaillent dans la finance adorent le citer, sans doute parce qu’il correspond à leur vision du monde. Si vous avez des opinions impopulaires, grâce à Le Bon vous vous sentez au-dessus de la populace.

En voici extrait :

"Par le fait seul qu’il fait partie d’une foule organisée, l’homme descend de plusieurs degrés sur l’échelle de la civilisation. Isolé, c’était peut-être un individu cultivé, en foule c’est un barbare, c’est-à-dire un instinctif. Il a la spontanéité, la violence, la férocité, et aussi les enthousiasmes et les héroïsmes des êtres primitifs. Il tend à s’en rapprocher encore par la facilité avec laquelle il se laisse impressionner par des mots, des images — qui sur chacun des individus isolés composant la foule seraient tout à fait sans action — et conduire à des actes contraires à ses intérêts les plus évidents et à ses habitudes les plus connues. L’individu en foule est un grain de sable au milieu d’autres grains de sable que le vent soulève à son gré".

H.L. Mencken reprend la thèse de Le Bon dans Damn! A Book of Calumny. Mencken, comme c’est souvent le cas, fait preuve de beaucoup d’esprit :

"La théorie [de Le Bon] est sans doute trop flatteuse pour l’imbécile moyen. Il explique l’extravagance des foules en partant de l’hypothèse que l’imbécile, tout comme l’homme supérieur, perd toute intelligence par suggestion — que lui aussi fait avec d’autres des choses qu’il ne penserait même pas à faire tout seul.

Certes, on peut accepter ce fait, mais le raisonnement est douteux".

Il existe toujours une minorité intelligente

Selon Mencken, dans une foule, les gens agissent de manière stupide parce que leur stupidité refoulée peut fonctionner en toute sécurité. Mais tout le monde ne perd pas son sang-froid. C’est là que Mencken met en doute la thèse de Le Bon. Il existe toujours une minorité intelligente. "En général, elle garde la tête sur les épaules", écrit Mencken, "et s’efforce souvent de lutter contre les agissements de la foule".

*** Révélation Exclusive ***

Le "plan-épargne secret" des 1%

Où les 1% les plus riches du monde placent-ils leur argent ?

La réponse n'a rien à voir avec les actions ordinaires, l'or, les options, les plans d'épargne retraite, les fonds communs de placement… et pourtant, chacun de ces placements pourrait
vous rapporter au minimum quatre fois plus que votre Livret A !

Cliquez ici pour tout savoir…

 

Sur ce point, j’ai tendance à donner raison à Mencken. Tout le monde n’a pas été dupe lors de l’engouement pour les subprime. En effet, certains ont vu les problèmes assez rapidement. (Et encore moins nombreux sont ceux qui ont fait de gros bénéfices lorsque tout s’est effondré). Tout le monde n’a pas été dupe des valeurs internet avant 2000. Il y a toujours eu quelques sages qui tirent le signal d’alarme lorsque commence le temps de la folie.

Je me tourne à présent vers deux excellents investisseurs qui eux n’ont jamais perdu leur sang-froid : Seth Klarman chez Baupost Group et Paul Singer chez Elliott Associates. J’ai lu les lettres trimestrielles que tous deux ont publiées fin avril et dans lesquelles ils tirent la sonnette d’alarme.

▪ Comment s’assurer de bonnes performances à long terme
"C’est lorsqu’il semble être le plus facile d’investir que c’est en fait le plus difficile", écrit Klarman. Il dresse ensuite la longue liste des défis essentiels qui rendent cet environnement risqué — la crise de l’Union européenne, la récession au Japon et le ralentissement économique en Chine. En outre, la Fed stimule le marché et maintient des taux d’intérêt bas.

La seule manière d’avoir du rendement est d’investir en bourse. Par conséquent, on a vu toutes sortes de distorsions du fait que les investisseurs recherchaient à tout prix le rendement. On a vu l’augmentation de la valorisation de certaines sociétés en commandite, de certaines sociétés d’investissement en immobilier cotées et autres instruments générant des revenus.

La sous-performance à court terme est parfois le prix à payer pour une meilleure performance à long terme

Cependant, si vous vous montrez patient et exigeant, cela signifie probablement que vous avez pris un peu de retard par rapport au marché. C’est le cas de Klarman jusqu’ici. Mais cela ne le dérange pas. Il sait que la sous-performance à court terme est parfois le prix à payer pour une meilleure performance à long terme.

Vous devriez donc continuer à bien agir :
– Evitez l’effet de levier.
– N’achetez que des titres sous-évalués.
– Conservez moins d’actions et concentrez-vous plus sur ce qui vous plaît.

Tout cela peut conduire à une sous-performance sur le court terme… mais vous serez gagnant au final. La lettre de Klarman porte essentiellement sur l’importance de garder une discipline et de se montrer patient face à ce type de marché.

Klarman a rédigé une lettre dense de cinq pages ; Paul Singer, lui, a publié un véritable traité de 21 pages (lui aussi a été suiveur du marché cette année.) Mais les thèmes étaient remarquablement semblables. Les marchés sont trop optimistes, avec beaucoup de risques et de problèmes. Singer porte un regard pessimiste sur l’Union européenne, les politiques de la Fed etc. Ce qui est certain, c’est que Singer n’aime pas ce qu’il voit.

Singer s’excuse presque d’aborder ces sujets. "Nous ne nous plaignons pas", écrit-il, "nous ne faisons que décrire un environnement assailli par des investisseurs complètement désorientés, gravement déformé par la politique gouvernementale et guidé par des flux d’argent qui suivent des reportages hyperboliques et des thèmes à la mode des maisons de courtage".

Ces deux investisseurs ont une longue carrière de succès sur les marchés. Lire leur lettre a eu un effet salutaire pour moi, comme si on avait remis les pendules à l’heure. Moi aussi je trouve le marché trop optimiste. Je vois que les bonnes affaires sont difficiles à dénicher. Je vois des actions que je n’ai pas achetées parce qu’elles étaient trop chères augmenter fortement aujourd’hui.

Mais je continuerai à faire preuve d’exigence et chercherai des idées d’investissement à faible risque. Si je n’en trouve pas, je ne ferai rien. Je vous avertirai également de ne pas vous laisser emporter par l’atmosphère festive du marché.

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile