▪ Ô grand oracle des marchés, quelle action dois-je acheter ? Dis-moi à quel niveau le S&P 500 finira l’année ! Et les taux, comment vont-ils évoluer, ô maître incontesté de la boule de cristal ?
Comme chaque début d’année, les médias financiers convoquent tous les stratèges, économistes ou visionnaires plus ou moins éclairés pour recueillir leurs prédictions pour l’année à venir. L’histoire prouve que ces gourous de la finance sont systématiquement à côté de la plaque. La meilleure solution : faire l’inverse de ce qu’ils recommandent.
Pour devenir gourou, c’est simple : il suffit d’être interviewé par Bloomberg ou passer sur CNBC. Si possible plusieurs fois par jour — les gens se souviennent mieux. Puis tout s’enchaîne : la gloire, la respectabilité, les invitations aux plus beaux cocktails, où ils sont systématiquement entourés de curieux admiratifs à l’affût d’un conseil boursier gagnant.
Ce qui compte pour un gourou, c’est sa force de conviction. Ce qu’il dégage. Ses pronostics ? Tout le monde les aura oubliés dès le soir même. C’est d’ailleurs la grande chance de ces habitués des plateaux de TV : personne, pas un journaliste, ne semble conserver une trace de leurs prédictions. C’est sûr que ça facilite la vie, pour les gourous.
Car si on les enregistrait et qu’on n’égarait pas les enregistrements (c’est beaucoup demander à un journaliste, je sais), on découvrirait que ces soi-disant experts se trompent la majorité du temps.
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+182% de performance cumulée depuis le 1er janvier 2011… 75% de recommandations gagnantes sur la même période… des gains de 49,6%, 23%, 30,5%, 31% en deux jours maximum par transaction…
Quelle forme d’investissement permet des performances aussi spectaculaires ?
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Entre 2001 et 2004, les actions recueillant le plus de recommandations de vente par les analystes de Wall Street ont toujours figuré au sommet des palmarès de fin d’année. Oui, les titres que les « spécialistes » conseillaient de vendre ont surperformé.
A la même époque, le magazine Money, sur CNN, avait demandé à ses 24 meilleurs gérants de sélectionner leurs titres favoris. Performance du portefeuille ainsi constitué : -14% par rapport au reste du marché. Et il s’agissait des gérants ayant le meilleur track record…
▪ Même pour des choses simples, ils n’y arrivent pas. Deux fois par an, le Wall Street Journal demande aux cinquante plus grands économistes américains dans quelle direction vont évoluer les taux d’intérêt, selon eux. Il ne leur demande pas de chiffres ni de timing, seulement la direction : monter ou descendre ; cela ne semble pas plus compliqué que pile ou face, avec 50% de chances de chaque côté.
Ces professeurs émérites et parfois prix Nobel tombent juste dans 30% des cas ; soit un taux de réussite très inférieur à celui du lancer de monnaie.
Ainsi, pour gagner sept fois sur dix, il suffit de faire l’inverse.
Un vrai gourou de la télé n’abat jamais toutes ses cartes. Il donne des informations incomplètes : « le Nasdaq touchera les 5 000 points », mais sans dire à quelle échéance ! Ce qui renforce les probabilités d’avoir raison.
Autre point : l’oracle des marchés prédit toujours le passé. Le gourou choisit les titres qui viennent de progresser, explique pourquoi ils l’ont fait et extrapole qu’ils vont continuer à grimper. Ce qui n’a aucun sens, mais les gens aiment se trouver du côté des vainqueurs. Même si la plupart du temps, cette technique permet d’acheter haut et de vendre bas.
Enfin, l’expert médiatique sélectionne ses points de comparaison. Il compare sa performance avec des indices qui sont peu adaptés ou pour lesquels il compte les dividendes — ou pas, sans préciser. De toute façon, les gens croiront ce qu’ils ont envie de croire.
Tout le monde sait que ces personnages sont aussi futiles qu’inutiles, mais ils continuent à être invités dans les médias. Car ils remplissent une fonction essentielle : ils apaisent notre peur du hasard. L’investisseur n’en est pas moins humain, il essaie de garder un contrôle sur les événements. Quitte à ce que ce soit de manière artificielle, en écoutant des mahatmas gominés.
Toutefois, je vais vous livrer ma prédiction pour 2011 : les personnes qui approcheront le marché à la manière des initiés siphonneront les poches des « pigeons ». C’est ainsi que la Bourse existe, et c’est ce qui me permet de garantir à mes clients une performance minimum de 60% tous les six mois sur certaines stratégies d’investissement. Je vais bientôt vous parler d’une conférence exclusive que je vais donner à Paris en avril : restez attentif, parce que les places sont extrêmement limitées.
[Marc Mayor est le fondateur et président d’Inside ALPHA, une entreprise helvétique spécialiste des approches financières éliminant le risque de marché (investissements dits « ‘neutres au marché »). Depuis plus de dix ans, Marc analyse avec humour et sagacité le comportement des initiés de la Bourse, notamment dans les colonnes de sa rubrique hebdomadaire « Le Coin des Insiders »‘, qui paraît chaque vendredi dans le quotidien financier L’Agefi (Suisse). Marc Mayor met également toute son expertise financière, ses analyses et ses recommandations au service des investisseurs particuliers dans le cadre de sa lettre d’information, La Lettre de Marc Mayor]
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