La Chronique Agora

Comment déformer des chiffres

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Ou comment les autorités manipulent les statistiques pour faire des ravages dans l’économie…

« Les marchés baissiers prennent leur temps. Ils offrent également d’innombrables occasions de perdre de l’argent. Chaque rebond est l’occasion pour les investisseurs d’acheter au plus haut pour pouvoir ensuite vendre au plus bas. »
~ MN Gordon

« Voici un article paru dans Le Figaro », a rapporté Elizabeth avec entrain. « Une femme a été retrouvée découpée en morceaux dans un congélateur, dans le 9e arrondissement de Paris. Son mari a été arrêté. »

« Mince, je suppose que Paris n’est plus si sûr », a répondu un autre membre de la famille en entendant la nouvelle.

Votre correspondant en a profité pour introduire une analyse statistique dans la conversation : « Attendez un peu. Il y a au moins 1 million de femmes qui vivent à Paris… Les chances de se faire tailler jusqu’à la moelle sont donc très faibles. »

« Sauf si vous vivez dans le 9e arrondissement de Paris », a suggéré Elizabeth.

« Ou alors, si vous êtes mariée à un type qui découpe sa femme », avons-nous répondu.

Manipuler, déformer… et détruire

En quelques phrases, nous avions identifié le problème des statistiques. Un peu utiles, un peu trompeuses et un peu mensongères, elles représentent toujours une menace. Le ratio femmes massacrées/population est intéressant. Mais pas vraiment très utile pour la victime.

Warren Buffett a fait la même remarque dans son célèbre discours tenu à Sun Valley, en 1999 ; c’est le cas particulier qui compte :

« La clé de l’investissement ne consiste pas à évaluer l’impact d’un secteur sur la société ou sa croissance, mais à déterminer l’avantage concurrentiel d’une entreprise donnée et, surtout, la durabilité de cet avantage. Les produits ou services qui bénéficient d’un avantage large et durable sont ceux qui rapportent aux investisseurs. »

La semaine dernière, nous avons exploré les chiffres utilisés par la Fed pour manipuler, déformer et détruire l’économie américaine. Aujourd’hui, nous lisons les médias et nous nous demandons où se trouvera le prochain corps démembré.

Benzinga rapporte :

« L’ancien secrétaire au Trésor Lawrence Summers aurait souligné l’absence d’exemples passés dans lesquels les Etats-Unis auraient réussi à éviter une récession lorsque le taux de chômage était inférieur à 4% et que l’inflation dépassait les 4%.

‘C’est une vérité historique puissante et je pense que pertinente pour analyser notre situation actuelle’, a déclaré M. Summers. »

Plus haut, plus longtemps

Lundi, nous avons affirmé que l’inflation était désormais « intégrée » dans le système. Comme une mauvaise herbe dans un jardin, elle va pousser jusqu’à ce qu’elle soit arrachée. La Fed est sur le coup. Voici les dernières nouvelles de Bloomberg :

« L’indicateur d’inflation privilégié par la Fed s’accélère, ce qui pourrait les contraindre à monter les taux à nouveau.

L’indice des prix à la consommation a augmenté de 5,4% par rapport à l’année précédente, et l’indice core a augmenté de 4,7%, ce qui marque une reprise après plusieurs mois de baisse. Les dépenses liées à la consommation, ajustées en fonction des prix, ont augmenté de 1,1% par rapport au mois précédent, ce qui représente la plus forte hausse depuis près de deux ans, après plusieurs baisses consécutives. »

Et ce n’est pas tout… Bloomberg poursuit :

« La Fed pourrait devoir augmenter les taux à 6,5% pour refroidir les prix, selon une étude.

Dans une analyse présentée vendredi lors d’une conférence à New York, cinq économistes et universitaires de Wall Street soutiennent que les décideurs politiques ont encore des perspectives trop optimistes, et qu’ils devront vraiment faire souffrir l’économie pour que les prix se stabilisent. »

Ah oui ? La Fed devra peut-être aller encore plus haut. Voici ce que rapporte Research Affiliates :

« Compte tenu du récent taux d’inflation américain, qui a été supérieur à 6% au cours des 12 derniers mois et supérieur à 8% au cours des 7 derniers mois, l’histoire nous dit que le nombre médian d’années pour ramener l’inflation en dessous de 3% est de 10 ans, avec une fourchette du 20e au 80e percentile de 6 à 19 ans. Combien d’économistes – sans parler des experts et des spécialistes en politique publique – ont suggéré que nous pourrions avoir une inflation élevée seulement pendant six ans, voire bien moins ?

[…] Voilà pour les bonnes nouvelles. La mauvaise nouvelle, c’est qu’à 6% d’inflation ou plus, le scénario dans lequel nous pourrions avoir atteint le pic de l’inflation devient l’exception, et non la règle : l’inflation se dirige généralement vers le seuil supérieur. Lorsque l’inflation atteint ce seuil supérieur, on constate une accélération de l’inflation. En effet, une fois le seuil de 8% dépassé, comme cela s’est produit cette année aux Etats-Unis et pour une grande partie de l’Europe, l’inflation a atteint le niveau suivant, et souvent bien au-delà, dans plus de 70% des cas.

La leçon que nous devons en tirer n’est pas que l’inflation est destinée à atteindre de nouveaux sommets dans les mois à venir (après tout, dans près de 30% des cas, elle a atteint son pic !), mais que nous rejetons cette possibilité à nos risques et périls.

[…] Est-il possible que l’inflation recule à 4%, puis à 2% au cours des deux prochaines années ? Bien sûr que c’est possible ! L’histoire dit que c’est peu probable. Nos politiques fiscales et monétaires ont fait beaucoup plus de mal que de bien ces dernières années. »

Face ils gagnent, pile vous perdez

En d’autres termes, l’inflation n’est pas près de disparaître. Quand elle dépasse les 8%, elle augmente généralement. La Fed le sait très bien. Alors, maintenant – avec ses nombreuses obsfucations statistiques et ses délires idéologiques – elle s’engage à continuer à augmenter les taux. Cela entraînera inévitablement une baisse des cours boursiers, une hausse des rendements obligataires et une récession.

Pour faire court, la Fed doit continuer à augmenter les taux jusqu’à ce que l’une des deux choses suivantes se produise : soit le taux d’inflation chute (en dessous du taux directeur de la Fed)… soit les taux d’intérêt plus élevés provoquent une rupture quelque part… et la Fed panique.

Nous pensons que la deuxième hypothèse se produira avant la première.

Dans ce cas, la situation va s’aggraver, pendant très, très longtemps.

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