La Chronique Agora

Cinq règles pour l'investisseur par la valeur

** J’ai lu le nouveau livre de Marty Whitman, Distress Investing ["L’investissement en période difficile", ndlr.]. Le livre parle d’investissement dans des situations complexes qui peuvent nécessiter une réorganisation, parfois par le biais d’un processus de faillite.

– L’un des chapitres aborde les moments où vous risquez de faire face à des mauvais fonctionnements, ou à des erreurs de valorisation boursière. C’est intéressant d’y réfléchir en tant qu’investisseur, pour pouvoir trouver ces points faibles où les Bourses font de grosses erreurs de valorisation. Certains marchés fonctionnent bien et sont difficiles à battre. D’autres fonctionnent moins bien.

– Les marchés ont tendance à mal fonctionner quand…

• La situation est complexe.

• L’horizon temps, pour un profit, est plus long, et non plus court.

• Les participants ne sont pas suffisamment sophistiqués ou utilisent de l’argent emprunté.

• Les forces extérieures sont faibles (par exemple, quand les liquidités sont basses).

– Même dans des situations simples, les marchés peuvent aussi très mal fonctionner. "Les marchés actions peuvent avoir de gros problèmes de fonctionnement", écrit Whitman, "même si l’analyse est simple et que peu de variables sont à prendre en compte".

– En ce qui concerne le délai et les participants, Whitman maintient qu’un analyste bien formé et informé — et qui n’est pas influencé par les oscillations des prix sur le court terme — peut facilement mettre le doigt sur ces problèmes de fonctionnement. Quelqu’un de peu sophistiqué, qui utilise de l’argent emprunté et qui laisse les mouvements des prix sur le court terme influencer son jugement va avoir beaucoup plus de mal.

– La raison pour laquelle l’argent emprunté peut être un problème, c’est que si vous empruntez de l’argent pour acheter des actions, vous vous mettez en quelque sorte à la merci du marché. Une action qui perd temporairement la moitié de sa valeur devient donc un problème pour vous et pourrait vous forcer à partir à un mauvais moment.

** Un autre chapitre qui vaut le coup d’être présenté, c’est celui qui concerne le risque. Tout d’abord, Whitman vous livre un secret qui est apparemment considéré comme faux par la plupart des investisseurs. "Le secret, pour construire une grande fortune, c’est d’éviter tant que possible de prendre des risques". Si vous étudiez les grands entrepreneurs, vous verrez qu’ils ont souvent pris des risques très limités. La plupart des investisseurs qui réussissent cherchent eux aussi à réduire les risques autant que possible, tout en conservant le potentiel de hausse. Comment s’y prennent-ils ? Whitman propose cinq suggestions.

– 1) Achetez bon marché. En tant qu’investisseur extérieur, vous vous protégez en achetant bon marché. Whitman fait remarquer que Buffett aime à dire qu’il veut acheter des grandes entreprises à un prix raisonnable. Mais Buffett investit pour contrôler — ce qui signifie qu’il a souvent de l’influence sur les entreprises dans lesquelles il investit. En tant qu’investisseur minoritaire extérieur passif (IMEP), vous n’avez pas cette influence. Par conséquent, les grandes entreprises à un prix raisonnable, ce n’est "pas assez bien".

– Whitman écrit : "les IMEP doivent laisser les entreprises en l’état, et donc accorder une attention particulière à l’achat d’entreprises bien gérées avec des dirigeants stables mais clairement supérieurs".

– Acheter bon marché est la meilleure protection que vous puissiez avoir en tant qu’investisseur dans les actions ordinaires.

– 2) N’achetez que quand les conditions financières sont excellentes. Whitman écrit que vous ne devriez pas "acheter d’actions ordinaires de n’importe quelle entreprise à moins que cette entreprise ne soit dans des conditions financières très solides". Une condition financière solide vous fournit simplement une marge d’erreur. Difficile de faire faillite quand vous êtes dans d’excellentes conditions financières. De plus, il faut que ce soit une entreprise compréhensible, qui communique bien. Cela vous permettra de ne pas vous faire avoir.

– 3) Ignorez les risques du marché. Whitman pense que les changements dans les prix du marché ne sont pas des mesures du risque ou du potentiel de l’investissement à long terme. C’est ce qui est le plus difficile à surmonter pour la plupart des gens. Mais la majorité des grands investisseurs accordent peu de poids aux changements de prix quotidiens, ou même annuels.

– 4) Achetez de la croissance, mais ne la payez pas. Les investisseurs s’en sortent mieux s’ils parient sur des entreprises qui peuvent grandir au fil du temps. Pourtant, la croissance est souvent mal utilisée par les gens de la finance. "La plupart des participants aux marchés ne parlent pas de croissance banale", explique Whitman, "mais plutôt d’une croissance reconnue globalement". C’est le genre de croissance pour laquelle il vous faut payer. Whitman préfère les entreprises en croissance qui ne sont pas reconnues par tous, et peuvent donc se révéler être de bonnes affaires.

– 5) Ne vendez pas trop vite. C’est généralement une bonne idée d’être un investisseur qui achète pour le long terme. Si vous faites tout le travail correctement en aval, vous pouvez continuer à conserver une action tant que votre thèse initiale est intacte. L’idée assez simple que je vous présente ici, c’est que si vous avez trouvé une perle, il ne faut pas vouloir la vendre. Cette idée fonctionne. Il se peut que cela ne sonne pas comme un bon conseil après 2008, mais les bonnes entreprises augmentent la valeur de leurs capitaux nets au fil du temps. Le temps est un ingrédient important dans la création de la valeur d’un investissement.

– Le bon moment pour vendre, c’est quand vous avez fait une erreur. Whitman écrit qu’une erreur peut provenir d’affaiblissements fondamentaux — comme une dégradation du crédit qui signifie qu’une entreprise ne pourra plus faire à l’avenir à ce qu’elle a fait par le passé. Vendez aussi quand une action devient très surévaluée. Et enfin, vendez pour des raisons liées à votre portefeuille — comme par exemple les impôts.

– Pour résumer, Whitman met le doigt sur deux idées importantes pour que les investisseurs puissent augmenter leurs bénéfices. Tout d’abord, concentrez-vous sur les marchés et les situations dans lesquels vous pouvez remarquer les mauvais fonctionnements. Ensuite, essayez de réduire vos risques d’investissement. Ces deux règles simples peuvent vous rapporter de bons rendements sur investissement… tout en vous mettant à l’abri.

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