▪ Dans le monde, on estime entre 119 et 224 millions le nombre de consommateurs réguliers de cannabis (chiffre datant de 2010). En 2007, environ 25 millions d’Américains en auraient consommé au cours de l’année. Soit 10% de la population âgée de 12 ans ou plus. Evidemment, ces chiffres sont à prendre avec des pincettes. De même que celui du chiffre d’affaires estimé d’une telle consommation. Manuel Valls estimait ainsi à un milliard d’euros le chiffre d’affaire généré par le trafic de cannabis en France. Aux Etats-Unis, le trafic de drogue (toutes drogues confondues) atteindrait les 63 milliards de dollars.
Selon Arcview, une plateforme d’information sur l’investissement dans l’industrie du cannabis, le marché américain du cannabis légal représentera 2,5 milliards de dollars cette année, et neuf milliards dans deux ans. Des perspectives qui ont de quoi aiguiser les appétits.
Tout est bon pour profiter de l’engouement des consommateurs pour le chanvre |
Il y a quelques jours, je disais aux lecteurs de La Quotidienne de la Croissance qu’environ 250 sociétés américaines s’étaient lancées dans le secteur du cannabis. Parmi elles, bien sûr des producteurs de la plante, mais aussi de divers produits dérivés — parfums, boissons, produits alimentaires… tout est bon pour profiter de l’engouement des consommateurs pour le chanvre.
▪ Effervescence boursière autour du cannabis
La ruée vers le secteur s’observe dans les cours des sociétés spécialisées dans le cannabis. Entre le 1er janvier et le 5 février 2014, le cours de Hemp s’est envolé de 1 400%, passant de 0,02 $ à 0,3 $. Oui, je sais, c’est complètement fou. Depuis, la frénésie s’est largement calmée et la valeur ne vaut plus que 0,04 $, ce qui fait tout de même 100% de progression.
MADE IN EUROPE ! |
D’autres valeurs connaissent un parcours plus chaotique — tel Medical Marijuana, qui a perdu 361% depuis son introduction en Bourse en 2010 et 15% depuis le début de l’année.
Comment expliquer une volatilité et de tels emballements (à la hausse aussi bien qu’à la baisse) ?
La première raison tient tout d’abord à l’origine de la plupart de ces sociétés ainsi qu’à leurs dirigeants.
Quand l’opportunisme est roi
Rares sont les entreprises qui peuvent se targuer d’un intérêt de longue date pour le chanvre et ses dérivés. La plupart d’entre elles ont même effectué des reconversions d’activités qui ont vraiment de quoi laisser songeur.
Hemp Inc, dont j’évoquais plus haut le parcours boursier, se consacrait au départ à la culture du café |
Vapor Group était ainsi auparavant connu sous le nom d’AvWorks Aviation et spécialisait alors dans l’aviation (d’où son nom). Hemp Inc, dont j’évoquais plus haut le parcours boursier, se consacrait au départ à la culture du café — à la limite le lien avec le cannabis est un peu moins tiré par les cheveux. PetroTech Oil and Gas… là encore, comme son nom l’indique était une exploratrice dans le domaine des hydrocarbures et Next Gen Metals dans… l’activité minière. Ce ne sont là que quelques exemples que j’ai tiré du Financial Times qui a consacré une enquête à ce sujet mais ils pourraient être multipliés.
Ces sociétés, qui n’avaient manifestement pas particulièrement réussi dans leur premier domaine d’activité, ont soit changé de nom soit tout simplement de raison sociale, transformant ainsi une minière en un producteur de cannabis. La magie des effets du chanvre peut-être…
Du côté des dirigeants et des premiers investisseurs de ce secteur, là encore un rapide tour d’horizon pourrait transformer une simple promenade de santé en une immersion dans "Crime City".
Ceux d’entre vous qui auraient envie de se plonger dans le milieu des petits et grands malfrats qui espèrent toucher le jackpot dans le business du cannabis légal, je ne peux que vous conseiller la lecture de l’étonnant portrait que Forbes consacre à Michael Mona Jr., le fondateur de CannaVest, une des sociétés dont le cours s’est littéralement envolé ces derniers mois.
Si après cette édifiante lecture, vous avez encore envie d’y mettre un euro ou un dollar, c’est que vous avez le coeur bien accroché.
Comme le soulignent aussi bien Forbes que le Financial Times, nombre de dirigeants et d’investisseurs dans les entreprises du cannabis légal viennent, au mieux, du monde du cannabis illégal voire du crime organisé. Ce n’est évidemment pas le cas pour tous mais comment imaginer que les réseaux de la drogue allaient laisser s’échapper cette poule aux oeufs d’or qu’est la vente de marijuana ?
Ces sociétés pâtissant — à tort ou à raison — de leur sulfureuse réputation, elles ont du mal à accéder aux mêmes réseaux et services que les entreprises plus "traditionnelles". Obtenir un prêt d’une banque s’avère souvent un véritable parcours du combattant pour elles.
Nombre de ces entreprises qui ont poussé comme des champignons après la pluie ont une démarche purement opportuniste |
▪ Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
Vous l’aurez compris, la plupart des entreprises qui se sont spécialisées dans le secteur du cannabis s’avèrent être des investissements particulièrement risqués. Nombre de ces entreprises qui ont poussé comme des champignons après la pluie ont une démarche purement opportuniste qui ne laisse rien présager de bon pour les investisseurs qui seraient tout de même tenter par l’aventure — elles pourraient disparaître aussi vite qu’elles sont apparues.
N’oubliez pas non plus que la plupart d’entre elles étant cotées en OTC, elles ne sont pas soumises aux mêmes obligations de publications de résultats que des entreprises cotées sur des marchés réglementées. Investir sur ces valeurs s’apparente donc à une véritable roulette russe.
Cependant, car je vous sens un peu désappointé, cher lecteur désireux de vous encanailler avec des investissements un peu borderline, voici quelques pistes pour investir avec plus de sagesse dans le domaine :
– Les fournisseurs de matériel nécessaire à la culture de la marijuana : systèmes d’irrigation, fertilisants et engrais, installation de lumière artificielle. Parmi eux, par exemple, le producteur d’engrais Potash Corp. pourrait voir ses ventes de potasse — un des composants essentiels des engrais — stimulées par le développement de la culture de plans de cannabis.
– Les entreprises pharmaceutiques qui mènent des recherches sur le cannabis et ses composants actifs pour proposer de nouveaux médicaments.
[Dans NewTech Insider, Ray Blanco vous propose chaque mois des entreprises pharmaceutiques et des biotechs innovantes qui mènent des essais pour des médicaments révolutionnaires aussi bien contre des maladies chroniques que contre les grandes maladies de notre époque : maladies neuro-dégénératives, hépatites, infections multi-bactériennes… Rejoignez le rang de ceux qui vont changer notre vision de la maladie en découvrant les recommandations de Ray dans NewTech Insider !]
Une dernière mise en garde qui concerne toutes les valeurs que je viens d’évoquer : leur croissance future dépend énormément de la législation américaine. Les producteurs font le pari que d’autres Etats autoriseront la consommation médicale et/ou récréative de la marijuana dans les années à venir. Comme je le disais, c’est un pari — qui peut être manqué.