▪ Nous le pressentions, beaucoup voulaient voir ça une fois dans leur vie de trader… Eh bien ce fut fait et fort bien fait puisque le CAC 40 a inscrit une huitième séance de hausse consécutive grâce à un gain de… 0,5 point d’indice — soit 0,0015% mais le ticker du CAC 40 ne va pas en-deçà de la deuxième décimale.
Voici un nouveau triomphe de la programmation algorithmique et même un double exploit (deux pour le prix d’un, le Père Noël nous gâte) avec la matérialisation de la plus longue série haussière pour un début de mois boursier et record absolu de 16 hausses sur une série de 18 séances.
Les programmeurs (ou « superviseurs ») de tendance n’ont pas chômé. Ils ont emprisonné le CAC 40 dans une camisole algorithmique durant plus de neuf heures, avec 95% des échanges conclus entre 3 640 et 3 650 points, dans des volumes toujours aussi dérisoires de deux milliards d’euros.
▪ On attend toujours les acheteurs dans le train de la hausse du CAC 40
Notez que contrairement aux dires d’une cohorte de gérants et stratèges qui reprennent en boucle le même discours pré-formaté (nous tentons de savoir qui en est à l’origine), il n’y a toujours pas le moindre signe détectable d’une vague d’achat de retardataires à l’horizon.
Il serait temps qu’ils se réveillent après un rally de 9,1% (ou 310 points) par rapport aux planchers du 16 novembre. Il ne leur reste plus que six séances pour faire le plein avant le vendredi des Quatre sorcières du 21 décembre.
Soit ils sont vraiment distraits… soit ces régiments d’acheteurs prêts à voler au secours de la victoire ne sont que des fantômes nés de l’imagination de ceux qui ne savent plus comment justifier d’avoir attendu le débordement des 3 600 points pour payer le marché. En d’autres termes, ils supposent qu’il y a plus stupide qu’eux et que de surcroît, ils sont très nombreux.
Ce n’est pas très flatteur pour la profession !
Si vous les écoutez, ils sont tous acheteurs depuis le retournement (en fausse sortie baissière) du 19 novembre. Ce n’est pas forcément de la forfanterie mais c’est probablement un mensonge par omission dans la mesure où 90% des gérants font de la gestion benchmarkée.
Si le CAC 40 prend quelques points ou grimpe brusquement, les logiciels achètent automatiquement des futures (contrats à terme) pour répliquer mécaniquement la hausse de l’indice.
Certains ont peut-être effectivement renforcé les portefeuilles au nom d’une logique stratégique mûrement réfléchie. Les autres ont en général laissé travailler leurs ordinateurs et se désintéressent largement de la psychologie du marché.
Une psychologie qui a bon dos lorsque 90% des ordres transmis sur les plates-formes de cotation le sont par des robots. Ces derniers sont nourris d’algorithmes de plus en plus complexes qui identifient des séquences graphiques et des concordances entre de multiples classes de dérivés afin d’exécuter des allers-retours sur des échelles de temps qui échappent même aux caméras à grande vitesse.
▪ Non, l’analyse technique n’est pas morte
C’est en partie l’algotrading, en partie l’ultra-rapidité qui entraînent la « perte de sens » dans la formation du cours d’un actif quel qu’il soit : l’analyse technique n’est pas à jeter aux orties.
Il y a 25 ans, lorsque j’ai fait mes premiers pas en Bourse, ça cotait encore à la criée, sauf sur une courte sélection de titres servant de support aux options.
J’ai été l’un des premiers arbitragistes à utiliser intensivement les graphiques et les chandeliers japonais.
Nous ne devions pas être plus de 5% d’opérateurs à recourir à cet outil et 80% des professionnels — qui étaient plutôt fondamentalistes — connaissaient les entreprises sur le bout des doigts. Moi qui ne connaissais pas le passé boursier des stars de la cote, j’avais été séduit par des méthodes qui me permettaient d’anticiper de nombreux mouvements par le biais de l’approche psychologique et technique du marché.
Mais 25 ans plus tard, la proportion s’est complètement inversée. 80 à 90% des opérateurs et presque 100% des day traders s’en remettent à ce que beaucoup de nos lecteurs nomment péjorativement des robots… ou des bots.
Ces derniers auraient pour seule vocation d’analyser la psychologie des 5% d’opérateurs qui agissent encore en pleine conscience ! Ils n’analysent plus que leurs propres algorithmes en essayent de devancer le « coup suivant » de leurs rivaux, et c’est la clé de tout !
Mieux, c’est devenu l’alpha et l’oméga, surtout depuis 2004/2005 et l’apparition de HFT (high frequency trading).
▪ Profession de foi d’un trader (à l’ancienne)
La première chose que j’avais apprise au milieu des années 80 en découvrant les charts, c’était la profession de foi du trader. Elle était sensée dans la mesure où le postulat « tout est dans le cours » reflétait une réalité pertinente (même faussée par une part de désinformation).
Cette profession de foi, désormais traduite en algorithmes, est aussi respectée que le code de programmation des robots d’Isaac Asimov.
Règle numéro 1 : je ne m’intéresse qu’à la tendance, je m’interdis de me laisser distraire ou polluer par l’actualité.
Règle numéro 2 : je ne suis ni haussier ni baissier, je me laisse porter par la tendance, je ne cherche surtout pas à déterminer ce qui la justifie. Ainsi, j’achète sans appréhension, je coupe mes pertes sans regret.
Règle numéro 3 : chaque séance est une nouvelle séance… et rien d’autre ne compte que la tendance (retour à la règle numéro 1).