La Chronique Agora

Un bouillon empoisonné

Fed, Janet Yellen, crise, secteur bancaire

Préparé par de mauvais cuisiniers utilisant des ingrédients mortels… et beaucoup trop de liquidités…

« Dirais-je qu’il n’y aura jamais plus la moindre crise financière? Vous savez, ça serait probablement aller trop loin, mais je pense que nous sommes bien plus en sécurité, j’espère que ce ne sera pas de notre vivant, et je ne crois pas que ça le sera. »
~ Janet Yellen, 20 juin 2017

Selon une étude récente, le système bancaire américain – fortement réglementé par Janet Yellen, ses prédécesseurs et ses successeurs – est confronté à des pertes énormes.

Nous ne sommes pas des experts en matière bancaire, mais nous pensons avoir compris le modèle de base. Les banques reçoivent l’argent des déposants et le « prêtent » ou l’« investissent ». Les déposants peuvent exiger de récupérer leur argent à tout moment. Mais les emprunts et les investissements ne sont remboursés que lorsqu’ils sont prêts. Entre les deux périodes, qu’elles soient longues ou courtes, les banques peuvent être prises à la gorge… si les déposants demandent soudainement à récupérer leur argent. Les banques centrales ont été créées pour éviter cela. En cas de crise, elles fournissent des liquidités aux banques solvables.

Mais que se passe-t-il si les banques ne sont pas solvables ? Que se passe-t-il si leurs « actifs » – prêts et investissements – diminuent ? Que se passe-t-il si elles ont prêté de l’argent à un taux d’intérêt de 3%… et que les taux d’intérêt passent ensuite à 5% ? Que se passe-t-il si leurs investissements – par exemple dans Amazon ou Rivian – perdent tellement de valeur que les banques ne peuvent plus rendre leur argent aux déposants ?

Fauchés et brisés

Voici le point de vue des chercheurs universitaires Erica Jiang, Gregor Matvos, Tomasz Piskorski et Amit Seru :

« La valeur de marché des actifs du système bancaire américain est inférieure de 2 000 Mds$ à ce que suggère leur valeur comptable. »

La valeur nette (comptable) de l’ensemble du secteur bancaire américain n’est que de 2 100 milliards de dollars. En d’autres termes, l’ensemble du système bancaire est déjà presque insolvable. En faillite. Fauché.  Vous pouvez imaginer ce qui se passerait si les actions baissaient encore de 10 %… 20 %….ou 40 %.

Personne ne suggérerait de subventionner les plombiers qui installent des tuyaux qui fuient, ni d’accorder des subventions aux restaurants qui rendent leurs clients malades… mais ces professions n’ont pas de lobbyistes !

Pour résumer ce qui va suivre : mieux vaut garder le smecta à portée de main.

Les banques qui ne peuvent pas gérer leurs risques… et faire correspondre leurs actifs à leurs passifs… constituent une menace pour leurs déposants. Comme un cochon atteint d’une épizootie, il faudra peut-être les abattre avant qu’elles n’infectent tout le troupeau.

Les clients ne meurent pas de faim parce qu’un mauvais restaurant fait faillite. Ils se rendent simplement dans un autre restaurant. Ils ne souffrent pas non plus de la faim lorsque les aliments toxiques sont retirés des épiceries. La vie continue, et mieux qu’avant.

Cuisiniers et escrocs

Mais le secteur bancaire est l’un des plus riches et des plus puissants des Etats-Unis. Il stocke l’argent… et l’argent est ce qui fait tourner le monde. L’argent est aussi ce que les riches et les puissants convoitent… et ce qu’ils ont confié aux banques pour qu’elles le conservent pour eux. Les banques sont également protégées par les banques centrales, qui peuvent « imprimer » de l’argent.

Ainsi, pour éviter de payer l’enfer, les banques centrales du monde entier conspirent avec les grands déposants pour garantir les pertes. Les banques jugées « d’importance systémique » sont renflouées.

Quelles banques sont « d’importance systémique » ?

Celles qui ont les pires cuisiniers !

Dans le cas du Credit Suisse, la banque a perdu 143 Mds$ l’année dernière, un record. Elle a investi dans des opérations stupides et des actifs surévalués… et a prêté de l’argent à des taux d’intérêt sous-évalués. Puis, lorsque les taux d’intérêt ont augmenté et que les prix des actifs ont chuté, le Credit Suisse n’était plus viable.

C’est ainsi que les choses sont censées fonctionner. Si vous commettez trop d’erreurs, vous perdez. Mais dans le nouveau monde des marchés administrés et des finances contrôlées par les gouvernements, les règles ont changé : vous faites des erreurs, quelqu’un d’autre paie.

Le secteur bancaire qui a connu la plus forte croissance au cours des dix dernières années est celui de l’immobilier commercial. A la Bulle Epoque, il était payant d’emprunter de l’argent à des taux d’intérêt très bas – auprès des banques – pour acheter des immeubles commerciaux.

Mais ensuite, que s’est-il passé ? Dans un premier temps, les prix ont bien augmenté et les spéculateurs ont gagné de l’argent. Cependant, à l’arrivée de l’hystérie du Covid, les paris ont mal tourné. Les immeubles se sont vidés. Et encore trois ans après le décret d’urgence de Trump, ils sont loin d’être revenus à la normale. Nos employés à Baltimore, par exemple, ont appris à travailler depuis chez eux. Ils ne veulent pas revenir au bureau. Par conséquent, nous détenons certains bâtiments qui sont à moitié vides… et d’autres qui sont complètement vides.

Nous n’avons pas d’hypothèques sur ces propriétés… ni de prêts les utilisant comme collatéral. Mais qu’en est-il de ceux qui en ont ?

Une leçon de vie importante

Le taux préférentiel a doublé depuis 2021. Les investisseurs immobiliers doivent désormais payer deux fois plus d’intérêts qu’il y a deux ans. Et leurs revenus locatifs diminuent, car les locataires négocient pour obtenir moins d’espace à des prix plus bas. Les taux de vacance des bureaux augmentent. A San Francisco, près d’un tiers des bureaux sont vides. A l’autre bout du pays, à Manhattan, le taux d’inoccupation des bureaux a grimpé à 22%.

La situation n’est pas bonne pour les banques qui détiennent des prêts destinés à l’immobilier commercial. Leurs garanties perdent de la valeur alors que leurs emprunteurs peinent à rembourser ou à refinancer leurs prêts.

Mais aucun examen de la crise bancaire de 2023 ne serait complet sans mentionner Janet Yellen, Ben Bernanke et les autres cuisiniers fous qui ont ajouté de la salmonelle au bouillon au cours des 14 dernières années. Ce sont eux qui ont rendu irrésistible le fait de prêter de l’argent à des taux d’intérêt incroyablement bas. Le taux préférentiel susmentionné, en 2021, était en fait inférieur de 3,5% à la hausse des prix à la consommation. James Freeman détaille la situation dans le Wall Street Journal :

« La vie semble nous avoir donné une leçon parfaite sur le caractère destructeur de la réglementation gouvernementale avec la faillite de la Silicon Valley Bank… Mais ce n’est pas la direction de la banque, ni Dieu qui a créé l’environnement financier plus large, qui a ébranlé l’institution.

Pour cela, nous pouvons remercier le Washington officiel pour les calamités politiques, à commencer par les règles bancaires, les distorsions économiques massives des politiques de fermeture de Covid, et l’inflation créée par les démocrates de Biden et la Réserve fédérale. »

Oui, la vie nous propose une autre leçon. Les mauvaises banques seront subventionnées. Le public sera puni.

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