La Chronique Agora

Le Bitcoin explose mais Carl Icahn refroidit les marchés

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▪ Le Dow à 16 000 points… Bacon à 142 millions de dollars… le Bitcoin à 620 $ (contre 300 lundi dernier)… C’est vraiment l’embarquement immédiat sur la Nef des Fous.

Hier marquait l’entame du terme boursier de décembre. Les opérateurs voyaient déjà les marchés s’enflammer de plus belle dans le cadre des préparatifs de Thanksgiving, à J-10 de l’évènement.

Les consommateurs doivent se sentir riches (surtout les 40% d’Américains qui ne détiennent pas d’actions) alors que pour les ultra-riches, c’est Noël tous les jours depuis septembre 2012 !

Ce ne sont pas les trimestriels ni une quelconque mauvaise statistique transmutée en bonne nouvelle par la magie du QE qui a euphorisé Wall Street en début de séance lundi. Pas plus que ce n’était les places européennes, qui se sont soudain envolées de 0,5% vers 11h hier matin et qui affichaient +1% en moyenne vers 15h.

La Fed a indiqué qu’elle souhaiter reporter d’une année — de juillet 2014 à juillet 2015 — l’application de la « Volcker Rule », qui visait à mieux séparer les activités banque de détail/banque d’affaires.

Ce report serait destiné à peaufiner le projet selon la version officielle… Mais chacun sait qu’il s’agit d’achever de la vider de toute substance, conformément à l’intense lobbying auquel se livre le secteur bancaire aux Etats-Unis depuis quatre ans — à coup de millions de dollars et de soutien sans faille aux campagnes des parlementaires « réceptifs » aux doléances de tous ces pauvres brasseurs d’argent, harcelés par les velléités régulatrice des ronds-de-cuir de Washington.

La Volcker Rule — à laquelle nous pouvons déjà dire définitivement adieu — avait été élaborée au lendemain du cataclysme de 2008. Son but était d’éviter que de nouveaux errements spéculatifs n’entrainent la faillite d’établissements financiers gérant des montants d’épargne très importants. Ces derniers servent aujourd’hui encore de garantie à des activités à haut risque poursuivies à l’insu des déposants.

▪ Des tweets qui tuent…
Wall Street était donc tout à son ravissement, inscrivant des records historiques en cascade, lorsque le milliardaire Carl Icahn a publié « les tweets qui tuent » (nous traduisons) :

– « Je suis très prudent sur les actions, le marché pourrait facilement connaître une grosse chute ».

– « Les résultats de nombreuses entreprises sont des mirages. Ils pourraient être nourris plus par des taux bas que par un management fort ».

C’est pratiquement mot pour mot ce que nous affirmons chaque jour, dans chacune de nos chroniques.

Nous aimons beaucoup la formule selon laquelle les profits sont des « mirages ». Idem concernant le rappel que les taux bas dopent les résultats bien plus efficacement que les super stratégies des dirigeants les plus affûtés.

▪ Les Bitcoins explosent
Cette séance de lundi restera également marquée par une nouvelle explosion spéculative de la valeur des Bitcoins. Pour rappel, il s’agit de cette fameuse monnaie électronique virtuelle et décentralisée, créée en 2009 par un as des mathématiques et des protocoles informatiques sur réseaux cryptés à accès nodal — il s’est fait connaître du grand public comme concepteur de l’architecture et du logiciel sous le pseudonyme de Satoshi Sakamoto, avant de disparaître des forums en juillet 2010.

Sa monnaie a atteint ce lundi un nouveau sommet historique à 620 $ sur le site d’échanges Mt.Gox. Elle a ensuite reperdu 15% en quelques minutes puis rebondi vers 600 $ en moins de temps qu’il n’en faut pour achever une nouvelle transaction… c’est-à-dire 10 minutes (le délai constant et incompressible lié aux exigences de sécurité de la cryptographie asymétrique).

Le Bitcoin a plus que doublé en une dizaine de jours ; il a vu sa valeur en dollar multipliée par quatre en un mois et par sept depuis début juillet.

Cependant, l’envolée des dernières heures s’apparente réellement à une « panique à la hausse » de type « tulipomania »… A la différence que l’on peut profiter du Bitcoin en toute saison pour effectuer des transactions financières et commerciales hors de contrôle des changes et de façon parfaitement anonyme (un véritable fantasme de lessiveurs d’argent sale) et qu’il n’a besoin ni d’eau ni d’engrais.

Sa valeur relative est totalement aléatoire, comme nous le constatons. Elle devient fantastiquement spéculative avec l’émergence de tout un écosystème d’options (call et put) qui rend en fait totalement impossible toute possibilité de règlement à terme d’une transaction.

En effet, un Bitcoin — ou sa plus petite subdivision au 100 millionième — vaudra toujours un Bitcoin (ou 0,0000001Btc). Mais 1 000 euros en Bitcoins le 18 novembre 2011 (il valait alors un peu moins de deux euros) sont devenus 250 000 euros ce 18 novembre 2013.

Vertigineux, non ?

Après l’introduction de Twitter à 75 fois son chiffre d’affaires… Après les 142 millions de dollars payés pour un triptyque de Francis Bacon à New York mercredi dernier (la plus gigantesque enchère jamais vue pour une oeuvre d’art)… Après avoir vu le Dow Jones à 16 030 points, le S&P 500 à 1 802, le Nasdaq à une poignée de points des 4 000 ce lundi, un DAX 30 à 9 250… Est-ce que tout ceci n’aurait pas des relents d’argent fou et de fuite en avant vers le no limit ?

Un peu comme une fusée de feu d’artifices qui décolle et s’élance vers l’infini et au-delà (selon la vision « permabullesque »)… Sauf que parvenu à environ 100 mètres d’altitude, ça fait un gros « bang » et tout se disloque en une pluie d’étoiles !

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