La Chronique Agora

De Bill Gross à Obamacare, où est passé le cynisme ?

▪ Le problème, avec la plupart des gens, c’est qu’ils ne sont pas assez cyniques. Un peu plus de méfiance… ou au moins de suspicion, combinée à un sain mépris… les aiderait à comprendre comment les choses fonctionnent vraiment.

Nous disons cela après avoir lu les derniers débats au sujet d’Obamacare.

"Des erreurs continuent d’affecter le site d’assurance santé [américain]", disait un article en première page du Wall Street Journal vendredi dernier. Dans les journaux et sur la Toile, les gens râlent et ronchonnent à propos du nouveau système de santé d’Obama. Ils ne comprennent pas comment il peut être si mal géré… si compliqué… et si incohérent en apparence.

A quoi s’attendaient-ils ? Comme tout programme gouvernemental, il n’est pas vraiment conçu pour aider quiconque à vivre plus longtemps ni pour réduire le coût des soins de santé. Les citoyens se soucient peut-être de cet aspect des choses. Mais les gens qui gèrent le gouvernement ont leurs propres motivations et desseins. Et ce ne sont pas les mêmes que les vôtres. Ils visent plutôt à satisfaire un désir plus basique du gouvernement — contrôler les gens et transférer la richesse.

Les échecs d’Obamacare n’ont peut-être guère de sens pour les gens pleins de bonne volonté. Les cyniques, en revanche, voient les choses plus clairement. Ils savent que le véritable but d’Obamacare est simplement de prendre la richesse et le pouvoir d’un groupe — le public — pour les donner aux lobbyistes qui ont écrit la législation, les politiciens et les professionnels qui vont la gérer, et les capitalistes de connivence qui en profiteront le plus.

En d’autres termes, le cynisme vous aide à relier les points.

▪ Bill Gross est-il plus cynique que nous ?
Tant que nous y sommes, nous nous tournons vers un homme qui pourtant devrait s’y connaître en cynisme — Bill Gross.

M. Gross ronchonne lui aussi. Mais pas au sujet d’Obamacare. Au sujet de la distribution inégale des richesses. Ce faisant, il rejoint une longue liste de célébrités — commençant par le pape François (nommé Homme de l’année par le magazine TIME en partie suite à ses prises de position sur le sujet) en passant par Barack Obama, Warren Buffett et bien d’autres.

Examinez cette liste d’aussi près que vous le voudrez. Vous n’y trouverez pas notre nom. Pourquoi ? Parce que la richesse des autres ne nous regarde pas. Nous laissons les conséquences se produire comme elles le veulent. Nous prenons ce que nous pouvons sans nous plaindre. En revanche, nous avons du mal quand d’autres gens pensent avoir le droit de décider à notre place ce que ce sera.

Toujours avec nous, cher lecteur ? M. Gross veut que le Congrès US mette en place un taux d’imposition plus élevé. Pourquoi ? Des impôts plus élevés sur les plus-values aideront à résoudre le problème de l’inégalité des richesses.

Personne ne sait avec certitude pourquoi les riches sont devenus à tel point plus riches. Plusieurs raisons ont été suggérées. Tyler Cowen, par exemple, déclare que l’économie américaine est devenue une "hyper-méritocratie" qui — comme au base-ball professionnel — récompense quelques lanceurs star et traite tous les autres comme des batteurs tout ce qu’il y a de plus ordinaires.

Il a peut-être raison… mais au lieu de théoriser, suivons simplement l’argent. Nous verrons que si les riches sont si riches, c’est en grande partie parce que les autorités les ont faits ainsi. Au lieu de laisser les choses suivre leur cours, le gouvernement a dirigé les flux où il le voulait — dans les poches de ses riches voisins, partisans et futurs employeurs reconnaissants.

Voici comment ça a fonctionné : la Fed a gonflé le marché boursier avec le QE et les taux zéro. La valeur totale de cette séance de gonflette — d’un plancher sous les 7 000 points pour le Dow à un sommet de plus de 15 000 points — était d’environ 8 000 milliards de dollars. Et on ne parle là que du marché boursier. Sur le marché obligataire aussi, c’est Noël tous les jours depuis 30 ans !

Qui a eu l’argent ? Les pauvres ? Oh, cher lecteur, il y a vraiment de quoi rire.

M. Gross aurait bien besoin d’une dose supplémentaire de cynisme. Le pauvre naïf pense que les personnes mêmes qui ont manipulé les événements à leur avantage les pousseront désormais vers là où il pense qu’ils doivent être — utilisant le Code des impôts pour redresser les effets pervers de leurs autres politiques.

Ou peut-être qu’il est bien plus cyniques que même nous pouvons l’imaginer. Il gère PIMCO, le plus gros fonds obligataire de la planète. Peut-être a-t-il fait ses calculs. Les autorités augmentent les prix des actifs de 10 000 milliards de dollars (dont les obligations et l’immobilier), par exemple. Ensuite, peut-être qu’ils augmenteront le taux d’imposition des plus-values… disons de 20 points de pourcentage ! Voilà qui leur enlèverait le pape des pattes. Et ils seraient encore 6 500 milliards de dollars dans le vert.

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