Les intentions des banquiers centraux réunis à Jackson Hole tiennent en haleine les investisseurs institutionnels qui sont dépendants de leurs largesses.
Nous voilà donc au J2 de la grande réunion des banquiers centraux de Jackson Hole.
Jerome Powell va-t-il faire allégeance à Donald Trump et arrêter de rendre le crédit plus cher ? C’est la jolie histoire sur laquelle brodent les journalistes.
La Fed a augmenté ses taux directeur cinq fois depuis que Trump est président et deux fois depuis que Powell a été nommé à la tête de la banque centrale américaine qui est – rappelons-le – une institution privée.
Les taux directeur fixent le prix de revient de la création de monnaie par les banques commerciales. Le système monétaire actuel repose sur le « financement par création monétaire » ou financing through money creation (FMC). Dans ce système, les crédits font les dépôts bancaires. Mais pour exercer leur privilège, les banques commerciales payent un petit quelque chose à leur banque centrale, qui est le taux directeur.
Donald Trump a déclaré ne pas être « emballé » par la politique de Jerome Powell consistant à rendre le crédit un peu plus cher. On le comprend. Toutes les entreprises de resserrement monétaire de la Fed ont immanquablement débouché sur des crises et cette fois ne devrait pas être différente. Comme Donald Trump s’attribue la bonne marche du pays, une crise n’arrangerait pas ses affaires.
La Federal Reserve d’un autre côté se doit de relever ses taux pour… mieux les baisser. A défaut, elle n’aurait plus aucune marge de manoeuvre lorsque surviendra le prochain ralentissement et qu’il lui faudra protéger les établissements financiers.
Comme le décrit Bill Bonner, la Fed répète inlassablement ses trois erreurs :
Erreur n°1 (laisser les banques prêter trop d’argent à des taux trop bas pendant trop longtemps)… Erreur n°2 (augmenter les taux pour tenter de corriger l’Erreur n°1)… puis l’Erreur n°3 (paniquer et réduire les taux après que l’Erreur n°2 a provoqué un krach et met en danger les banques).
Nous vivons dans un système où les crédits font les dépôts comme l’explique la Banque d’Angleterre.
De baisse de taux en baisse de taux, le crédit (la monnaie) se multiplie et le dollar a perdu 95% de son pouvoir d’achat depuis la création de la Fed.
La parasitocratie financière et technocratique justifie sa mainmise sur la monnaie en prétendant connaître le meilleur dosage de quantités de monnaie qui convient à l’économie. En réalité, elle refuse la loi du marché qui s’exercerait démocratiquement si les taux d’intérêt résultaient de la rencontre d’offre d’épargne et de demande d’investissement.
Mais comme le relève la Banque d’Angleterre, la multiplication du crédit et de la dette crée un système de plus en plus instable (1).
En quoi cela concerne chacun de nous
Dans les dépôts bancaires il y a l’épargne – l’argent que vous et moi avons légitimement acquis et qui correspond à du travail, le rendement d’un actif déjà existant, les dépôts liés à la création de crédit, d’argent inexistant au préalable.
Les deux types « d’argent » sont aussi intimement mélangés que le jaune d’oeuf et l’huile dans une mayonnaise.
C’est ce qui permet de justifier qu’une banque soit trop grosse pour faire faillite et les renflouements avec l’argent des contribuables pour sauver de nombreux déposants.
C’est aussi ce qui explique que les banques commerciales soient contre la séparation des activités risquées (prêts) de celle de la banque de dépôts-épargne. Ce n’est pas parce que les banques ont besoin de vos dépôts pour accorder des prêts ou spéculer sur les marchés. C’est simplement parce qu’elles ont besoin de vos dépôts en otage.
Pourquoi ce système de financement par la création monétaire est-il si instable
Le crédit ne peut pas grossir à l’infini car son envers est la dette. Or nous sommes humains, notre capacité d’endettement est donc limitée sauf à nous retrouver esclaves de notre dette. C’est d’ailleurs – au sens propre – ce qui arrivait autrefois aux mauvais payeurs. Eux et leur famille étaient réduits en esclavage par le créditeur lésé. C’est pour éviter les troubles sociaux résultant du crédit excessif que le plafonnement de la durée d’esclavage avait été prévu par les Babyloniens.
Le système actuel est totalement déconnecté de toutes limites physiques.
Comme l’explique Bill Bonner :
« Si vous gagnez un dollar en travaillant, en investissant ou en inventant, le dollar est une mesure de la quantité de richesse additionnelle (en produits ou en services) que vous avez aidé à produire. Les gens considèrent cela comme équitable et sont satisfaits de partager le progrès économique ainsi créé.
Si vous obtenez un dollar à des taux d’intérêt artificiellement bas de la part du système bancaire – un dollar qui n’a jamais été gagné ni épargné –, vous pouvez encore l’utiliser pour acquérir des biens et des services. Mais ce transfert est frauduleux.
Mais vous avez obtenu quelque chose sans donner une chose de valeur égale. Les gens qui n’ont pas reçu cet argent bon marché – et doivent travailler pour obtenir leurs dollars – se sentent floués. Ils ont le sentiment que le système est injuste… et c’est bien le cas. Certaines personnes en profitent, mais uniquement aux dépens des autres. Gagnant-perdant. »
La Banque d’Angleterre préfère expliquer l’instabilité du système avec des formules comme celle-ci :
Chacun ses goûts…
Mais il faut bien comprendre que ce système n’est pas qu’instable, il est aussi injuste.
Quand Jerome Powell fera-t-il machine arrière ?
Jerome Powell devra à nouveau baisser ses taux lorsque la prochaine crise éclatera. Pas pour faire plaisir à Donald Trump mais dans une énième tentative de sauver le système financier et son pivot, le dollar.
Comme le relayait Bloomberg en mai dernier, les cycles de resserrement de la Fed débouchent toujours sur des crises. A chaque fois, le cycle s’arrête à un taux plus bas.
Nous n’en sommes qu’à 2%. A quand la prochaine crise ? Si elle se produit à un niveau aussi bas de taux, le modèle selon lequel « les crédits font les dépôts » sera définitivement discrédité. Bon débarras et tant mieux pour notre pouvoir d’achat.
(1) Working Paper No. 529 Banks are not intermediaries of loanable funds – and why this matters.