La Chronique Agora

Banques : vers le « moment Kodak » ou vers le « moment iPhone » ?

fintech

Pas un mois sans qu’un nouvel acteur de la « fintech », français ou européen, ne lève des millions pour mieux s’attaquer au pré carré de la banque traditionnelle.

Conscientes du danger que représente la concurrence des fintechs, les grandes banques semblent avoir pour stratégie première de racheter les jeunes pousses du secteur.

Visiblement, l’idée est d’éviter le « moment Kodak« . Le numéro 1 de la photo a déposé le bilan en 2012 pour avoir sous-estimé l’impact de la photo numérique. Mais le choc entre les mastodontes bancaires et les aspirant-licornes pourrait bien conduire à une rupture du type « moment iPhone » ringardisant les vieux acteurs empêtrés dans leur lourdeur…

Du simple paiement en ligne à la banque tous azimuts

J’évoque souvent les vertus des cryptodevises. Leur usage permet de se passer des banques en matière de règlements et de transfert d’argent en ligne. Mais les cryptos ne sont pas le seul moyen pour vivre sans banque ! D’autres solutions permettent de délaisser espèces et cartes bancaires, nous rapprochant un peu plus de la société sans cash.

C’est le cas de Lydia, une application mobile qui permet de régler ses dépenses et de solder ses dettes entre particuliers. Gratuite pour les particuliers, l’éditeur prélève aux professionnels qui l’adoptent une commission de 0,5% à 1,5%, ce qui reste bien en-deçà des 0,5% à 5% de commission retenus par les Visa, MasterCard, American Express et autres Paypal.

L’inconvénient de ce type de solution ? Lydia n’est pas une banque mais un simple établissement de paiement. Par conséquent, si la société dépose le bilan, les clients ne pourront pas bénéficier du fonds de garantie des dépôts (FGDR).

De plus en plus de licences bancaires accordées aux fintechs

C’est justement la question que se sont posés les clients de la néobanque toulousaine Morning, qui a frôlé le dépôt de bilan fin 2016, avant d’être finalement rachetée par la Banque Edel du distributeur E. Leclerc.

Alors que son offre se limitait au transfert d’argent entre particuliers, elle a étendu sa gamme début juillet et propose désormais un compte de paiement digital avec IBAN et un panel de solutions dédiées aux personnes sous tutelles (Morning Protect), aux parents qui souhaitent gérer plus facilement l’argent de poche de leurs enfants (Morning Jump), en attendant une offre destinée aux étudiants étrangers programmée pour septembre (Morning Welcome). Des annonces concernant une offre pour les professionnels sont également prévues pour la rentrée.

Outre-Manche, Atom Bank, une autre banque 100% mobile, a connu des débuts en fanfares. Elle se distingue notamment en proposant des comptes à terme rémunérés. Les taux s’étendent actuellement de 1,75% sur un an à 2,40% sur cinq ans.

Ici, on a bien affaire à une banque britannique, c’est-à-dire à une société détentrice d’une licence bancaire auprès d’un régulateur financier. Les dépôts des clients font à ce titre l’objet d’une protection de 85 000 £ par le Financial Services Compensation Scheme (FSCS, l’équivalent du FGDR français).

A en croire le classement Fintech100 de KPMG, cette néobanque serait la sixième Fintech la plus innovante au monde (derrière cinq sociétés chinoises et une société américaine). Atom Bank propose également des prêts immobiliers et devrait continuer à élargir sa panoplie de services. Son objectif ? Devenir « le Ryan Air de la finance », rien que ça !

Plus récemment, c’est la Starling Bank, elle aussi anglaise, qui a fait couler beaucoup d’encre. Lors du salon Money 2020, la fintech a évoqué sa prochaine levée de fonds qui lui permettra de s’étendre en Europe – 40 millions £, qui vont s’ajouter aux 70 millions £ levés en janvier 2016. Les innovations qu’elle apporte, comme l’analyse de vos données de transactions avec alerte si vous vous mettez à dépenser trop d’argent, lui permettent de séduire 2 000 nouveaux clients par semaine.

La dernière entité à avoir beaucoup fait parler d’elle sur le marché du paiement en ligne s’appelle Klarna. Si les sonorités de cette marque ne vous disent rien, c’est normal : il s’agit d’une fintech suédoise. Elle aussi veut dépasser le simple marché du transfert d’argent pour s’attaquer à la banque. Cette licorne européenne est le dernier acteur en date à avoir obtenu une licence bancaire en Suède, ce qui devrait lui permettre de s’attaquer au marché unique. Son objectif ? Exactement le même qu’Atom Bank !

De nouveaux acteurs spécialisés dans la banque professionnelle

Revenons du côté de la France avec la néobanque Qonto, qui se présente comme « l’alternative bancaire pour les freelances, les entrepreneurs, les PME, les équipes et les startups ». Opérationnelle depuis février 2017, cette fintech propose un compte courant qui se veut « moitié moins cher que les banques traditionnelles sur toute la partie banque au quotidien » (flux, transactions par carte et frais de clôture de compte), rapporte le JDN.

Vous aurez vite fait de comparer les tarifs de Qonto avec ceux de votre banque, puisque la fintech fait simple avec un forfait de base unique à 9 € par mois sans engagement !

« Maintenant je sais quoi répondre à toutes les startups de l’écosystème qui nous demandent de leur recommander une banque : Ouvre un Qonto. »
Oussama Ammar, entrepreneur, fondateur de TheFamily

Cette nouvelle offre peut être souscrite « en cinq minutes » et le service client est joignable « 5j/7 via email, chat et réseaux sociaux, avec un temps de réponse moyen d’1h maximum ». Soutenue par Peter Thiel, Qonto vient de lever 10 millions € lors d’un deuxième tour de table, six mois après sa levée d’amorçage qui lui avait permis de récolter 1,6 million €.

Sa concurrente belge Ibanfirst, quant à elle soutenue par Xavier Niel, devrait réagir.

Comme toujours, la concurrence est saine et vous permettra à terme d’accéder à une rémunération des dépôts, des alertes sur vos dépenses pour vous éviter des intérêts sur compte débiteur lorsqu’un virement que vous attendiez a pris du retard.
[NDLR : les instances européennes souhaitent mettre en place une législation leur permettant de bloquer les dépôts en cas de difficultés d’une banque. La crise financière est loin d’être terminée et vos dépôts seront cette fois pris en otage. Pour comprendre pourquoi et comment protéger votre argent, c’est ici.]

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