La semaine avait débuté sur une consolidation de -1% des indices boursiers. Cela traduisait une mauvaise humeur épidermique qui n’avait rien de très surprenant : il a plu sans discontinuer durant tout le week-end… l’essence commence à manquer (la « prudence » engendre la panique qui engendre la pénurie)… les entreprises françaises — petites et moyennes — se montrent de plus en plus pessimistes (officieusement)… les statistiques japonaise sur les excédents commerciaux confirment une chute de la demande intérieure… et après les gains sans cause réelle engrangés vendredi, les investisseurs n’ont manifestement pas envie de faire semblant de croire que les marchés offrent du potentiel à la hausse.
Personne de sensé ne mise sur un scénario plutôt qu’un autre. Voilà 15 jours que les opérateurs se contentent de développer du « petit jeu » — cela revient à essayer de coller à la tendance… mais les sherpas se font un devoir de secouer les indices comme des oliviers à la saison de la récolte.
Et comme ce sont eux qui choisissent l’arbre, le moment et qui tendent les filets, les investisseurs ont un peu de sentiment de « payer pour voir »… et parfois, de se faire essorer.
La lassitude commencerait-elle à gagner les marchés ?
L’étude hebdomadaire publiée vendredi dernier par Bank of America Merrill Lynch Global Research trahit des réductions de voilure dans toutes les catégories d’actions sous revue : -5,8 milliards de dollars sur la semaine écoulée après -7,4 milliards mi-mai — dont -1,1 milliard sur les actions européennes et -4,9 milliards sur les actions américaines, le solde sur les valeurs classifiées marchés émergents.
Le chiffre qui attire notre attention, c’est la matérialisation d’une quinzième semaine consécutive de rachats sur les fonds actions orientés Zone euro |
Le chiffre qui attire notre attention, c’est la matérialisation d’une quinzième semaine consécutive de rachats sur les fonds actions orientés Zone euro… d’où cette question : si les investisseurs particuliers, les family offices, les fonds de retraite, les assureurs se désengagent d’Europe depuis début février, qui a tiré les cours à la hausse du 11 février au 21 avril ?
Multiplié par 10… du jour au lendemain ?
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Ce pourraient être quelques puissants hedge funds — mais ils subissent eux aussi une décollecte, faute de performances, depuis six mois.
Ce pourraient être les fonds souverains, mais la chute des recettes pétrolières depuis 18 mois les contraint à devenir vendeurs nets d’actions comme d’obligations.
Les 5 000 emplois bientôt supprimés par l’ADNOC (la compagnie pétrolière nationale d’Abu Dhabi) donnent la mesure du malaise qui frappe les principaux pays producteurs du Golfe persique.
Ce pourraient être les banques agissant pour compte propre mais elles sont contraintes par des règles prudentielles qui brident leurs prises de risques sur les marchés.
Pourtant, les établissements de crédit croulent sous les liquidités : selon la dernière prestation de Villeroy de Galhau (nouveau gouverneur de la Banque de France) devant la Commission des finances de l’Assemblée nationale, les banques commerciales affichent globalement un excédent de liquidités de 690 milliards d’euros.
Qui achète ?
Mais alors qui achète, qui orchestre une hausse à laquelle aucun des intervenants habituels ne participe ?
Il y a bien un acheteur… mais il est situé très loin de la City ou de Francfort. Il s’agit de la Banque centrale du Japon (BoJ) et du surpuissant fonds de retraite des fonctionnaires nippons.
La remontée du yen — qui a repris 10% face au dollar depuis fin janvier — offre un surcroît de pouvoir d’achat aux fonds japonais… sans bourse délier |
La remontée du yen — qui a repris 10% face au dollar depuis fin janvier — offre un surcroît de pouvoir d’achat aux fonds japonais… sans bourse délier.
Autre indice troublant, les ETF poursuivent leur montée en puissance en Europe et partout ailleurs dans le monde. Cela au détriment des achats de titres « discriminants » (typiquement le stock picking et la gestion sur mesure).
Quel est aujourd’hui le plus gros acheteur d’ETF sur la planète ?
C’est la banque centrale japonaise qui, au rythme de ramassage actuel, détiendra bientôt 50% de tous les ETF adossés aux actions nippones.
La raréfaction du papier instauré par l’acheteur hégémonique (BoJ) qui disloque les mécanismes de formation des prix sur son marché domestique contraint les investisseurs locaux à tenter une diversification vers des zones où il existe encore une contrepartie.
L’effondrement des volumes en Europe démontre que cette contrepartie est de plus en plus inopérante. Les volumes quotidiens flirtaient en effet avec 4,4 milliards d’euros mi-février lors de l’entame du rebond du CAC 40 ; ils ont fondu de 40% en trois mois… et il s’échange désormais moins de 2,7 milliards d’euros par jour à Paris.
Retirez entre 60% et deux tiers de trading algorithmique (opérations débouclées en intraday) et voici des séances à moins d’un milliard d’euros d’échanges « réels ».
Dans le même temps, les encours de dérivés continuent de gonfler. Moins nous observons d’activité sur marchés « physiques »… plus les liquidités se déplacent vers la sphère de l’investissement virtuel.
Le comble de l’excès est pulvérisé chaque jour par les dérivés du métal précieux, avec maintenant 500 contrats à terme pour une once disponible. Ce n’est parce c’est aussi absurde que disproportionné que cela ne devrait pas durer.
Plus les marchés sont dysfonctionnels, plus ils semblent se figer dans leur état.