La Chronique Agora

Baltimore, conteneurs et patrimoine

▪ Votre correspondante est actuellement en immersion dans une série policière : Sur Ecoute, pour être précise. Dans la mesure où l’intrigue se déroule dans la ville de Baltimore, où se situe notre maison-mère, je ne pouvais qu’être intéressée — d’autant que Baltimore n’attire pas franchement les feux des projecteurs hollywoodiens, d’ordinaire. Avec raison, vu le portrait peu flatteur qui en est tiré : corruption, violence, drogue, magouilles politiques…

Entre gangsters suivant des cours de marketing pour optimiser leurs trafics et flics ripoux, la série s’est intéressée au cas des dockers du port de Baltimore. On y voit navire après navire décharger des conteneurs bourrés à craquer de voitures, couches pour bébé, gadgets électroniques, etc. (et d’autres choses moins orthodoxes — mais je vais laisser le suspense intact, au cas où vous souhaiteriez le découvrir par vous-même…)

On entend beaucoup moins parler, en revanche, de navires qui chargent des conteneurs à destination du reste du monde. Et comme le déclare un docker regardant d’un oeil fataliste une sidérurgie désaffectée, destinée à devenir un ensemble immobilier de prestige : « autrefois, on fabriquait des trucs, ici »

▪ Bill Bonner abordait le même sujet il y a quelques jours :

« Alors que nous roulions dans Baltimore récemment, nous avons traversé un quartier ouvrier appelé Dundalk. Il y a cinquante ans de ça y vivaient des familles d’ouvriers, gagnant de bons salaires à l’usine General Motors… chez Bethlehem Steel… dans les terminaux de fret, les sidérurgies et les usines ».

« Aujourd’hui ? Les usines ont en grande partie disparu. Les hommes occupent des emplois à bas salaire dans le secteur des services. Mais ils vivent encore à Dundalk. Nous n’avons pas de faits. Simplement des observations et des suppositions. Mais les ronds-de-cuir ont déjà conclu que les Etats-Unis ont beaucoup moins de ‘mobilité sociale’ qu’autrefois… et même moins que les Etats-Providence sclérosés d’Europe ».

Bill part ensuite sur une tangente plus philosophique :

« Pourquoi les gens restent-ils à Dundalk ? Sont-ils programmés pour le segment le plus bas de la classe moyenne ? Sont-ils culturellement faits pour des emplois peu qualifiés, à salaire limités ? Leur éducation les prédispose-t-elle à une telle situation ? »

« Les sociologues débattent quant aux causes. Ce qui nous intéresse, ce sont les effets. Quelle qu’en soit la raison, la génération suivante reprend là où la précédente s’est arrêtée ».

« Nous savons que la richesse est accumulée sur de nombreuses générations. […] Nous savons aussi que si l’on est né à New York plutôt qu’à New Delhi, la vie sera probablement plus facile. Nous savons que lorsqu’on est né dans une famille riche du centre de Manhattan, on sera probablement plus riche, en tant qu’adulte, que lorsqu’on est né dans une famille pauvre à Harlem ».

« Pourtant, combien de gens prennent la responsabilité de la richesse de leurs enfants ? Combien réfléchissent au moyen de faire travailler leur succès pour la génération suivante… et celle d’après ? »

▪ Pas nos dirigeants politiques, en tout cas, occupés qu’ils sont à dilapider l’argent public — en chargeant de dette nos enfants et petits-enfants.

Simone Wapler en tire des conclusions très claires dans L’Investisseur Or & Matières : « [l’or grimpe] en raison des inquiétudes sur les dettes souveraines, tant aux Etats-Unis qu’en Europe. Aux Etats-Unis, des artifices comptables désespérés nous ont valu ce titre très surprenant de la part de L’Agefi du mardi 3 mai : ‘Timothy Geithner a repoussé au 2 août la date à laquelle il estime être dans l’incapacité de rembourser les obligations arrivant à maturité’. Savourez l’ironie, cher lecteur, il s’agit de la première économie au monde, notée AAA, dont la monnaie et les obligations constituent 30% des réserves monétaires internationales ».

« En Europe, la Grèce va rééchelonner sa dette, ce qui recule une restructuration plus profonde. Cette solution qui permet aux autorités de conserver encore un peu la face a aussi l’immense mérite de ne pas faire jouer les CDS souverains. Ces produits dérivés sont censés assurer les obligations souveraines contre un incident de paiement. Mais banquiers et assureurs ont-ils les moyens de payer ? »

« Investisseur de court terme, passez votre chemin. Investisseur de long terme, cramponnez-vous à votre or et éliminez tous les risques de contrepartie inutiles ».

Vous voilà averti, cher lecteur !

Meilleures salutations,

Françoise Garteiser
La Chronique Agora

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