▪ Alors que dans l’économie spéculative des banquiers et des gestionnaires de hedge funds, c’est champagne et caviar à tous les repas, les malheureux coincés dans l’économie réelle sont au régime pain sec et eau.
Tout d’abord, nous avons quelques chiffres provenant du Centre américain pour des prêts responsables. Près de trois millions de maisons devraient être saisies aux Etats-Unis en 2009. Et il en restera ensuite encore huit millions !
Nous avons dépassé le piémont du subprime. Mais les hauts sommets des prêts Alt-A, prêts jumbo et autres instruments hypothécaires peu fiables sont encore devant nous.
▪ Et la démographie n’arrange pas les choses. Mortimer Zuckerman, rédacteur du US News & World Report, donne quelques chiffres :
Parmi les Américains qui se retrouvent au chômage, ils sont plus nombreux à être sans emploi, et pendant plus longtemps, qu’à aucun autre moment depuis 1948. Ils sont également plus nombreux à épuiser leurs allocations chômage avant de retrouver un nouvel emploi. Et s’ils sont assez chanceux pour trouver du travail, ce sera pour faire les heures les plus courtes depuis 1951.
En d’autres termes, les baby-boomers n’ont jamais vu des temps si difficiles… pour eux ou pour leurs enfants. Un Américain sur neuf dépend du gouvernement pour son pain quotidien.
Depuis le début de la crise, 6,2 millions de personnes sont venues se rajouter à celles qui reçoivent des coupons alimentaires. Et six personnes se présentent pour chaque offre d’emploi… contre 1,7 lorsque la récession a commencé.
Dans le même temps, les baby-boomers américains envisagent de travailler plus longtemps qu’ils le prévoyaient. 63% d’entre eux annoncent leur intention de retarder leur départ en retraite pour pouvoir continuer à épargner.
Ce ne sont pas de bonnes nouvelles pour les travailleurs plus jeunes, qui espéraient que les baby-boomers se retireraient du marché pour libérer quelques emplois. Parmi les jeunes Américains, le chômage n’a jamais été si élevé depuis 1945.
Comme si ça ne suffisait pas, le gouvernement a empiré les choses en augmentant le salaire minimum ; on estime que cette mesure à elle seule a coûté aux jeunes 300 000 emplois.
▪ Durant une dépression, les prix chutent. Le prix de la main-d’oeuvre aussi… mais pas facilement. Voilà pourquoi l’inflation aide généralement l’emploi — elle réduit le coût réel de la main-d’oeuvre. Mais les gens n’acceptent pas facilement une baisse de salaire. Et voilà qu’arrivent les autorités avec des plans visant à augmenter les salaires… ce qui empire la situation.
Naturellement, Zuckerman observe ces faits et en arrive à la mauvaise conclusion. Son titre :
"Le libéralisme n’est pas à même de créer du travail".
Il continue dans un article du Financial Times : "seuls des programmes massifs peuvent relever ce défi : restaurer une croissance stable dans notre économie". Quel genre de programmes massifs ? Il parle d’une "banque des infrastructures". Il aurait pu parler de guerre. La Deuxième Guerre mondiale a fait des merveilles pour le chômage. Tout à coup, quiconque voulait du travail en trouvait.
Mais ce ne sont que des sottises. L’Union soviétique a mis tout le monde au travail. On voit où ça les a menés.
Ce n’est pas le fait que les gens transpirent sur un lieu de travail qui fait prospérer une société ; ils doivent faire des choses qui augmentent la richesse. Les infrastructures, comme tout autre investissement, n’ont de sens que lorsqu’elles sont amorties.
Les Japonais ont déversé plus de béton au mètre carré que quiconque auparavant. Ils ont prouvé qu’on peut construire tous les ponts et les canaux qu’on veut, ça ne fait pas repartir l’économie.
Le libéralisme est la seule chose qui puisse créer des emplois qui en valent la peine. Parce que le libéralisme est le seul à savoir — grâce aux ventes et aux bénéfices — quels projets ont du sens.
Mais notre bataille est perdue d’avance. Les gens préfèrent de loin des mensonges apaisants. Nous aussi, d’ailleurs.
Mundus vult decipi, ergo decipiatur !