▪ Difficile de ne pas prendre pitié des banquiers. Cette semaine, l’un d’entre eux s’est senti si fâché et humilié qu’il a donné sa démission — lors d’une audition devant le Sénat US.
L’un après l’autre, les banquiers montent à l’échafaud. Goldman, J.P. Morgan, Barclays… et maintenant HSBC.
L’un perd de l’argent. L’autre truque les taux LIBOR.
L’un bidouille les comptes d’un pays tout entier. L’autre satisfait les besoins bancaires de terroristes, de dealers de drogue et de blanchisseurs d’argent.
Cette dernière accusation est dirigée contre HSBC depuis mardi, ce qui a poussé le directeur de la conformité à démissionner sur le champ. Voici l’accusation :
« … en utilisant un réseau mondial de branches et une filiale américaine pour créer une porte d’entrée dans le système financier américain qui a mené à plus de 30 milliards de dollars de transactions suspectes liées aux drogues, au terrorisme et aux activités d’entreprises situées en Iran, en Corée du Nord et en Birmanie ».
Ce spectacle est peut-être distrayant, mais selon nous, fondamentalement, il ne signifie rien.
▪ Voilà ce qui s’est vraiment passé
Les autorités américaines ont créé de l’argent bizarre au début des années 70. Contrairement au dollar adossé à l’or, la nouvelle devise était presque infiniment flexible. Elle permettait au système financier de créer des milliers de milliards de dollars de nouveau cash et de nouveau crédit, gonflant vertigineusement la quantité de dette dans le système… et augmentant énormément les profits du secteur bancaire.
L’industrie financière — qui distribuait tout ce nouvel argent — s’est mise au travail, créant de nouvelles manières fantaisistes de le faire circuler. Chaque fois qu’une transaction était signée, elle faisait un profit. Bien entendu, ça l’a encouragée à trouver toutes sortes de ruses pour faire des transactions.
Ensuite, quand la bulle du crédit a éclaté en 2008-2009, bon nombre de ces petits trucs ne semblaient plus si intelligents. Ils semblaient sinistres. Stupides. Voire tordus.
« Lorsque la marée se retire », dit Warren Buffett, « on peut voir qui nage sans maillot ».
Ce n’est pas joli-joli.
Des milliards de dollars ont été prêtés à des gens à qui l’on n’aurait même pas dû permettre d’emprunter l’argent de leur déjeuner. Et maintenant, il y a des pertes — qui se montent à des milliers de milliards de dollars.
▪ Comment tout ça va-t-il finir ?
La vraie question — la seule question d’importance depuis la crise — est la suivante : qui encaissera les pertes ? Ou, pour dire les choses autrement : comment le système sera-t-il purgé ? Qui décidera qui gagne et qui perd ?
M. le Marché ou M. le Politicien ?
Laissera-t-on les investisseurs et les spéculateurs subir leurs pertes… ou les transférera-t-on vers les épargnants et les contribuables ?
Qui perdra ? Les riches… ou le reste ?
Nous vous avons donné notre réponse à maintes reprises : laissez M. le Marché faire le tri. Il est complètement impartial. Il est honnête. Il est rapide. Et il travaille pour pas cher.
En septembre-décembre 2008, il aurait probablement mis une volée de bois vert aux banquiers. Dans un vrai krach, peu de grandes banques seraient restées debout. Les investisseurs et les prêteurs qui y auraient mis leur argent… et qui auraient investi dans les placements soutenus par le crédit bidon… auraient perdu des milliers de milliards de dollars. Les riches ne seraient plus si riches. Et nous serions désormais dans une phrase de reprise réelle, avec de nouvelles institutions financières.
Mais nous ne sommes pas en position d’imposer notre volonté au reste du monde. Les politiciens, si. Et ils ont décidé de faire autrement. Au lieu de laisser M. le Marché faire son travail, ils font leurs propres choix… essayant généralement de diriger les pertes vers des groupes de gens qui ne contribuent pas aux frais de campagne électorale… et ne savent pas ce qui se passe. C’est-à-dire vers les masses… et les générations futures.
L’idée est de balayer autant de poussière que possible sous le tapis… d’emprunter et d’imprimer des milliards de dollars supplémentaire pour étayer le système financier… tout en faisant défiler quelques banquiers dans les rues, un noeud coulant autour du cou. La presse les insulte. La foule leur crache dessus. Le spectacle continue…
… et rien ne change vraiment.