La Chronique Agora

L’assouplissement quantitatif, la solution magique à tous nos problèmes

▪ Les banques centrales perdent les pédales. Depuis 2008, elles avaient réussi à créer un « effet richesse ». La hausse des marchés financiers était leur triomphe. Cela permettait de répéter : « abracadabra, tout va bien puisque le prix des actions et des obligations s’élève ; si les actions valent plus cher, c’est parce que les entreprises feront plus de bénéfices ; la croissance est revenue ».

Mais pfffuittt… voici que la magie s’en va, laissant derrière elle des crapauds baveux, qui n’ont pas su saisir les paillettes de l’effet richesse et ne seront donc pas transformés en princes charmants. Déception…

En réalité, la seule chose que les banques centrales souhaitaient — une « bonne petite inflation » de 2% — n’est pas là. L’inflation est l’élixir magique de la fée banque centrale qui permet de ronger les dettes d’Etat en taxant de façon invisible épargne et consommation. L’inflation est un petit impôt sournois payé par tous qui permet, selon le mot de Colbert, de « plumer l’oie sans la faire crier ». A 2% d’inflation, trente-cinq ans plus tard, l’oie a perdu la moitié de ses plumes sans nullement cacarder (car oui, tel est le cri de l’oie).

Faute d’inflation, il faut s’attendre à une réaction technocratique classique : plus de tout ce qui n’a pas marché jusque-là

Faute d’inflation, il faut s’attendre à une réaction technocratique classique : plus de tout ce qui n’a pas marché jusque-là. Avec un écueil, le peuple est de moins en moins dupe des pouvoirs magiques de la bonne fée banque centrale. Non pas que le peuple soit devenu lucide, mais il est prêt à croire d’autres contes.

Ainsi, le peuple pense que la baguette magique de la création de crédit s’est abattue sur les créatures banques et que le problème est là. Il veut que la baguette magique touche cette fois les crapauds lambda qui n’ont pas l’immense privilège d’oeuvrer dans la finance. Le peuple veut donc le QE (quantitative easing, création monétaire via la création de crédit) pour le peuple.

▪ Sortez les baguettes !
En Europe, le site QE4People milite pour cette solution magique, « un plan de sauvetage de l’Eurozone ».

D’abord, le site analyse l’échec du QE. C’est évident, la fée, cette gourdasse, s’est trompée.


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La baguette magique de la banque centrale a touché les investisseurs institutionnels et les banquiers — or ce sont déjà des princes charmants qui ont tout ce qu’il leur faut. Comme ils sont déjà riches (en plus d’être beaux) ils ne dépensent pas.

Mais QE4People a la solution. Simple, indolore mais ô combien savoureuse. La banque centrale redirige sa baguette magique…

Elle touche tous les crapauds qui travaillent dans les « investissements publics » et elle met des billets dans les poches de tous les pauvres crapauds-consommateurs. Ils consommeront alors des choses qu’ils n’avaient pas les moyens de consommer auparavant vu qu’ils étaient de pauvres crapauds. Ils rouleront dans des carrosses publics, conduits par des cochers fonctionnaires vêtus de livrées brodées d’or.


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Subitement, le monde est transformé, chacun devient prince charmant. Pour 175 euros par mois et par crapaud, indique QE4People, la baguette magique produit à cette métamorphose.

Evidemment, les contes de fée ont leur logique merveilleuse.

Pour penser que le QE du peuple va transformer les crapauds en princes charmants et consommateurs, il vous suffit de croire aux deux choses suivantes :

– Si chacun consomme au-dessus de ses moyens, tout le monde devient plus riche.
– Toute croissance de l’activité économique se traduit nécessairement par une croissance de la richesse.

▪ Ici intervient une immonde sorcière, à l’aspect répugnant…
Aaaaaaaarghhhhhhhhhhh, arrêtez de rêver, d’être ébloui par des mirages auxquels même des enfants de huit ans ne croient plus ! Arrêtez d’écouter ces bonimenteurs et affabulateurs de banquiers centraux. Si recevoir de la fausse monnaie rendait plus riche, depuis le temps, de l’Allemagne de 1923 au Zimbabwe de 2008, cela se saurait. En réalité, tout cela se terminera dans des bains de sang dilués par des torrents de larmes, à moins que ce ne soit l’inverse.

Voulez-vous LE secret de la véritable richesse, ici et maintenant, en ce bas monde cruel ?

Voulez-vous LE secret de la véritable richesse, ici et maintenant, en ce bas monde cruel ?

Hahahaha (ricanement de la vieille sorcière)… je vois votre petit oeil humide briller de convoitise… Voici mon secret, inconnu des banquiers centraux, des Etatistes de droite et de gauche ; il est gratuit, nul besoin de vendre votre âme pour l’obtenir :

Il n’y a pas de vraie prospérité conquise sans développement d’activités rentables.

Consommer au-dessus de ses moyens n’a jamais conduit à développer des activités rentables. Ce qui est vrai à l’échelon individuel (dépenser ne m’enrichit pas) le reste à l’échelle collective. Croire que la dépense collective conduit à l’enrichissement collectif est encore plus idiot que de croire que le gagnant du loto va enrichir son pays. D’où vient l’argent du loto ?

Si pour s’enrichir, il suffisait de consommer ou de faire plus de n’importe quoi, ça se saurait. L’URSS ou la RDA affichaient en leur temps de la croissance économique. L’URSS et la RDA avaient aussi beaucoup de « services publics » (vu qu’il n’y avait pas de services privés). Mais produire plus de boulons de 12 alors que les gens ont besoin d’écrous de 6 ou avoir 100% de fonctionnaires n’est pas le chemin de la prospérité.

Je vois, cher lecteur, une lueur de déception effacer celle de la convoitise dans votre oeil.

Toujours gratuit, je vous livre un deuxième secret : celui de la rentabilité, chemin de la richesse collective car nous sommes tous tour à tour acheteur et vendeur.

Comment reconnaître ce qui est rentable ? Très simple : par le marché, au sens de « concurrence ». Les crapauds-consommateurs ont tendance à dépenser l’argent qu’ils ont gagné en choses utiles et ou agréables. Comme cet argent n’est pas tombé du ciel et leur a demandé un effort, ils sont regardants au rapport qualité-prix. La concurrence conduit à sélectionner au meilleur rapport qualité-prix et donc à produire ce qui est le plus rentable. Dans le sauvetage de QE4People, qui selon vous détermine « ce qui est le plus important pour la société » ?

Je vous disais en commençant que les banquiers centraux ont perdu le contrôle de la situation. Ils maquillent les prix en baissant les taux et en créant de la fausse monnaie. Ignorants du secret de la vraie richesse, les crapauds coassent.

Pour faire taire les crapauds, les banquiers centraux tenteront probablement le QE du peuple. L’inflation décollera, les crapauds seront transformés en oies très vite plumées. Les contes de fées pour adultes n’existent pas.

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