** "A quoi mesure-t-on la réussite ?" se demandait Bill Bonner cette semaine :
"Plus personne ne s’inquiète de savoir combien d’anges peuvent danser sur une tête d’épingle parce que ce n’est pas efficace — à quoi bon ? Et ce n’est pas mesurable. Il n’y a aucun moyen de le tester", écrivait-il.
"Dans le monde actuel, les gens font des choses qui ont des résultats mesurables. S’il n’y a pas moyen de dire si vous faites des progrès… ou si vous utilisez efficacement votre temps… ou si vous gagnez plus d’argent… oubliez ça ! Tout ce qui compte, c’est tout ce qu’on peut compter. La vie elle-même est devenue numérique. Combien pesez-vous ? Quel est votre taux de cholestérol ? Combien de rendement, votre portefeuille ? A combien avez-vous vendu votre maison ?"
Je ne vais pas rentrer dans le débat de la réussite et comment on la mesure. Sur ce sujet, je me contenterai de faire une petite digression : au Bhoutan, royaume perdu dans l’Himalaya, on trouve, à côté du PIB, les chiffres du BIB — le "bonheur intérieur brut", mesuré selon des indicateurs de santé, d’éducation, etc….
Mais ce ne sont pas la réussite et ses critères qui occupent mes pensées en ce beau matin de novembre. En fait, à la lecture des notes de Bill, je me demande si ce besoin quasi-désespéré de mesurer, de quantifier, de calculer, d’évaluer… n’est pas le reflet d’une société qui a perdu tout repère… et est finalement tout aussi désorientée qu’elle l’était durant le relatif "obscurantisme" du Moyen-Age.
"La science avance !", nous félicitons-nous. "Mars n’est plus très loin", nous disent les astrophysiciens. "On a déchiffré le génome humain", se félicitent les biologistes. "On maîtrise l’atome", triomphent les physiciens. "On a les outils nécessaires pour se prémunir des risques du marché", claironne la Fed.
Cela devrait faire avancer les choses, en principe — depuis le temps, avec toutes ces nouvelles découvertes, on devrait presque avoir retrouvé le jardin d’Eden ! Sauf que regardez l’état du monde actuel : les conditions géopolitiques sont aussi tendues qu’un élastique sur le point de céder… l’épuisement guette les matières premières… le réchauffement climatique donne une nuance quasi-apocalyptique à la moindre prévision météo… les déséquilibres sociaux, économiques et politiques (aussi bien à l’échelle des pays qu’à celle du monde) deviennent insoutenables… bref "il y a quelque chose de pourri au royaume de l’Homme".
Tout nous échappe. Nous sommes assaillis de flots d’informations, de nouvelles découvertes, d’affirmations qui font naître de nouvelles interrogations. Et alors que nous sommes perdus dans ce paradoxe — plus on en sait, moins on en sait — faut-il s’étonner que nous essayions de nous raccrocher à des chiffres… qui sont les éléments objectifs par excellence — des choses solides, "calculables", indiscutables ?
** C’est Raphaël Garaud, rédacteur en chef de Vos Finances – La Lettre du Patrimoine et véritable étendard du bon sens, qui aura le dernier mot : "il nous faut continuer à suivre attentivement les évènements et le moment venu, agir pour que notre portefeuille soit encore plus solide. […] Tout en surveillant les grandes tendances, il faut prendre du recul pour apprécier la situation".
"Il reste tant de besoins à satisfaire sur notre planète que les entreprises les plus avancées dans des secteurs majeurs en tireront inévitablement profit. Il faut rester vigilant, serein, mais aussi avoir de la méthode, et du bon sens… en somme, il faut être cartésien".
Sur ces sages paroles, je vous souhaite, cher lecteur, une excellente fin de semaine.
Françoise Garteiser
La Chronique Agora
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L’Investissement de la Semaine
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