Les Américains n’ont plus suffisamment d’épargne, les consommateurs sont endettés et l’inflation monte. Les marchés devront un jour s’ajuster.
« Tournant, tournant dans la gyre toujours plus large,
Le faucon ne peut plus entendre le fauconnier.
Tout se disloque. Le centre ne peut tenir.
L’anarchie se déchaîne sur le monde
Comme une mer noircie de sang : partout
On noie les saints élans de l’innocence.
Les meilleurs ne croient plus à rien, les pires
Se gonflent de l’ardeur des passions mauvaises. »
– Yeats, La Seconde Venue (Trad. Yves Bonnefoy)
Mercredi, les investisseurs ne savaient plus quoi faire. Les chiffres annoncés ont semé la confusion parmi les faucons.
Le bouton « vente » pour l’inflation, mais…
D’un côté, ils ont appris que l’inflation empirait. L’IPC a enregistré une hausse surprise, à 2,1% sur les 12 derniers mois. La tendance est clairement haussière. Si le rythme de janvier se poursuit, l’IPC américain atteindra les 6,7% à la fin de l’année.
Cette attaque virulente pour les nerfs des investisseurs a été aggravée par des données provenant du secteur de l’immobilier.
Bloomberg :
« Les prix des maisons ont atteint des sommets historiques dans quasiment deux tiers des villes américaines au quatrième trimestre, alors que les acheteurs se battaient autour d’une offre à des planchers record, en termes d’annonces publiées ».
Les traders savaient quoi faire. Ils ont immédiatement appuyé sur le bouton « vente ».
La hausse de l’inflation signifiera une baisse des prix des obligations… et laissera les consommateurs, déjà endettés, avec encore moins d’argent. Il faut donc vendre les actions aussi.
Mais alors même que le Dow commençait à s’effondrer, de nouvelles données sont arrivées : le rapport sur les dépenses de consommation.
L’épargne est la clé de la prospérité
On a attribué aux consommateurs le « sauvetage » du PIB américain l’an dernier ; ils ont vidé leurs tirelires pour acheter bidules et gadgets. Ce chiffre aurait dû lui aussi pousser les investisseurs dans une « fuite vers la sécurité ».
Comparée au taux d’épargne de 10% habituel durant les années 1970, 1980 et 1990, l’épargne des ménages américains est passée à un plancher quasiment record de 2,4% l’an dernier.
Nous nous interrompons ici pour rappeler aux lecteurs que l’épargne est la clé de la croissance économique et de la prospérité.
Sans épargne, on vit sur le fil… consommant tout ce qu’on produit. Peu à peu, les machines, champs et routes se dégradent. Ils doivent être continuellement renouvelés… avec de nouvelles usines et de nouvelles entreprises offrant des emplois, se faisant concurrence sur les marchés et créant de la richesse.
La différence entre un pays riche et un pays pauvre est donc le niveau d’épargne – c’est-à-dire de capitaux stockés – disponible pour être utilisée par les entreprises et les consommateurs.
L’épargne est également importante en tant qu’assurance. On ne sait jamais quand l’anarchie se déchaînera sur le monde. On épargne donc de l’argent pour avoir quelque chose à dépenser si les choses tournent mal.
Evidemment, personne ne semble penser que les choses tourneront mal un jour. Après tout, avec des génies à la tête des banques centrales… des saints au gouvernement… et des magiciens dans l’industrie financière – peut-être ont-ils raison !
Quoi qu’il en soit, lorsque les données des ventes au détail ont été publiées, elles ont révélé que les ménages américains semblent un peu à court. Fauchés, en d’autres termes.
La structure du capital est pourrie
D’abord, les chiffres de décembre ont été révisés à la baisse. Ensuite, la croissance des ventes au détail de janvier n’a atteint qu’un peu plus de la moitié des 0,5% attendus.
Là encore, ce n’était pas de bonnes nouvelles. Mais une fois traduit en langage trader moderne, tout ça donnait : « hé, la Fed va pas continuer à augmenter les taux… pas avec ce genre de chiffres ! »
Les traders – conditionnés par de nombreuses années d’interventionnisme de la Fed à « acheter pendant les creux » – ont considéré ces mauvaises nouvelles comme étant bonnes et ont acheté plus de valeurs surévaluées. Le Dow a terminé sur un gain de 1%.
Mais les marchés découvrent de nouveaux prix tous les jours. Cette semaine, ils ont découvert que les prix des obligations devraient être plus bas (si l’on tient compte d’un nouveau programme – probable mais non certain – de resserrement quantitatif de la part de la Fed… mais aussi des derniers chiffres de l’inflation).
Tandis que les prix chutaient, le rendement du bon du Trésor US à 10 ans a atteint les 2,92% – un nouveau sommet de quatre ans.
Les investisseurs boursiers découvriront, eux aussi, que les prix des actions devraient être plus bas. C’est une certitude, bien que le timing lui-même soit imprévisible.
Plus largement, nous pensons qu’ils découvriront que toute l’affaire – toute la structure de capitaux – est pourrie.
Passions mauvaises
Depuis 30 ans, la Fed décourage systématiquement l’épargne…
… Tandis que l’appétit du gouvernement fédéral a largement augmenté. A vous de faire le calcul.
En janvier 2017, on comptait environ 8 800 Mds$ d’épargne stockée dans des institutions de dépôt aux Etats-Unis (dont une partie appartenant à des étrangers). Aujourd’hui, il y en a 9 090 Mds$… soit une augmentation de moins de 300 Mds$ sur l’année.
Même si 100% de cette somme était mobilisée cette année, cela ne couvrirait qu’un quart du déficit de 1 200 Mds$ prévu par les autorités US.
Autrefois, on pouvait compter sur les républicains pour lutter contre les déficits. Ils croyaient à un gouvernement limité et à des budgets équilibrés.
A présent, la majorité d’entre eux ne croient plus à rien – sinon à se faire réélire !
Et pendant ce temps, les pires « se gonflent de l’ardeur des passions mauvaises »…
… impatients de ponctionner jusqu’au dernier centime de l’épargne des autres.
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